Vue lecture

Salut Victor le grand!

L’oeuvre de Victor-Lévy Beaulieu est trop vaste et protéiforme pour que je puisse en témoigner raisonnablement. Le commun des mortels a du mal à croire qu’un écrivain puisse être aussi prolifique et toucher à tant de formes dans une seule vie. 

J’ai rencontré l’homme la première fois, à un cocktail d’ouverture, lors d’un week-end d’ateliers de théâtre aux Trois-Pistoles. Il est venu vers moi et m’a dit franc et net: « Toi et moi, ça fait longtemps qu’on aurait dû se parler » Il m’a soustrait au groupe, alors qu’on était les principaux invités, m’a emmené à l’écart et on a longuement échanger, au désespoir des organisateurs.

D’autres rendez-vous ont eu lieu par la suite, parfois jusqu’à très tard dans la nuit. Parfois après une partie de quilles. Il aimait débattre et ne lâchait jamais le morceau. 

Ce même week-end, on se retrouve à une table avec un maquilleuse professionnelle et Victor lui fait remarquer qu’elle a un sourcil plus arqué que l’autre. Elle dit « Oui j’ai un oeil plutôt faible, ce qui explique la forme de mon sourcil. J’utilise mon autre oeil pour maquiller. » 

« Erreur, lui dit Victor, c’est avec l’oeil qui fonctionne mal que tu maquilles, on crée toujours avec nos failles. » 

J’ai compris ce jour-là, que la poliomyélite dont il avait été victime à son adolescence et l’avait laissé à moitié paralysé d’un côté du visage et d’un bras, avait joué un rôle fondateur dans son écriture. Il a creusé encore et encore les failles, le côté obscur des êtres. 

J’aimais cet homme, plein de contradictions, qui voulait tout avaler, mais respectait ceux qui se coltinait avec lui, s’il jugeait que leur parole et leurs actes étaient en concordance. À l’exception d’une courte oeuvre théâtrale que lui demandai pour Pièce de résistance en 4 services, je n’ai monté aucune de ses oeuvres, car il tenait lui-même théâtre aux Trois-Pistoles.

On n’était pas en compétition mais en émulation. Et sa Guerre des clochers de l’été 1997, était de la ben belle ouvrage.

Et puis en haut de la pile, l’Héritage! oeuvre télévisuelle inclassable, qui lui a permis de connecter avec son peuple, en lui révélant des choses inavouables et taboues, d’autres remplies de poésie et grandeur, dans une langue admirable de sa totale invention. 

Merci Victor le grand! Repose en paix, Seigneur des Trois-Pistoles. Nul besoin de funérailles nationales, quand on est au sommet de l’Everest!

Notre capitaine Achab 

Quel diable d’homme que ce Victor-Lévy Beaulieu! Il aura poursuivi, sa vie durant, cette baleine blanche qui n’est pas celle de Melville, même si l’auteur de La Nuitte de Malcomm Hudd a nourri la délirante démesure et l’entêtement singulier du maître à bord du baleinier Pequod, le capitaine Achab, personnage principal du célèbre roman de Melville, Moby-Dick, devenu avec le temps le plus important héros de la littérature américaine. 

Melville, certes transpercé par les flèches du péché originel et tétanisé par l’impossibilité de rédemption, ne cessait de revenir à la charge, tâtonnant dans l’obscurité jusqu’à tomber sur cette baleine éblouissante de blancheur. De son côté, Victor-Lévy Beaulieu, plus prosaïque, a tenté de donner au Québec un écrivain de stature universelle et, cela, même si pour se faire, comme la célèbre baleine, il a avalé, puis digéré, les plus grands esprits croisés sur son chemin. Melville chasse la baleine, et Victor-Lévy Beaulieu devient une ronde baleine en ratissant les fonds marins de sa bibliothèque. Il a terriblement besoin des morts pour exister. On comprend alors pourquoi cet homme a passé sa vie à ronchonner, maudissant parfois ses contemporains, jusqu’à se réfugier dans les bois pour les éviter avant de les convoquer pour une séance de clowneries. 

      Comme Melville, encore une fois, qui, quand il n’était pas en train de lécher ses blessures spirituelles ou les nombreux échecs de ses romans dits de voyage, ou de se frapper le front contre le mur de sa passion pour Hawthorne, connaissait d’affolants passages à vide. Il s’en prenait alors à ces écrivains anglais du moment, simplement “agréables”, et dont l’influence sur la jeune mais bondissante littérature américaine ne cessait de l’étonner. Il prédisait une montée si fulgurante de cette littérature qu’elle ferait pâlir la littérature moderne anglaise, celle qui s’ébrouait autour des années 1850. L’impression d’entendre Victor-Lévy Beaulieu à propos de la littérature québécoise par rapport à la française – sa confiance dans le destin de cette littérature québécoise n’étant jamais ébranlée – et cela même s’il a déjà exprimé certains doutes sur l’ambition de nos jeunes écrivains. Nul besoin de dire qu’il a eu tort sur cette appréciation car chaque génération, si ce terme si détestable est valable en littérature, cherche à explorer des contrées inédites. Et l’ambition n’est pas toujours liée au volume ou à la puissance. Le ruisseau Rimbaud tient tête à l’océan Hugo, ou, si vous voulez, le “vaisseau d’or” de Nelligan navigue sans couler dans le fleuve d’encre qu’est l’œuvre monumentale de Victor Lévy-Beaulieu. Une œuvre dont une grande partie est dédiée aux autres et est aussi faite par les autres. 

          Son originalité réside dans cette “faculté d’admirer” si chère à Malraux. Ne me reprochez pas tous ces noms car VLB a ouvert les fenêtres du Québec sur le monde en écrivant des livres entiers, et non de simples citations comme on fait dans les salons, sur Hugo, Kerouac, Melville, Atwood, Joyce, Nietzsche. Qui dit mieux? Et il les ramène au Québec, dans son œuvre, jusqu’à donner l’impression que Melville, Hugo ou Joyce sont en fait des écrivains québécois. Quelle jolie façon de dire que le Québec est, à ses yeux, le cœur du monde rêvé à défaut de l’être dans le monde réel. En effet, il s’est fâché plusieurs fois avec le Québec réel qui lui semblait douter de sa propre réalité. 

     L’homme qui aimait faire des déclarations intempestives était aussi un bûcheron solitaire qui s’enfonçait longtemps dans la forêt des voix où il avait appris le silence et le monologue sans fin. Vous avez compris que ce veilleur de nuit, tout en contrastes comme son vieil ami Melville, a vécu mille tourments dont le plus douloureux était l’impression d’être oublié de son vivant. Ses livres étaient de moins en moins commentés ou même feuilletés. Pas parce qu’ils étaient sans intérêt (il a aussi écrit des livres sur les plantes qui guérissent et était un écologiste forcené) mais parce que personne ne voulait se colleter à lui. Qui a lu son diabolique 666 Friedrich Nietzsche (1392 pages)? Melville avait jeté son dévolu sur Hawthorne qui lui rendit cette amitié un bref temps. Lui, Victor-Lévy Beaulieu était de plus en plus seul vers la fin: Tremblay est à Miami, et Blais, Hébert, Ducharme, Aquin, Ferron, Miron (la forêt dépeuplée) n’étaient plus là. Il faut dire qu’il n’a pas beaucoup fréquenté les vivants non plus. Victor-Lévy Beaulieu a admiré passionnément Melville qu’il n’a pourtant jamais rencontré. En fait, il s’agissait de la poursuite d’une baleine blanche, cet animal marin qu’on ne peut chasser que si on est prêt à le suivre parfois à plus de cinq mille mètres de profondeur, de ces profondeurs dont on ne remonte jamais. 

     Aujourd’hui pour retrouver l’écrivain de Trois-Pistoles, il faudra un long souffle et cette ambition démesurée qui ne sont accordés qu’aux fous, aux saints et aux génies. Je ne sais même pas si on a les moyens nécessaires pour évaluer cette œuvre, ou la générosité réquise pour comprendre l’abnégation de cet homme aux lèvres minces, aux mains délicates, aux cuisses solides qu’il aimait exhiber, sans oublier chapeau et pipe.  Je revois l’étonnement de Melville en lisant la lettre d’admiration de Hawthorne. Un homme avait tenté de le comprendre quand tous les autres cherchaient à le ridiculiser. 

        Victor-Lévy Beaulieu a besoin de lecteurs plus que des larmes. Il nous faut le lire ou le relire pour apprécier cet incroyable saut périlleux dans l’obscurité. Commencez cet été par son Melville (Monsieur Melville) et son Joyce (James Joyce, le Québec, l’Irlande, les mots, essai hilare) pour ceux qui n’ont pas peur des grands massifs. Mon premier livre en arrivant au Québec c’était Les Grands-pères, paru en 1971 et réédité en 2011 dans une certaine indifférence. Toute l’œuvre était déjà là. “Dans le livre de Victor-Lévy Beaulieu, il y la mort, l’auteur et le lecteur” écrivait Ferron. La mort ayant amené l’auteur avec elle pour une promenade qui n’est pas de santé, il reste le lecteur. Qu’est-ce qu’on attend alors? 

Dany Laferrière 

de l’Académie française

Chronique du gars en mots dits: CAQ : définancer les « séparatistes »…

La Coalition Avenir-Québec se décrit comme un parti « nationaliste ». Traduction : sans être indépendantiste, elle est censée financer l’identité québécoise et souffler juste assez sur les braises de la fierté sans que cela menace sa sacro-sainte appartenance au Canada. Un parti fil-de-fériste qui vient une fois de plus de perdre l’équilibre.

La grande famille fédéraliste s’est toujours grassement récompensée pour son adhésion inconditionnelle au Canada. Ainsi, dans le bras de fer historique entre Québec et Ottawa, les subventions pour les commémorations de l’identité « multinationale » canadienne, bien qu’elles fluctuent au gré des budgets, ne sont jamais gelées ou réduites à néant sur une longue période.

Au Québec, c’est pourtant ce qu’on sentira le 19 mai 2025, avec le (dé)financement de la Journée nationale des patriotes. Depuis 2002 la défunte fête de Dollard des Ormeaux (la fête de la Reine dans le « rest of Canada ») constitue l’occasion rêvée pour décerner le prix du patriote de l’année, organiser des banquets, des spectacles, des réjouissances. Une rare chance, surtout, de donner un peu de substance à la devise du Québec : Je me souviens

Imaginez ma surprise quand, début février, la Société nationale de l’Est du Québec (SNEQ) m’a annoncé que ma famélique subvention annuelle de 600 $ pour l’organisation du banquet des patriotes du Kamouraska venait d’être réduite à néant par le douteux nationalisme de la CAQ. J’égrenais ces miettes entre les chansonniers invités, le cachet du conférencier, le prix du patriote de l’année et les prix de participation du public.

