Volte-face de QuĂ©becâ: est-il trop tard?

Il aura fallu une levĂ©e de boucliers gĂ©nĂ©rale pour que le gouvernement Legault entende finalement raison. Devant la grogne gĂ©nĂ©ralisĂ©e, QuĂ©bec a annoncĂ©, la semaine derniĂšre, quâil injectera 540 M$ supplĂ©mentaires dans le rĂ©seau scolaire pour prĂ©server les services aux Ă©lĂšves. Une volte-face qui soulĂšve une question fondamentale: est-il trop tard?
Lâopinion de Johanne Fournier
Jâai posĂ© la question Ă une maman du Bic, dont les services sur lesquels pouvait compter son fils seront supprimĂ©s Ă la rentrĂ©e. La classe de Jeffrey-Lou, dont le personnel Ă©tait spĂ©cialisĂ© dans le trouble du spectre de lâautisme, nâexistera plus. « Le ministre a annoncĂ© quâil ajouterait des millions pour les services aux Ă©lĂšves, convient Marie-JosĂ©e Aubin. Mais, le mal est dĂ©jĂ fait: les postes sont dĂ©jĂ supprimĂ©s. »
Vent de panique
Rappelons les faits. En mars, le budget 2025-2026 a annoncĂ© des compressions en Ă©ducation. En juin, le ministre de lâĂducation, Bernard Drainville, a passĂ© une commande aux centres de services scolaires: rĂ©duire leurs dĂ©penses de 570 M$.
Le rĂ©sultat? Un vent de panique a soufflĂ© sur les Ă©coles. Des directions ont implorĂ© QuĂ©bec de reculer sur ces coupes dĂ©vastatrices, sans quoi des services essentiels aux Ă©lĂšves seraient annulĂ©s Ă la rentrĂ©e. Les centres de services scolaires ont dĂ» prĂ©parer des listes de suppressions qui donnent le vertige: postes dâenseignants, services dâorthopĂ©dagogie, aide aux Ă©lĂšves en difficultĂ©, transport scolaire.
Une injection salutaire, maisâŠ
Le recul du gouvernement constitue certes un pas dans la bonne direction. Mais, cette somme de 540 M$ est-elle suffisante?
La rĂ©ponse des syndicats est non, car cette injection de derniĂšre minute ne rĂ©parera pas les dĂ©gĂąts collatĂ©raux causĂ©s par les coupes draconiennes planifiĂ©es pendant des mois par les directions dâĂ©cole: du personnel licenciĂ©, des services annulĂ©s, des projets Ă©ducatifs mis en veilleuse. Peut-on remettre la machine en marche comme si de rien nâĂ©tait? Personne ne semble y croire.
ProblĂšme de gouvernance?
Cette crise rĂ©vĂšlerait-elle un problĂšme de gouvernance plus profond? Comment un gouvernement qui clame faire de lâĂ©ducation sa prioritĂ© peut-il en arriver Ă menacer les services aux Ă©lĂšves?

Plus inquiĂ©tant encore: comment, avec cette volte-face, arrivera-t-on Ă rĂ©soudre lâĂ©quation budgĂ©taire de fond? Si QuĂ©bec injecte 540 M$, dâoĂč viendra cet argent? Dans un contexte oĂč le QuĂ©bec nage en plein dĂ©ficit, cette rallonge budgĂ©taire ne risque-t-elle pas de crĂ©er des tensions ailleurs ou de pelleter le problĂšme dans la cour de quelquâun dâautre?
Pour les acteurs du milieu scolaire, cette façon dâaller de lâavant du gouvernement pour ensuite rĂ©tropĂ©daler est Ă©puisante. Ils ont besoin de prĂ©visibilitĂ©, de planification Ă long terme. En Ă©ducation comme ailleurs, gouverner, câest prĂ©voir. Or, Ă ce chapitre, le ministre de lâĂducation aurait-il une leçon Ă apprendre?