Remontons un peu dans l’histoire. Dans la foulée des États généraux du Canada français tenus en 1968, un grand schisme a divisé, d’un côté, les sociétés Saint-Jean-Baptiste diocésaines qui s’occupaient de ce qui s’appelait depuis 1834 la « Saint-Jean-Baptiste », une fête teintée d’un catholicisme assumé et prosélyte et, de l’autre, les Sociétés nationales laïques, qui ont essaimé et pris le relai dans 18 régions. Un de leurs premiers gestes : rebaptiser et transformer la « Saint-Jean-Baptiste » en « fête nationale »… On misait ainsi sur une fierté plus nationale que religieuse. Pour réaliser des économies d’échelle et se doter d’un porte-voix plus fort pour négocier avec le gouvernement, elles ont vite senti le besoin de centraliser une partie de leurs opérations à Montréal. Ce besoin fit naître le Mouvement national des Québécois (MNQ), où s’affaire aujourd’hui une douzaine d’employés. Mais le Parti libéral du Québec s’est toujours méfié du MNQ, le voyant comme un « nique à séparatistes ». Il a tout fait pour le plumer – comme l’alouette de la chanson – en n’indexant jamais son budget et, plus récemment, en lui retirant le lucratif contrat d’organisation du spectacle de la fête nationale à Québec pour l’ajouter au mandat de Télé-Québec. La fête ainsi ramenée dans le giron étatique, le gouvernement peut la surveiller plus étroitement.

Le façadisme de la CAQ

Supposément nationaliste, la CAQ affiche ici une fierté bien électoraliste, un patriotisme de façade. On connaît la hargne de François Legault contre son ancien parti, qui menace désormais de le renverser aux prochaines élections. Il a cru en venir à bout en 2022, mais les députés survivant à la vague, les « trois mousquetaires », ont vaillamment résisté, et évité l’anéantissement du PQ.

La suspicion de dénicher quelques indépendantistes et péquistes au Mouvement national des Québécois pousse la CAQ à tout faire pour le démanteler. Mais comment procéder pour que cela passe presque inaperçu? Simple : en transigeant désormais directement avec les dix-huit sociétés nationales réparties sur le territoire, tout en se vantant d’avoir augmenté leur budget de 15 %. Sauf que par la même occasion, cette mesure se trouve à définancer le MNQ qui, affaibli, ne pourra plus assumer ses fonctions de coordination nationale envers ces sociétés affiliées, dont peu peuvent se payer le luxe d’une permanence annuelle. Pour le MNQ, c’est huit des douze employés qui seront mis à pied, et les quatre restants seront réduits à des tâches plus modestes, comme la gestion du site transactionnel de produits de pavoisement Accent bleu.

Résumons la situation en termes imagés : le gouvernement déshabille Jacques pour habiller Jean, mais avec d’autres vêtements non ajustés à sa taille ou à ses besoins. 

Six millions de dollars : c’est le budget total de la fête nationale, soit presque exactement le même que celui payé pour deux parties des Kings de Los Angeles à Québec. Belle occasion ratée de doubler le financement pour célébrer notre identité ! Espérons que les Québécois cesseront d’être dupes de cette poudre aux yeux nationaleuse qui les éblouit et les aveugle depuis le 1er octobre 2018.

Le français au Québec : un double enjeu

            Source inépuisable de débats, la question du français au Québec repose sur ce que l’écrivaine Lise Gauvin a appelé une « surconscience linguistique ». Cette « surconscience linguistique » est la conséquence directe du statut minoritaire du français en Amérique du Nord et de « l’insécurité linguistique » prenant entre autres forme à travers notre relation ambiguë avec la France depuis la fin du XIIIe siècle. Lorsqu’il est question du français au Québec, deux enjeux primordiaux ne cessent de s’entremêler dans le discours, alors qu’il faudrait les séparer : le déclin de l’utilisation courante du français et la qualité de ce dernier. Alors que le premier est une question a priori démographique, le second est une question linguistique.

            Il y a deux ans, le 15 mars 2023, le ministère de la Langue française diffusait pour la première fois sa publicité mettant en images un faucon pèlerin, « cet oiseau de proie vraiment sick », qui se concluait par le message suivant : « Au Québec, le français est en déclin. Renversons la tendance. » Alors que le ministre Roberge s’était réjoui du retentissement de cette publicité visant à conscientiser les Québécoises et les Québécois quant à leur utilisation d’anglicismes, plusieurs avaient plutôt souligné que le ministère faisait fausse route en instrumentalisant la qualité du français au profit du déclin de l’usage de ce dernier. D’autres avaient critiqué le fait que la publicité pointait du doigt les jeunes par son utilisation de mots tels que chill, insane, sketch, watcher, alors qu’il est tout à fait normal qu’une sous-communauté linguistique (et par le fait même identitaire) se crée chez les jeunes, sous-communauté qui n’est d’ailleurs par seulement imprégnée d’emprunts à l’anglais, mais également à l’arabe et au créole haïtien. Cette publicité trahit simplement notre obsession des anglicismes, justifiée par la position géographique du Québec et notre peur historique de l’assimilation.

            Alors qu’en 2022 l’Office québécois de la langue française (OQLF) notait que l’utilisation du français était stable dans l’espace public depuis les 15 dernières années, ce qui est pour plusieurs linguistes le premier indicatif de la « santé » d’une langue, on pourrait certes lister une panoplie d’autres statistiques, dont certaines montrent le déclin de l’utilisation du français, tandis que d’autres démontrent son état de stabilité ou même d’ascension. Quel est alors le rôle du gouvernement en matière de linguistique, outre mettre temps, énergie et argent dans une publicité de mauvais goût? Est-ce l’adoption de la loi 14 (PL96), extension de la loi 101, qui restreint le taux de francophones qui peuvent fréquenter les cégeps anglophones? Est-ce vraiment par le biais d’une dynamique restrictive que les jeunes seront enclins à chérir la langue française? Hugo Saint-Amant Lamy, professeur de linguistique au Département des lettres et humanités de l’Université du Québec à Rimouski, rappelle que « la défense du français ne peut tout simplement pas être légitimement imposée par le haut s’il n’y a pas de volonté populaire derrière ». Cette volonté concernant le devoir commun vis-à-vis du français n’est-elle pas brimée chez les jeunes par l’attitude négativiste de notre gouvernement à l’égard de leur langue?

Il est alors impératif de se poser la question suivante : arriverons-nous un jour à surpasser cet état « d’insécurité linguistique » et à non plus avoir recours à la réglementation comme première arme de défense du français, mais bien à le mettre en valeur comme bien commun par le biais de la culture, qui, comme nous le savons, est en crise au Québec? À Rimouski, dans les dernières semaines, le Musée régional et le Carrousel international du film ont fermé définitivement leurs portes. Que le budget du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) soit de 0,15 % du budget de l’État représente une position politique nette : la culture n’est pas prioritaire pour la CAQ. Politique et situation du français sont indissociables et Hugo Saint-Amant Lamy souligne sur ce point « qu’améliorer les conditions socioéconomiques d’un groupe permet d’augmenter le statut de la langue qu’il parle ». Considérant la précarité économique à laquelle le Québec a déjà commencé à faire face, n’est-il pas primordial de financer notre culture (et ainsi notre langue et notre identité) et de rendre accessibles nos archives culturelles afin que l’on puisse renverser la tendance?

La joie comme acte de résistance dans un monde qui brûle

 Le capitalisme, le colonialisme et l’hétéropatriarcat nous rendent malades. Est-ce que nos réponses nous soignent? Est-ce que nos actions génèrent du bien-être pour d’autres? Ou bien reproduisons-nous involontairement le type de relations qui nous ont rendu·e·s malades en premier lieu?

-Zainab Amadahy

Dans un monde où le masculinisme, le racisme, la transphobie, le conservatisme et le techno-fascisme semblent prendre de l’ampleur, les forces de droite cherchent à créer des divisions, à tuer le vivant et à désigner des boucs émissaires. Dans ce contexte, il devient urgent de (re)penser les pratiques militantes en y intégrant des valeurs de solidarité, de soin et de justice sociale.

Mais comment y parvenir? Quelles stratégies et nouvelles solidarités mettre en place? Comment garder ce feu militant sans le consumer dans un monde en tremblement constant où tout semble s’accélérer? Comment se libérer de l’emprise d’une société néolibérale qui nous pousse parfois vers des pratiques militantes rigides et axées sur la performance, contribuant ainsi au burnout militant? Et si on mettait la joie au cœur des luttes?

La joie comme processus relationnel et émancipateur 

Dans cette perspective spinoziste, la joie n’est pas une simple émotion, mais un processus qui accroît « notre capacité à affecter et à être affecté·e·s1 ». Elle est avant tout relationnelle : elle renforce les liens et nourrit notre capacité à agir ensemble. La joie militante valorise l’affect joyeux dans l’action collective, privilégiant les passions et les désirs plutôt que la compétition et la rigidité2. Elle encourage la créativité, l’écoute, la curiosité et nous invite à naviguer dans l’incertitude, à cultiver le soin comme acte politique, à déconstruire les habitudes rigides, à laisser émerger des pratiques inclusives et émancipatrices3.

La joie ne cherche pas à fuir la douleur, comme le promeut la société néolibérale avec son injonction au bonheur. Au contraire, elle peut naître de la rage, du désespoir ou de la détresse, et ces états sont des moteurs puissants de transformation4. Dans cette optique, elle n’est pas non plus une forme d’optimisme déconnectée des réalités, mais une force qui s’enracine dans les résistances et les désirs.

Mes joies féministes

Au cours de mon parcours dans des groupes féministes ces dernières années, j’ai traversé des blessures, des pertes de sens et des moments de fatigue, mais aussi des transformations joyeuses. On me demande parfois comment je parviens à demeurer dans le milieu et à nourrir mon engagement. Je crois que beaucoup revient à la question des affects.

Ces moments se sont manifestés de multiples façons : à travers des lectures, des chansons, par l’écriture collective de textes, par des frissons et des cris lors de mobilisations, ou encore dans la création de slogans pour des pancartes. La joie militante s’est incarnée à travers le soutien, les soins réciproques, la douceur, la confiance mutuelle, mais aussi à travers la colère collective et l’ardeur qui nous insufflent la force de se rallier. 

Des rires, des amitiés, de nouvelles solidarités, des horizons rêvés à plusieurs et des actes de désobéissance civile sont autant d’exemples de joies partagées. Chaque brèche, même petite, est une célébration de notre capacité à tisser des liens et à résister. Ensemble.

La joie a également émergé lors d’événements rassembleurs : manifestations, ateliers-discussions, soirées de cinéma féministe, vernissages d’exposition ou encore dans des espaces de dialogue authentique, courageux et réflexif avec mes collègues, où le temps semble soudain s’élargir. C’est dans ces instants collectifs que se révèle une force libératrice.

La joie militante comme voie de transformation sociale?

Il n’est pas possible de définir la joie militante avec des ingrédients magiques pour chaque situation, et c’est ce qui en fait sa force. Loin d’être docile, elle échappe aux tentatives d’instrumentalisation et surgit dans les interstices, là où les possibilités de transformation prennent racine. Ces moments d’être ensemble, dans la puissance collective d’agir, et de se laisser façonner, voire bouleverser par les luttes et les liens que nous créons, sont autant de preuves que la joie militante est une pratique qui se situe et qui est en constante évolution.

Et si la joie, à elle seule, était une forme de résistance face aux oppressions? Une façon de demeurer solidaire et en lien dans ce monde qui souhaite nous diviser?  Si elle devenait une flamme qui nous rend plus vivants, qui nous soigne et qui alimente nos luttes face à la montée des droites?

1. Carla Bergman et Nick Montgomery, Joie militante : construire des luttes en prise avec leurs mondes, Éditions du commun, 2021, p. 34.

2. Gaëlle Jeanmart, Cédric Leterme et Thierry Müller, Petit manuel de discussions politiques : réflexions et pratiques d’animation à l’usage des collectifs. Éditions du commun, 2018, p. 108.

3. Carla Bergman et Nick Montgomery, op. cit.

4. Ibid., p. 66.

On aime oublier…

Pour apaiser notre conscience et dormir du sommeil du juste, il nous faut oublier :

–      Oublier qu’en 1971 le Général De Gaulle demande au président Nixon de convertir ses amas de dollars américains que la France avait dans ses coffres, en lingot d’or. Puisque les États-Unis, dans leur grandeur d’âme, avaient proposé après la Seconde Guerre mondiale que le dollar U.S ait une parité fixe avec l’once d’or (35$ U.S = 1 once d’or). Assurant la pleine convertibilité du dollar américain contre de l’or et des parités fixes entre les monnaies et le dollar américain. On pouvait, croyait-on, reprendre le commerce international en toute sécurité. Les nations européennes, ruinées par l’effort de guerre et l’effort de reconstruction n’avaient plus à assurer la convertibilité de leur monnaie. Et voilà que De Gaulle dévoile l’arnaque américaine en demandant à Nixon d’échanger sa montagne de dollars U.S en or. Les Américains avaient dupé les uns et les autres en faisant tourner allégrement la planche à billets et ont provoqué ce qu’il fut convenu d’appeler : la crise du système monétaire internationale qui nous a menés à des parités flottantes entre les monnaies et la naissance d’un marché spéculatif entre les monnaies où des sommes himalayennes de transactions se font tous les jours à l’encontre des actions corporatives.

–      On aime oublier que dix ans plus tard, 1981, c’est au tour de Reagan d’engendrer une récession mondiale. Usant de ses talents de comédien, il nous informe sur les grandes chaînes, tableaux à l’appui, que s’il y avait conflit nucléaire entre les États-Unis et la Russie d’alors, eh bien ce sont les Russes qui gagneraient. Il omet, cependant, de dire qu’il n’y aurait plus âme qui vive pour déclarer un gagnant. Il propose donc que les États-Unis se protègent en investissant dans un bouclier spatial baptisé : Star War. Pour financer ces dépenses militaires colossales, ses conseillers lui suggèrent d’augmenter les taux d’intérêt en prétextant combattre l’inflation. Il réussit ainsi à pomper les capitaux étrangers dans les banques américaines pour pouvoir emprunter cet argent et créer un déficit budgétaire innommable. Avons-nous oublié que les taux d’intérêt ont virevolté au-delà des 20% ? Cette politique a engendré une récession mondiale et un endettement sous lequel nous croulons depuis. Il faut se rappeler que depuis la crise de 1929, la proposition de Keynes de la gestion cyclique du budget avait permis aux uns et aux autres d’équilibrer cycliquement leur budget. Grâce à nos voisins, nous connaissons des déficits perpétuels engendrant un endettement innommable. Pour certaines nations le service de la dette dépasse la capacité de payer…

–      Et voilà que nos voisins du sud usent, non pas du bâton du pèlerin, mais de la bastonnade pour augmenter les tarifs douaniers prétextant protéger leur économie qui est malmenée et souffre d’un déficit commercial. Outrepassant tous les accords commerciaux (ACEUM) qu’ils avaient eux-mêmes signés. Tout ce qu’ils réussiront à faire c’est de générer, encore une fois, un ralentissement économique mondial. Fait à remarquer, dans les trois cas de figure, nous avons fait face à des gouvernements républicains.

L’histoire n’est jamais un long fleuve tranquille

Peu à peu, il devint impossible d’échanger avec quiconque une parole raisonnable. […] Il ne restait dès lors qu’une chose à faire : se replier sur soi-même et se taire aussi longtemps que durerait la fièvre.

                                         — Le monde d’hier, Stefan Sweig, 1942  

À la lecture de l’essai Le monde d’hier, je me suis dit que vivre longtemps nous amenait nécessairement à connaître plusieurs soubresauts de l’histoire. La Révolution tranquille de mon enfance a transformé des Canadiens français colonisés en un peuple québécois capable d’investir le monde des affaires et d’inscrire sa culture dans le grand concert des nations. J’ai cru naïvement qu’on irait ensuite de progrès en progrès. Oh désillusion! Avec la chute du mur en 1989, fin de la guerre froide et de la menace nucléaire, la mondialisation mènerait à la création d’un village global et la paix s’installerait à demeure. Utopie!

On est nombreux à penser que le monde arrive à un point de bascule. S’agira-t-il d’un mouvement vers une dé-civilisation ou une re-civilisation? Notre vision de l’histoire toutefois ne peut qu’être myope. Certes, les velléités impérialistes de certains leaders, leurs hubris débridées et la montée des extrêmes en Europe sont inquiétantes. Sans compter le dérèglement du climat. Dès lors, qu’arrivera-t-il dans le temps long? Nul ne sait en réalité.  

Avoir peur de Trump est dangereux, soyons lucides plutôt

Trump aime qu’on le craigne. La peur est en effet un outil de manipulation puissant. Sa brutalité est une tactique de provocation pour forcer le reste de la planète à se plier à ses désirs. Trump entend réduire le déficit de la balance commerciale, lequel est lié à la valeur du dollar, mais Trump tient mordicus à ce que le dollar US demeure la devise de référence. Quadrature du cercle? Avec le Canada, Trump sort un canon pour tuer une mouche : le déficit correspond à moins de 5 % du déficit commercial américain total, et ce pays est une source quasi négligeable du trafic de fentanyl ou de l’immigration illégale. Chez lui, son agressivité s’exprime par une avalanche de décrets parce que when the shit hits the fan, la justice est submergée, la dérégulation à tout crin passe ainsi sous les radars, espère-t-il.

Trump n’est fort que devant ceux qu’il juge faibles; face à Poutine, il perd de sa superbe, on verra s’il s’écrase face au czar. Il ne faut pas oublier que Donald n’est pas un homme d’État, mais une bête de scène étalant son ego, un enfant caractériel de 78 ans, un bouffon avec un appétit d’ogre. Devenu l’homme le plus puissant du monde, il veut tout : les richesses naturelles du Canada, du Groenland, les terres rares de l’Ukraine; il veut Gaza, le Panama, les pailles en plastique, le prix Nobel de la paix. Comme s’il suffisait de dire : JE VEUX. Et s’il n’était qu’un agité du bocal qui finira par s’épuiser avant la fin de son mandat? À preuve, le deuxième discours de son inauguration : une longue suite de coq-à-l’âne qui s’est conclue par Melania a mal aux pieds à cause de ses souliers! C’est à se demander quel aurait été son résultat au test de dopage auquel sont soumis les athlètes. Les stimulants, ça peut être dangereux à son âge. Depuis son élection, il a fait preuve d’une grande agitation, marquée par des nominations surprenantes. Comment ne pas penser à l’empereur Caligula qui, dit-on, aurait un jour songé à nommer comme consul son cheval.  

Les électeurs MAGA peuvent pardonner à Trump sa grossièreté, ses mensonges, même ses conflits d’intérêts, mais de toucher à leur porte-monnaie, j’en doute. S’il poursuit sa guerre commerciale tous azimuts, il y aura ressac sur l’économie américaine. Les élections de mi-mandat pourraient prendre de court ceux qui chuchotent à son oreille.

La vie continue

À titre privé, les conseils de Sweig sont pertinents. Se taire consiste à ne pas ajouter sa voix à l’enflure des discours du pire. Fermons les écoutilles et laissons passer la tempête, l’apocalypse n’est pas pour demain. Se replier ne veut pas dire s’isoler. Un bon antidote à l’anxiété est de multiplier les contacts de personne à personne : rigoler entre amis, aller voir des spectacles, aller au théâtre, au concert, au parc. Refuser d’acheter américain est aussi une manière de ne pas se sentir impuissant.

Oui, notre monde basculera un jour vers on ne sait quoi. La seule certitude est qu’il changera tôt ou tard. Qu’à cela ne tienne, la peur étant mauvaise conseillère, le courage reste la meilleure manière d’être humain. Après tout, le monde romain a survécu à Caligula durant des siècles.

Trumpenstein et le totalitarisme : quand le loup et la pulsion de mort sont les gardiens de la bergerie

Le gouvernement trumpiste n’est que la poursuite de l’assaut du Capitole en 2021 : une attaque contre la démocratie. Mais cette fois-ci, sont au pouvoir ceux qui préparaient la victoire de Trump afin de permettre aux détenteurs du capitalisme financiarisé de régner au-dessus des lois de manière totalitaire1.

Gilles Dostaler et Bernard Maris2, en se référant à Freud qui voyait le capitalisme comme « la pulsion de mort » et à Keynes pour qui « l’amour irrationnel de l’argent constitue le moteur du capitalisme », avancent qu’« à nouveau le capitalisme, par sa course effrénée au profit, son désir toujours plus intense d’accumulation, a libéré ce qui est enfoui au plus profond de lui-même et le meut de toute son énergie : la pulsion de mort ». Autrement dit, le capitalisme nous déshumanise et nous conduit à prendre plaisir à détruire et à nous autodétruire.

Le pouvoir de l’argent, que les Grecs appelaient la chrématistique, tend à échapper à la vie communautaire et fait de l’humain une abstraction, un pur objet sans corps et sans esprit. Cette réalité, qui réduit l’économie au pouvoir de l’argent, perdure durant toute la modernité qui est parfois contrôlée et limitée par les institutions politiques ou laissée à elle-même, entraînant des injustices, des inégalités et des guerres. Une relecture des ouvrages sur le capitalisme et le totalitarisme nous fait prendre conscience de manière plus aiguë que la barbarie est aux frontières de l’humanité.

L’État voyou est déjà en marche avec la multiplication des décrets imposés par Trump que l’on retrouve dans le « Project 20253 » qui vise à liquider toute opposition et à barricader la démocratie. Trump et son entourage ressemblent à des personnages de La fable des abeilles ou les vices privés font le bien public4. Dans cette fable, qui serait à l’origine du libéralisme économique5, les vices (luxure, appât du gain, malhonnêteté, mensonge, etc.) sont paradoxalement vertueux, comme le vice de l’intérêt particulier qui va inévitablement, dit-on, engendrer la prospérité. Selon cette logique, l’altruisme, la morale, l’hospitalité sont des défauts qui freinent l’accumulation sans limites de richesses économiques.

Pour tenter de comprendre ces transformations dans notre rapport au monde et les dérives de l’autoritarisme et du totalitarisme, je retiens trois moments de l’histoire récente : la crise sanitaire de la COVID, le néolibéralisme et la perte de légitimité des institutions politiques au profit de la puissance des grandes organisations financières contemporaines dans un contexte de globalisation.

Pandémie et néolibéralisme

Durant la pandémie, l’ensemble des individus et même des scientifiques reconnus qui ont osé poser un regard différent sur la crise ont reçu peu d’attention et ont parfois été discrédités. La légitimité de la connaissance s’est limitée aux experts, à l’emprise de l’industrie pharmaceutique sur nos vies et aux autorités étatiques. Dans ce contexte, la pandémie « n’est plus un objet de discussion dans nos démocraties, mais […] la démocratie est elle-même, en Pandémie, devenue objet discutable6. » Elle devient embarrassante avec ses brebis qui osent tirer les ficelles d’un tissage un peu trop serré d’une rationalité sans débats qui repose entre les mains du pouvoir. Ainsi, la gestion de la pandémie laisse entrevoir les signes d’un possible glissement vers l’autoritarisme.

Cette période n’est pas sans lien avec le néolibéralisme, une idéologie où l’économie cherche à se libérer de toute entrave, y compris la démocratie. Le néolibéralisme est, selon Pierre Dardot et Christian Laval, « la nouvelle raison du monde », c’est-à-dire une rationalité qui vise à structurer l’ensemble des conduites humaines en faisant du marché le principe de gouvernement des hommes : « Le néolibéralisme, avant d’être une idéologie ou une politique économique, est d’abord et fondamentalement une rationalité, et à ce titre il tend à structurer et organiser, non seulement l’action des gouvernants, mais jusqu’à la conduite des gouvernés eux-mêmes7. » Il s’agit alors de transformer l’État, les manières de vivre, les règles, les normes pour que chacun adhère à une rationalité qui soumet les individus à une adaptation mécanique et inéluctable au changement. C’est dire qu’on cherche à libérer les individus de tout affect, de toute intériorité, de toute sensibilité à l’égard d’autrui.

Mondialisation et globalisation

C’est aussi dans ce sens que Michel Freitag8 aborde le capitalisme et distingue mondialisation et globalisation. La mondialisation est ce qui « va dans le sens de l’ouverture des sociétés les unes sur les autres dans la perspective de l’harmonisation de leurs rapports au niveau mondial à travers la création d’institutions normatives et expressives (c’est-à-dire de formes de reconnaissance identitaires et représentatives) communes; [elle] désigne donc l’exigence de la création d’un ordre commun. […] Le projet de mondialisation reste un projet politique de caractère humaniste. » Cette conception de la mondialisation est celle qui alimentait le mouvement altermondialiste par la création de forums sociaux mondiaux et, plus près de chez nous, le Forum social bas-laurentien en 2011 dans le village d’Esprit-Saint.

La globalisation va plutôt « dans le sens de la dissolution [ …] des sociétés et des identités collectives existantes […] l’abandon de toutes les autonomies sociétales au profit d’une soumission exclusive de toutes les réalités à la puissance des mécanismes de régulation systémique. […] Le procès de globalisation est seul proprement totalitaire ». Dans ce mouvement de globalisation, les grandes corporations transnationales dominent avec un mode de régulation qui ne repose plus sur le politique et les institutions, mais sur un système que Freitag qualifie d’opérationnel-décisionnel puisque l’humain tend à ne devenir qu’un opérateur de décisions auxquelles il doit s’adapter et sur lesquelles il a peu de pouvoir. « Le programme de la globalisation, c’est l’abolition de cette capacité démocratique ou en tout cas politique d’agir sur le développement économique pour l’intégrer dans un ordre social visant la réalisation de fins humaines, sociales et politiques. » Et « l’idéologie néolibérale qui est mise au service de la globalisation n’est que propagande, et les bénéficiaires de cette propagande sont les puissances corporatives supranationales, et les pouvoirs publics s’y sont assujettis, notamment à leur chantage9. »

Telle est la forme du totalitarisme de l’impérialité capitaliste américaine qui se répand dans d’autres pays avec la figure de Trump, mutée en « Trumpenstein, un monstre à la Frankenstein, cette créature que l’overclass avec les organisations et ses guerres a créée et qui maintenant lui fait peur10 ».

On a souvent reproché à Freitag de développer une pensée pessimiste sur les transformations de la société alors qu’il pointait uniquement la forme qu’elle pouvait prendre, celle qui se manifeste de manière plus intense actuellement par la logique systémique dont la finalité repose uniquement sur les moyens et les rapports de force. Il attirait aussi notre attention sur les formes de résistance qui participent à la reconstruction et à la réinvention du monde. Ces résistances ne sont pas à venir, elles existent déjà dans la société québécoise à travers le mouvement des alternatives sociales, économiques et politiques11.

1. Voir Amérique 2025 : Les Architectes du Chaos – Le plan de Trump & Musk pour s’emparer de l’État, https://www.youtube.com/watch?v=OZasDbtvMDc&t=742s Lire Giuliano Da Empoli, Les ingénieurs du chaos, Folio actuel, 2023.

2. Gilles Dostaler et Bernard Maris, Capitalisme et pulsion de mort, Albin Michel, 2009.

3. Stéphanie Yates, « Projet 2025, ou le pouvoir d’un “think tank” à l’œuvre », Le Devoir, 11 février 2025,

https://www.ledevoir.com/opinion/idees/840763/idees-projet-2025-ou-pouvoir-think-tank-oeuvre

4. Bernard de Mandeville, La fable de abeilles, 1723.

5. Dany-Robert Dufour, Baise ton prochain : une histoire souterraine du capitalisme, Acte Sud, 2019.

6. Barbara Stiegler, De la démocratie en pandémie, Tracts Gallimard, no 23, janvier 2021. Lire également Roland Gori, Et si l’effondrement avait déjà eu lieu : l’étrange défaite de nos croyances, Les liens qui libèrent, 2022.

7. Pierre Dardot et Christian Laval, La nouvelle raison du monde, La Découverte, 2010.

8. Michel Freitag, (propos recueillis par Patrick Ernst), L’impasse de la globalisation. Une histoire sociologique et philosophique du capitalisme. Écosociété, 2008.

9. Ibid.

10. Jacques-Alexandre Mascotto, « Le Réel, nom de Dieu! Aphorismes sur l’âge du néolibéralisme intégral, de gauche comme de droite », Cahiers Société, no 3, 2021.

11. Jean-Marc Fontan, Juan-Luis Klein et Vincent van Schendel, « La transition juste face à la décadence du trumpisme », Le Devoir, 18 janvier 2025, https://www.ledevoir.com/auteur/juan-luis-klein

Le veganisme

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le véganisme, bien plus qu’un simple régime alimentaire, s’affirme comme un mode de vie guidé par des principes éthiques profonds, centrés sur le respect absolu de la vie animale. Cette philosophie, souvent confondue avec le végétalisme, va au-delà de l’alimentation pour englober un rejet total de l’exploitation animale sous toutes ses formes.

Les Fondements du Véganisme

Selon Vincent Giroux (2018), le véganisme se définit comme un mode de vie visant à minimiser, voire à éliminer, toute consommation de produits et services qui exploitent les animaux. Cette approche éthique repose sur le principe de la sentience, c’est-à-dire la capacité des animaux à ressentir, percevoir et avoir des expériences subjectives du monde (Gibert, 2015).

L’éthique végane affirme que les animaux, qu’ils soient mammifères, oiseaux, poissons ou même certains insectes, méritent d’être traités comme des sujets moraux à part entière. Ils sont capables de souffrir et d’éprouver des émotions, ce qui les place sur un pied d’égalité morale avec les êtres humains (Giroux & Larue, 2019).

Impact Environnemental et Éthique

Outre les préoccupations éthiques, le véganisme est également motivé par des considérations environnementales majeures. La production de viande, responsable d’environ 14.5% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, est un contributeur majeur au changement climatique, à la déforestation et à la pollution des sols et des eaux (Giroux, 2018).

Adopter un mode de vie végane, par conséquent, ne se limite pas à une décision personnelle pour la santé ou pour des convictions éthiques individuelles, mais s’inscrit dans une démarche collective pour préserver l’environnement et promouvoir un avenir durable pour toutes les espèces.

Conclusion

En somme, le véganisme ne se résume pas à une simple tendance alimentaire, mais incarne un engagement profond envers le respect des animaux, l’environnement et les droits fondamentaux. À l’heure où les défis écologiques et éthiques se font de plus en plus pressants, adopter des pratiques comme le véganisme représente un pas vers un avenir plus équitable et durable pour tous.

Cet article reflète l’importance croissante du véganisme comme mode de vie éthique et environnementalement responsable, tout en soulignant les implications profondes de cette philosophie sur nos choix quotidiens et collectifs.

Bentham, J. ([1798] 2011). Introduction aux principes de morale et de législation. Paris: Vrin.

Gibert, M. (2015). Voir son streak comme un animal mort. Paris: Lux Hors collection.

Giroux, V. (2017). Contre l’exploitation animale. Lausanne Suisse: Éditions l’Âge d’Homme.

Giroux, V. (2018). Véganisme. Récupéré sur l’Encyclopédie philosophique: https://encyclo-philo.fr/veganisme-a

Giroux, V., & Larue, R. (2019). « Chapitre II. La philosophie des véganes ». Dans Le véganisme. Paris: Puf.

Photographies Devant le Paysage

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Devant le Bureau d’information touristique de Rimouski, il est impossible de manquer les photographies exposant les magnifiques couchers de soleil de la région. Cependant, n’est-il pas curieux de voir ces images juste devant le même spectacle qui se reproduit chaque soir et matin ? Il y a bien sûr une intention de montrer ce qu’il est possible de voir à Rimouski, mais au-delà de cet aspect démonstratif, la présence de ces œuvres d’art n’est-elle pas plus significative qu’il n’y paraît ? Il se pourrait qu’elles revêtent une dimension politique, sociale, esthétique et écologique plus profonde qu’on ne le pense au premier abord.

Le paysage : représentation et réalité

Le terme « paysage » renvoie à deux notions : la représentation visuelle d’une portion d’espace et l’environnement réel qui nous entoure. En raison de cette dualité, nous avons tendance à laisser la représentation influencée notre perception du paysage réel. Par exemple, les photographies nous montrent ce qu’il faut regarder et ce qui est beau dans la réalité (Balibar, 2018, p. 12). Ainsi, une photographie devant le fleuve indique ce qu’il faut percevoir et où se trouve la beauté dans le paysage réel.

Même dans les théories de l’art ou les milieux scientifiques, la représentation est souvent ce qui nous permet d’apprécier un paysage réel. Le brouillard londonien, par exemple, a été reconnu et considéré comme beau grâce aux impressionnistes (Balibar, 2018, p. 13). Sans ces œuvres artistiques, aurions-nous pu faire l’expérience de ces brouillards ?

Pour résoudre ce dilemme, il faut distinguer clairement ces deux types de paysages au lieu de les lier. Le paysage en tant que représentation est une image, tandis que le paysage réel est l’environnement qui nous entoure, chacun offrant des expériences distinctes. La représentation visuelle sollicite un panel d’émotions spécifiques, alors que le contact direct avec le paysage réel mobilise un registre sensoriel et émotionnel différent.

La Photographie comme médium

L’utilisation de la photographie pour représenter le fleuve n’est pas anodine. Elle nécessite une immersion préalable du photographe dans le milieu, sortant ainsi l’art des musées pour le situer dans le monde humain (Hayat, 2018, p. 70). Les photographies devant le fleuve sont une invitation à se sensibiliser et à entrer en contact avec l’environnement qui les entoure (Larrère, 2018, p. 102). Cette sensibilisation n’exige pas de connaissances préalables, tout le monde est invité à faire cette expérience.

Les photographies agissent comme des panneaux directionnels tout en étant des représentations artistiques. Le contexte dans lequel elles se trouvent et les personnes à qui elles s’adressent font apparaître ces deux dimensions. Le contact direct qu’elles encouragent comporte également une dimension écologique, en renforçant le sentiment d’appartenance à notre environnement et en nous offrant la beauté que nous savons apprécier.

Inviter à apprécier

Les photographies exposées devant le Bureau d’information touristique de Rimouski ne sont pas de simples illustrations de couchers de soleil. Elles sont des invitations à apprécier la beauté naturelle de la région, à s’immerger dans l’environnement et à ressentir une connexion profonde avec la nature. Elles rappellent que la représentation artistique et l’expérience réelle peuvent coexister, enrichissant notre perception et notre engagement envers le monde qui nous entoure.

Balibar, Justine. « Du paysage représenté au paysage réel », Nouvelle revue d’esthétique, vol. 22, no. 2, 2018, pp. 9-23.

D’Angelo, Paolo. « Écologie et paysage », Nouvelle revue d’esthétique, vol. 22, no. 2, 2018, pp. 25-35.

Frangne, Pierre-Henry. « Au principe de l’esthétique environnementale. Du paysage de montagne à l’esthétique de la montagne », Nouvelle revue d’esthétique, vol. 22, no. 2, 2018, pp. 37-53.

Hayat, Michaël. « Esthétique, milieux de vie, action. De l’esthétique naturalisée à l’esthétique environnementale en passant par le land art », Nouvelle revue d’esthétique, vol. 22, no. 2, 2018, pp. 65-74.

Larrère, Catherine. « Y a-t-il une esthétique de la protection de la nature ? », Nouvelle revue d’esthétique, vol. 22, no. 2, 2018, pp. 97-106.

Dsputio : le nouveau média social québécois qui réinvente le débat en ligne

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le paysage des médias sociaux accueille un nouveau venu québécois, Dsputio, une création du montréalais Adam Szanyi. Ce réseau social novateur se distingue nettement des plateformes traditionnelles par son engagement à mettre au centre des échanges le débat et la réflexion. Grâce à son approche innovante, Dsputio se veut être une alternative pour ceux et celles qui recherchent des discussions plus approfondies et moins superficielles.

Un Retour aux sources du débat

Le nom Dsputio est une référence directe à la « disputatio », une pratique médiévale du débat contradictoire, conçue pour élever la pensée à travers l’échange d’idées. Contrairement aux autres réseaux sociaux qui tendent à favoriser la course à l’attention et à l’accumulation des followers, Dsputio mise sur la qualité du contenu et la profondeur des discussions.

Dsputio cible spécifiquement un public qui accorde plus d’importance au texte qu’aux formats courts tels que les reels ou les shorts. La plateforme supprime les aspects superficiels des réseaux sociaux traditionnels, comme la quête de popularité mesurée en nombre d’amis ou de followers, pour mettre en avant des interactions humaines significatives.

Les innovations de Dsputio

Localité et visibilité

L’une des grandes forces de Dsputio réside dans sa localité : il n’est accessible qu’au Québec. Cette limitation géographique assure à chaque publication une visibilité qui n’est pas conditionnée par le nombre d’abonnés, et évite que les contenus soient noyés dans une masse d’activités.

Diversification des contenus

Le réseau se distingue aussi par sa logique de diversification. Contrairement à d’autres plateformes où les algorithmes dictent les recommandations, Dsputio propose un fil d’actualité indépendant de vos abonnements. Cette approche permet d’éviter les chambres d’échos et les silos idéologiques, encourageant ainsi une diversité d’opinions et de perspectives.

Interaction et participation

Les utilisateurs disposent de trois moyens pour réagir aux publications : le bouton « Dac! » pour exprimer leur accord, le bouton « J’évalue » pour attribuer une note de 1 à 3, et le bouton commentaire pour prolonger la discussion. Une autre particularité de Dsputio réside dans la longueur des textes publiés, avec un minimum de mots requis pour favoriser des échanges plus substantiels. Une distinction claire est établie entre les discussions prolongées et les commentaires plus courts.

Un pari sur l’avenir

Dsputio mise sur l’existence d’un public déçu par les réseaux sociaux traditionnels, qui pourrait trouver dans cette nouvelle plateforme le média qu’il attendait. Les semaines à venir seront cruciales pour l’avenir de Dsputio, et seule une participation active et sincère pourra pérenniser ce projet ambitieux.

Le cynisme ma bouée


GND est parti. Le meltdown est brutal pour Québec Solidaire, l’introspection nécessaire, le désenchantement légitime. Les personnes qui, comme moi, ont moins de 40 ans dans ce pays ont connu plus de meltdowns de partis que de gains majeurs pour le peuple.

En sciences politiques, un meltdown, ou implosion, est une crise majeure pour un parti provoquée par un échec.

En politique récente, on nage dans un marasme perpétuel qui n’a pour cycle apparent que le changement de couleur du gouvernement. En nage dans l’œil du vortex, on s’accroche à quoi politiquement?

L’implosion ma constante

Le Parti Libéral du Canada terminait 10 ans de crise avec le premier mandat de Sunny Ways Trudeau. Le Parti Conservateur du Canada après Harper est une coquille vide piquée au populisme. Le Nouveau parti démocratique après Layton est un champ de ruines. B pour Bloc ou pour; “Brisez la vitre en cas d’apathie »?

Avant de former la Coalition Avenir Québec (CAQ), l’Action démocratique (ADQ) avait traversé plusieurs implosions. La pire étant la déconfiture aux élections de 2008 menant au départ pour les médias du chef Mario Dumont.

Le manifeste fondateur de la CAQ constatait le « déclin tranquille » du Québec et proposait comme solution de « délaisser les façons de faire du passé ». Quoi de mieux pour se tourner vers l’avenir que de consulter Duplessis dans sa crypte?

La CAQ vivote après le départ de Fitz, les démissions forcées et les décisions impopulaires ou carrément absurdes (le 3e lien, nommons-le). Un immense meltdown à prévoir. L’implosion devient une constante, l’espoir une variable.

L’espoir ma variable, mais

Le Parti Libéral du Québec (PLQ) a traversé la pire crise de son histoire après les scandales de l’ère Pont-d’Or et les changements de chefs et d’image. Si le PLQ ne forme pas le prochain gouvernement, ce sera plus grande période sans être au pouvoir de la formation depuis le milieu du 20e siècle.

Le Parti Québécois n’a pas été majoritaire depuis 1998-2002 et au pouvoir seulement 2 ans pendant cette durée. Les étudiants de 2012 se souviendront des promesses en éducation. Chaque chef ensuite est un meltdown en soit; PKP, Lisée et avant Marois on a eu Boisclair. Est-ce que le PQ sera élu aux prochaines élections en raison de la vacuité des autres? Je vous laisse deviner mon avis.

Qui aurait cru que la révolution tranquille aurait mené à 40 ans de ron-ron identitaire sur fond de néo-libéralisme austère?

La dimension humaine oubliée

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Au Bas-Saint-Laurent, de nombreuses églises rurales connaissent une reconversion notable, comme celle de l’église Saint-Yves de Rimouski-Est, récemment transformée en centre d’escalade. Cette tendance reflète un déclin de la pratique religieuse traditionnelle. Cela soulève la question : comment la spiritualité se manifeste-t-elle principalement aujourd’hui ?

Définir la spiritualité au-delà de la religion

Il est crucial de distinguer la spiritualité de la religion, car ces concepts sont souvent confondus (Abdel Halim, 2021). La spiritualité se définit comme une quête intérieure, propre à chaque individu, en quête de sens et de buts dans l’existence. Elle établit une connexion entre l’individu, les autres et l’environnement (Rousiau, Renard, 2021). Des éléments clés, tels que la quête de sens, la transcendance, le sacré et le sentiment de connexion, caractérisent la spiritualité non religieuse. Les valeurs guidant cette spiritualité incluent l’altruisme, la sagesse, l’émerveillement et le rapport au temps appelé Flow.

L’importance de la spiritualité dans la vie quotidienne

La spiritualité répond à un besoin fondamental de connexion avec des réalités dépassant la matérialité. Négliger ce besoin entraîne un déséquilibre, car chaque personne ressent une nécessité de vivre des expériences transcendantes (Merchez, 2024). La spiritualité permet de donner un sens à la vie, de mieux se connaître et de développer son potentiel vers un but précis. Elle joue également un rôle crucial dans divers domaines professionnels, tels que la santé, l’éducation et l’environnement. Par exemple, dans les métiers de la santé, la spiritualité se manifeste à travers la recherche de sens, la transcendance, les valeurs, l’identité et les relations (Pujol, Jobin et Beloucif, 2014).

La spiritualité dans le quotidien et au-delà de la religion

Dans la vie quotidienne, la spiritualité se manifeste à travers des activités comme le yoga, la marche, les voyages et la méditation. Elle est également présente dans l’art, la musique, la contemplation de paysages ou d’œuvres d’art, ainsi que dans les moments de connexion humaine, comme les moments passés en famille et entre amis, la remémoration des bons souvenirs et la prière (Rousiau, Renard, 2021). La spiritualité existe indépendamment de la religion, qui n’est qu’une forme d’expression de la spiritualité (Roof, 1993 ; Stifoss-Hanssen, 1999). On peut être spirituel et athée, car la démarche spirituelle est plus intime et personnelle, moins soumise à des idéologies religieuses ou à des institutions comme les églises (Rousiau, Renard, 2021). La spiritualité est inhérente à la nature humaine et s’exprime à travers la vie elle-même (Frick, 2006).

Conclusion

En conclusion, malgré son caractère intime, personnel et multiculturel, la spiritualité comporte trois éléments essentiels : la recherche de sens, la construction et le maintien de connexions, et le dépassement de soi à travers des actions altruistes. La spiritualité est un trait naturel chez tous les êtres humains, activé à des degrés divers selon les individus et leurs contextes. Elle transcende la religion, se manifestant de multiples façons dans la vie quotidienne et professionnelle, offrant ainsi un sens profond et une connexion essentielle à la vie.

HEYER René, « Du spirituel par l’art, et dans la morale en particulier », Revue d’éthique et de théologie morale, 2021/HS (n° Hors-série), p. 127-134. 

ROUSSIAU Nicolas, RENARD Elise, « Chapitre 1. Comment aborder la spiritualité ? », dans : Nicolas Roussiau éd., Psychologie et spiritualité. Fondements, concepts et applications. Paris, Dunod, « Univers Psy », 2021, p. 19-34. 

UNDERWOOD Lynn, VAGNINI Kaitlyn, « Chapitre 5. Expériences spirituelles dans la vie quotidienne : effets positifs sur la résilience, le burn-out et les addictions », dans : Nicolas Roussiau éd., Psychologie et spiritualité. Fondements, concepts et applications. Paris, Dunod, « Univers Psy », 2021, p. 85-103. 

ABDEL HALIM Lara, « Chapitre 11. La spiritualité au travail », dans : Nicolas Roussiau éd., Psychologie et spiritualité. Fondements, concepts et applications. Paris, Dunod, « Univers Psy », 2021, p. 185-199. 

NAVARRO Oscar, OLIVOS JARA Pablo, TAPIAS-FONLLEM Cesar, « Chapitre 10. Environnement et spiritualité : réflexions autour de la connexion à la nature et le bien-être », dans : Nicolas Roussiau éd., Psychologie et spiritualité. Fondements, concepts et applications. Paris, Dunod, « Univers Psy », 2021, p. 171-184. 

Merchez, Léa. « Vieillissement et spiritualité en ehpad Penser la singularité du sujet âgé », Le Journal des psychologues, vol. 409, no. 2, 2024, pp. 75-80.

L’impact de l’art mural dans une ville

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

L’art mural, par son essence, raconte des histoires et transmet des messages au cœur même de la vie urbaine. À Rimouski, une impressionnante murale d’Isabelle Duguay orne la façade ouest de l’immeuble de Place St-Laurent. Cette œuvre est une ode à la persévérance, à la détermination et à la réalisation de soi. S’inspirant des nuances bleues du ciel et des eaux, des verts de la végétation et des teintes orangées des couchers de soleil, l’artiste capture la puissance sereine de la nature.

Objectifs et importance de l’art public

Cette création visait à dynamiser le centre de Rimouski en y apportant une dimension culturelle significative. L’intégration de l’art dans l’espace public n’est pas anodine ; elle offre à la population l’opportunité de s’approprier la ville, de la teinter de couleurs et de significations diverses.

L’art public revêt une importance majeure. En effet, les individus, dans leurs activités quotidiennes, interagissent consciemment ou inconsciemment avec leur environnement (Vernet, 2014, p. 4). Cette interaction offre des possibilités d’action, influencées par la perception écologique de chaque personne, enrichie par son vécu personnel.

L’interaction entre l’art et les usagers

L’art dans l’espace public ouvre de nouvelles perspectives aux usagers. Les interactions générées par une œuvre dépendent à la fois de son emplacement et du potentiel de l’individu qui la contemple. Cependant, le contexte et le lieu de l’œuvre sont cruciaux. Par exemple, une œuvre située dans une zone à forte circulation automobile pourrait être négligée, illustrant ainsi une marginalisation par l’intensité de la vie sociale (Vernet, 2014, p. 11).

La signification de l’œuvre d’art est également essentielle, surtout dans une ville aussi diverse que Rimouski. L’artiste, les valeurs véhiculées et la représentation doivent refléter une réalité inclusive, évitant de perpétuer l’hégémonie de l’homme blanc.

Contrairement aux musées ou galeries, l’art public est intégré à la sociabilité urbaine. Créer une œuvre dans un espace public, c’est accepter de travailler dans l’inconfort (Lafforgue, 2021, p. 106). Cet espace, grâce à l’artiste, devient un terrain de jeu, un acte éminemment politique.

L’art public

L’espace public se transforme en un lieu d’expression, accessible à tous, indépendamment de leur statut social ou de leur parcours de vie. L’art amorce un dialogue avec les passants (Lafforgue, 2021, p. 107). Faire de l’art dans la rue, c’est faire de cet espace un lieu de partage, allant au-delà du simple déplacement. Comme l’exprime Laetitia Lafforgue, « Apporter du sens dans l’espace public, c’est apporter la possibilité du dialogue, du débat. C’est exercer la démocratie, participer à la création d’un imaginaire commun, contribuer à une politique de la relation » (Lafforgue, 2021, p. 108).

– Ville de Rimouski https://rimouski.ca/tourisme/projets-majeurs/centre-ville-de-rimouski

– Lafforgue, Laetitia. (2021)**. L’art dans l’espace public : vigie du monde. L’Observatoire, 57, 106-108. https://doi.org/10.3917/lobs.057.0106

– Vernet, L. (2014). La vie sociale des oeuvres d’art dans les espaces publics : une étude des publics au square Saint-Louis. Environnement urbain / Urban Environment, 8, 1–13. https://doi.org/10.7202/1027734ar

La pêche en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le secteur de la pêche en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent connaît des défis importants. En Gaspésie, l’économie des pêches est concentrée principalement sur deux espèces : le crabe des neiges et le homard d’Amérique. Toutefois, la dépendance croissante à ces ressources expose le secteur à des risques majeurs, car leur répartition et leur abondance sont affectées par les changements environnementaux. La diminution des stocks ou la perturbation des habitats marins due aux changements climatiques ou aux mauvaises pratiques de gestion pourrait entraîner de nouvelles crises économiques.

Le secteur reste fragile, notamment en raison de la baisse des stocks de certaines espèces, un phénomène accentué par les bouleversements climatiques. De plus, les pêcheurs doivent adapter leurs pratiques pour éviter de répéter les erreurs passées, comme l’effondrement des stocks de poissons de fond dans les années 1990.

Dans certaines pêcheries, comme celle de la crevette dans le golfe du Saint-Laurent, la situation est particulièrement préoccupante. Les quotas de pêche ont drastiquement chuté, créant une crise économique pour les crevettiers. Une grande majorité d’entre eux ont même décidé de ne pas sortir en mer cette année, faute de rentabilité suffisante, et plusieurs entreprises de pêche risquent la faillite.

Il est donc clair que le secteur de la pêche, bien qu’important pour l’économie locale, traverse une période de grande vulnérabilité. Des efforts sont déployés pour diversifier les espèces exploitées et rendre les pratiques plus durables, mais les défis sont nombreux, et la situation reste incertaine dans ces régions côtières du Québec.

Impact des pratiques industrielles

Le secteur de la pêche en Gaspésie et au Bas-Saint-Laurent a contribué à sa propre vulnérabilité en adoptant des pratiques industrielles intensives, notamment dans les décennies passées.

Comme dans de nombreuses régions côtières du monde, la pêche industrielle a été marquée par l’intensification des captures, l’utilisation de techniques destructrices comme le chalutage de fond, et la surexploitation des ressources marines.

L’utilisation des chalutiers, des équipements de grande taille et de techniques comme le chalutage de fond a également contribué à la destruction des écosystèmes marins, endommageant les fonds marins et perturbant les habitats d’espèces vitales. Ces pratiques accélèrent la dégradation des stocks marins et réduisent la biodiversité, deux éléments essentiels pour la résilience à long terme des pêcheries. Cela fait partie des raisons pour lesquelles les stocks de poissons de fond ont mis tant de temps à se rétablir, même après des réductions drastiques des quotas.

Influence des lobbys sur les politiques environnementales

Le rôle des lobbys de la pêche industrielle est un facteur majeur qui influence les décisions du gouvernement canadien, notamment en ce qui concerne les limites imposées aux pratiques destructrices comme le chalutage de fond. Ces lobbys exercent une forte pression sur les instances pour préserver les intérêts économiques de l’industrie, souvent au détriment des objectifs de conservation environnementale.

Les groupes de pression de l’industrie de la pêche ont un impact direct sur la formulation des lois et des régulations en matière de pêche. Ils parviennent souvent à obtenir des subventions substantielles pour des pratiques industrielles, y compris des formes de pêche destructrices comme le chalutage de fond. Ces subventions, même si elles sont critiquées par des experts en environnement, sont justifiées par des considérations économiques telles que la préservation des emplois dans les régions côtières, comme en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent. Ces lobbys soutiennent également la croissance de l’aquaculture, une industrie aux impacts environnementaux controversés, et influencent la répartition des quotas de pêche.

En fin de compte, le poids des lobbys de la pêche freine souvent la mise en œuvre de réformes substantielles pour protéger l’environnement marin. Alors que de nombreuses voix plaident pour une transformation radicale des pratiques de pêche afin de préserver la biodiversité et de réduire l’impact environnemental, les intérêts économiques à court terme dominent souvent le débat politique.

La dynamique entre les lobbys de la pêche industrielle et les décisions gouvernementales illustre la complexité des efforts pour concilier croissance économique et protection environnementale. Il est clair que tant que le poids des lobbys continuera de freiner les régulations nécessaires, les efforts pour préserver les écosystèmes marins et limiter des pratiques comme le chalutage de fond resteront insuffisants face aux enjeux écologiques globaux.

Résilience et transition vers des pratiques durables

Depuis quelques années, des efforts sont en cours pour diversifier les espèces exploitées et adopter des pratiques de pêche plus durables. Le modèle de développement territorialisé en Gaspésie, par exemple, vise à réduire la pression sur les ressources spécifiques, à encourager la diversification des activités et à réduire l’empreinte écologique du secteur. Cependant, cette transition est encore incomplète et les défis économiques restent énormes.

En somme, bien que le secteur de la pêche dans ces régions soit confronté à des forces externes telles que le changement climatique, il est également victime de ses propres erreurs historiques liées à la surexploitation et aux pratiques destructrices issues de la pêche industrielle.

https://irec.quebec/publications/rapports-de-recherche/les-peches-et-laquaculture-commerciales-en-gaspesie-un-portrait-sectoriel-et-territorial
https://www.canada.ca/en/global-affairs/news/2023/05/canada-accepts-wto-agreement-on-fisheries-subsidies.html
https://www.canada.ca/en/fisheries-oceans/news/2023/02/protection-standard-for-canadas-marine-protected-areas.html
https://www.canada.ca/en/fisheries-oceans/news/2023/02/protection-standard-for-canadas-marine-protected-areas.html

L’écologie entre instrumentalisations politiques et enjeux régionaux

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

L’écologie est aujourd’hui au cœur des préoccupations sociétales, notamment dans des régions comme le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, riches en biodiversité et en ressources naturelles. Cependant, cette question environnementale est parfois récupérée à des fins politiques, menant à des débats idéologiques qui influencent les politiques publiques et les perceptions de la population. Un exemple récent en est le projet immobilier controversé de Pointe-au-Père, qui soulève des questions sur la préservation des espaces naturels face à la pression du développement urbain. Ce projet illustre comment la protection des milieux naturels peut être mise en tension avec des intérêts économiques, posant la question de l’équilibre entre conservation et développement.

Une région sous pression environnementale

Les régions du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie font face à des enjeux environnementaux majeurs. L’expansion des claims miniers, notamment pour l’exploitation du lithium et d’autres minéraux stratégiques, suscite des inquiétudes quant à la préservation des territoires naturels et de la biodiversité. Parallèlement, la crise climatique impose une réflexion sur la gestion des ressources naturelles, le développement durable et l’impact des activités humaines sur les écosystèmes locaux.

L’affaire du projet immobilier à Pointe-au-Père illustre bien ces tensions. La ville prévoit a travers ce projet la construction d’un complexe résidentiel sur un terrain boisé, suscitant des inquiétudes quant à la destruction d’un écosystème fragile. Les opposant.es mettent en avant l’importance de préserver les derniers espaces verts urbains, essentiels à la biodiversité locale et à la résilience écologique face aux changements climatiques. Cette situation met en lumière le dilemme entre le développement immobilier et la conservation des milieux naturels, un enjeu qui dépasse Pointe-au-Père et concerne de nombreuses municipalités de la région.

L’écologie entre science et politique

L’écologie est une science qui vise à comprendre les interactions entre les être vivants et leur environnement. Toutefois, elle est aussi devenue un enjeu politique instrumentalisé par divers courants idéologiques. Historiquement ancrée à gauche, l’écologie a été récupérée par des mouvances plus conservatrices.

Dans un contexte régional, cette dualité se manifeste par des tensions entre le développement économique et la protection de l’environnement. Certaines voix préconisent une industrialisation accrue pour favoriser l’emploi et la croissance, tandis que d’autres militent pour une transition écologique plus radicale, s’appuyant sur des modèles locaux de gestion des ressources.

Vers une écologie solidaire et locale

Face à l’instrumentalisation de l’écologie, il est primordial de clarifier les discours et de promouvoir une écologie inclusive. Dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, plusieurs initiatives locales illustrent cette approche :

  • Le développement de coopératives agricoles et forestières misant sur des pratiques durables.
  • Les initiatives écoresponsables en tourisme qui valorisent la nature sans l’exploiter abusivement.
  • L’implication des communautés autochtones dans la gestion des territoires et la protection de la biodiversité.
  • La mobilisation de la population contre des projets jugés néfastes pour l’environnement, comme celui de Pointe-au-Père, qui montre l’importance de la participation locale dans les décisions d’aménagement du territoire.

En favorisant une écologie ancrée dans les réalités locales et exempte de récupérations idéologiques douteuses, ces régions peuvent devenir des modèles de transition écologique responsable. L’enjeu n’est pas seulement environnemental, mais également social et politique : construire un avenir où la protection de la nature rime avec justice sociale et inclusion.

Sources :

Grange, Juliette. « Écofascisme et écologie intégrale ou l’utilisation de l’urgence écologiste par les extrémismes de droite », Cités, vol. 92, no. 4, 2022, pp. 43-55.

Guillibert, Paul. « La racine et la communauté. Critique de l’écofascisme contemporain », Mouvements, vol. 104, no. 4, 2020, pp. 84-95.

Dubiau, Antoine, « L’écofascisme, ou l’actualisation écologique de la doctrine fasciste », Politique, juin 2022 : https://echoslaiques.info/lecofascisme-ou-lactualisation-ecologique-de-la-doctrine-fasciste/

L’importance des liens

Nous sommes une poignée de citoyen·nes présentement préoccupé·es par le climat actuel au sein de notre municipalité de Métis-sur-Mer.

Au cours des dernières années, notre ville a dû composer avec des projets qui, par leur nature, ont généré des opinions divergentes au sein de la population.

Derrière ce contexte, il y a des humain·es, des citoyen·nes qui ont pris la décision de s’impliquer en politique municipale afin de s’investir dans l’avancement de leur communauté et ce (considérant les heures incalculables investies en réunion et en préoccupations quotidiennes) de manière presque bénévole.

Or, au cours de ce présent mandat, le conseil municipal a eu à faire face à une adversité qui dépasse le cadre normal d’une saine vie démocratique : propos violents, diffamation, fausses rumeurs, intimidation sont devenus monnaie courante dans le quotidien de nos élu·es. Parce que nous sommes conscient·es de l’investissement de nos élu·es, parce que nous savons que le développement de notre communauté leur tient à cœur, mais aussi parce que nous savons à quel point le climat actuel les affecte, nous prenons ici la parole pour demander à nos concitoyen·nes d’agir et de parler avec civisme et empathie sur les réseaux, dans les assemblées, mais aussi entre eux lorsqu’il est question d’enjeux municipaux.

La qualité de vie, la force des liens, le désir de s’impliquer sont des conditions fragiles, mais nécessaires au développement d’une communauté saine et vivante, prenons-en soin. Les débats et les échanges d’idées font partie intégrante d’une saine vie démocratique alors débattons, mais même si nos opinions nous tiennent à cœur, apprenons à gérer notre impulsivité pour avoir des échanges constructifs.

Dans un contexte où nous assistons de plus en plus à des démissions d’élus municipaux dues à l’épuisement et à l’intimidation et étant donné l’imminence des prochaines élections municipales, il est de notre responsabilité d’encourager l’implication des gens en politique municipale et de saluer leur engagement. 

Pour que nos enfants continuent d’avoir de merveilleuses activités le vendredi soir, pour briser l’isolement grâce à des déjeuners communautaires, pour qu’on ait des fêtes de village et pour que des entrepreneurs aient envie de s’investir dans notre communauté, il faut que le climat soit convivial et harmonieux et surtout éviter à tout prix que les personnes qui s’impliquent se sentent menacées.

Finalement, nous aimerions rappeler à tous à quel point nous sommes beaux et belles quand on s’envoie la main dans la rue, quand on se demande des nouvelles les un·es des autres à l’épicerie du village, quand on s’appuie sur le même muret pour s’émerveiller devant nos incomparables couchers de soleil, quand on regarde nos petits s’ébrouer dans les vagues.

Prenons soin de nos liens, ils sont ce que nous avons de plus précieux.

Nancy Arsenault 

Lyse Beauchemin

Nancy Beauchemin

Pierre-Alexis Beauchemin-Kirallah

Alice Bergeron

Véronic Bernier

Karine Berthelette

Charles Blanchette

Lysanne Brochu

Réjean Brochu

Raphaëlle Cardinal

Sylvain Cardinal

Jules Castagner

Maria Castillo

Sonia Castillo

Diane Dubé

Michel Dubé

Josée Durepos 

Pierre Olivier Ferry

René Fillion

Melanie Gauthier

Pierre Gauthier 

Hélène Gendron

Pascale Geoffroy

Marie-Claude Giroux

Marc-André Guilbault

Michel Lapierre

Lise Lechasseur

Martine Lizotte

Diana Martin

Judy Martin

Michael Martin

Peter Martin

Keith Martin

François Naud 

Myria Mercier-Paquette

David Paquette

Stéphanie Pelletier

Myriam Proulx

Marjolaine Ratté

Nathalie Rousseau

Sabrina Simard

David Soucy

Luc Tellier

Jacques Thomassin 

Marc Vinette

L’ogre de l’illimité : une analyse de la consommation à l’ère de l’abondance

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

L’économie moderne se distingue par un paradoxe intrigant : produire un bien pour la première fois coûte cher, mais chaque unité supplémentaire devient de moins en moins coûteuse. Ce phénomène favorise les achats en gros, un modèle de consommation bien illustré par des magasins comme Costco, qui attirent des consommateurices issus de diverses classes sociales, soucieux de profiter de tarifs avantageux sur de grandes quantités. Cette dynamique incite à surconsommer et pousse par l’idée d’optimiser un achat en accumulant des stocks. Les étagères débordant de produits, de l’huile d’olive au papier toilette, créent ainsi des « besoins » bien souvent superflus.

L’attrait d’une offre « illimitée » crée donc des comportements de surconsommation et de gaspillage, exacerbés par des stratégies commerciales qui encouragent à dépenser toujours plus. Avec une carte de membre à 60 $ ou 120 $, la rentabilité perçue repose sur une fréquence d’achat soutenue, renforçant la dépendance au modèle d’abondance, surtout pour les consommateurices les plus aisés, qui disposent d’un revenu confortable.

La numérisation : le mirage de la gratuité

L’avènement du numérique a amplifié cette logique de l’illimité. Grâce à des coûts de reproduction et de transmission quasi-nuls, il est devenu facile de partager et consommer sans limites des contenus culturels (films, musique, etc.), encourageant ainsi le téléchargement gratuit et le partage de copies numériques, souvent illégales. Cette accessibilité presque totale a normalisé l’idée de gratuité, poussant les consommateurices à envisager une économie sans rareté apparente où tout semble être disponible immédiatement.

Cette dissémination d’un contenu « gratuit » favorise la prodigalité, une notion qui permet de distinguer l’abondance de l’illimité. L’abondance suppose une productivité excédentaire et une relative modération des besoins, « on n’y a pas besoin de produire beaucoup puisqu’on a peu de besoins » (Auray, 2023). Alors que l’illimité est propulsé par un désir insatiable. Dans cette société où les images circulent massivement, un fossé se creuse entre les attentes et la réalité, alimentant frustration et insatisfaction.

L’illimité : une tension entre désir et réalité

Le concept d’illimité présente deux caractéristiques principales. Premièrement, il offre un sentiment de liberté énorme de consommation, les catalogues de contenu (vidéos, musique, etc.) étant si vastes que les découvrir dans leur intégralité serait un défi insurmontable. Deuxièmement, l’accès immédiat, sans restriction, crée une impression de disponibilité totale.

Pourtant, cette dynamique contredit le postulat de l’économie, qui repose sur la gestion de ressources rares. Un bien économique se distingue justement par sa rareté. En l’absence de rareté, l’économie deviendrait inutile. L’illimité devient donc un concept paradoxal pour l’économiste : en l’absence de restrictions, tout serait « libre », et l’acte de consommer perdrait toute signification, si ce n’est celle de combler un vide artificiellement maintenu.

Les tensions de l’illimité dans la société contemporaine

Sur le plan sociologique, l’illimité permet de s’émanciper des contraintes du réel, mais cela nourrit aussi des désillusions. Les consommateurices, en quête perpétuelle de satisfaction, s’épuisent face à des désirs croissants. Cette tension entre désirs infinis et limites du réel mène souvent à des sentiments de frustration, voire de souffrance. En effet, les désirs insatiables, par définition, ne peuvent être entièrement comblés ; ils engendrent une forme de morbidité liée à l’impossibilité de consommer « tout » ce qui est proposé.

Face à cette insatisfaction, trois réactions se dessinent chez les consommateurs : l’anomie, qui traduit un état de confusion et de résignation ; la restriction personnelle, par laquelle l’individu apprend à maîtriser ses choix en fonction de ses limites de temps et d’énergie ; et enfin la contestation, où il dénonce les offres d’ »illimité » comme une illusion.

En conclusion, « anomie, résignation, contestation constituent les trois modalités de confrontation à l’élévation des aspirations et des espérances qu’a fait naître, chez le consommateur, l’illimité » (Auray, 2023, p. 102).

L’illimité dans l’économie actuelle n’est pas seulement un modèle de consommation, mais un miroir des aspirations humaines et de leurs limites. Cette notion reflète un décalage profond entre des désirs sans bornes et une réalité où tout est présenté comme accessible, mais demeure illusoire. C’est en interrogeant nos comportements face à cette abondance apparente que l’on peut peut-être retrouver un équilibre entre désir et besoin.

Nicolas AURAY, « La consommation en régime d’abondance. La confrontation aux offres culturelles dites illimitées », Socio-économie du numérique, pp. 85-102.

L’impact de l’arrivée de Costco à Rimouski : enjeux et perspectives

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

L’arrivée imminente de Costco à Rimouski, prévue pour 2025, suscite des discussions animées parmi les acteurs économiques locaux, surtout maintenant que le rapport de la SOPER a été rendu public récemment. La question centrale reste de savoir comment cette implantation impactera le commerce local, mais aussi comment elle influencera l’aménagement urbain. Un équilibre délicat doit être trouvé entre attractivité économique, mobilité durable et survie des entreprises locales.

Maintenir le stationnement pour contrer « l’effet Costco »

Souvenons-nous que pour répondre à « l’effet Costco », les membres du comité stratégique ont mis en avant des mesures visant à garantir l’accessibilité au centre-ville pour maintenir et améliorer l’attractivité commerciale. Une des recommandations phares est le maintien du nombre actuel de places de stationnement, jugé crucial pour soutenir la compétitivité des commerces locaux face à ce géant du commerce de détail.

Cette position est soutenue par la Chambre de commerce et des commerçants du centre-ville, qui avaient déjà exprimé en juillet des inquiétudes face à la réduction des espaces de stationnement au profit des infrastructures cyclables. Ces aménagements destinés à l’automobile sont montrés comme essentiels pour permettre aux entreprises locales de rivaliser avec des acteurs comme Costco. Il semble ainsi que la voiture reste au cœur des priorités stratégiques, malgré les appels à repenser la ville pour répondre aux enjeux climatiques et à la vitalité urbaine.

Une urbanisation entre piétonnisation et événements saisonniers

En parallèle, le comité stratégique propose des initiatives pour dynamiser le centre-ville en explorant des solutions complémentaires. Parmi celles-ci, l’organisation d’un événement hivernal sur la rue Saint-Germain Ouest, pendant les fêtes de fin d’année. Cette initiative s’inscrirait dans la continuité des Terrasses urbaines Cogeco, qui animent la rue Saint-Germain Est pendant l’été.

Ces propositions reflètent une volonté de rendre le centre-ville plus attractif tout en favorisant une piétonisation progressive, perçue comme essentielle pour créer un environnement urbain dynamique et accessible. Cependant, elles restent en tension avec les recommandations centrées sur le maintien des places de stationnement, signe des débats entre modernisation urbaine et dépendance automobile. Le 21en siècle n’est plus le monde de l’automobile.

Toutefois, ces initiatives, bien qu’attrayantes et rassurantes pour la population, ne suffiront pas à résoudre les défis posés par l’arrivée de Costco. Si elles peuvent contribuer à revitaliser ponctuellement le centre-ville, elles ne répondent pas à la menace directe pesant sur le tissu commercial local, qui devra faire face à une concurrence accrue et parfois déloyale.

Un rapport alarmant de la SOPER sur les impacts économiques

La Société de promotion économique de Rimouski (SOPER) a publié, le 17 septembre, un rapport alarmant pour le compte de Demarcom. Ce document identifie les secteurs économiques les plus vulnérables face à l’arrivée de Costco. Bien que ce dernier attire une clientèle régionale, les commerces de Rimouski, notamment ceux des secteurs alimentaires, des articles domestiques et de la restauration, risquent de subir de lourdes pertes.

Les boulangeries et pâtisseries locales figurent parmi les principales victimes potentielles, tandis que les prévisions indiquent que Costco pourrait représenter jusqu’à 31,9 % de l’offre globale dans certains secteurs. Cette concurrence pourrait entraîner la disparition de parts de marché pour les commerces locaux, menaçant jusqu’à 1 312 emplois si aucune action n’est entreprise pour soutenir ces entreprises.

Une décision controversée

Face à ces constats, une question interpelle : comment la ville a-t-elle pu valider l’arrivée de Costco sans disposer d’un rapport aussi détaillé que celui produit par la SOPER ? Si ce géant du commerce peut offrir de nouvelles opportunités économiques, il est clair que ses conséquences risquent de déstabiliser durablement le tissu commercial local.

La ville de Rimouski devra donc jongler entre la nécessité de tirer parti des retombées positives de l’arrivée de Costco et celle de protéger ses commerces locaux, essentiels à la vitalité économique et sociale du territoire. Pour cela, des solutions innovantes et un soutien concret devront être mis en place rapidement afin d’éviter les scénarios les plus pessimistes.

Les inégalités dans l’angle mort de la transition écologique : un enjeu de mobilité

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Dans la course à la transition écologique, la question des inégalités d’accès à la mobilité est souvent négligée. Pourtant, elle représente un angle mort essentiel. Si, autrefois, posséder une voiture était un symbole de luxe et de distinction sociale, la démocratisation de l’automobile en a fait un outil indispensable pour assurer la mobilité quotidienne de millions de personnes. Aujourd’hui, ce mode de transport, jadis luxueux, est devenu omniprésent, que ce soit pour le travail, les courses ou les loisirs. Cependant, cette accessibilité apparente masque une réalité d’inégalités profondes, en particulier pour les groupes vulnérables. La Régie de transport du Bas-Saint-Laurent (RTBSL) attend toujours que Québec autorise la hausse de la taxe sur l’essence pour instaurer des transports en commun sur tout le territoire.

Une inégalité d’accès basée sur le modèle de la voiture individuelle

Le modèle de transport axé sur l’automobile favorise ceux qui ont les moyens financiers de posséder et d’entretenir une voiture. Or, ce système, centré sur la possession d’un véhicule personnel, exclut d’office les personnes incapables de conduire, comme les enfants, les personnes âgées ou les individus en situation de handicap. Ces groupes, qui dépendent davantage des services de proximité, se retrouvent souvent pénalisés dans un environnement urbain et suburbain où les infrastructures sont pensées pour la voiture.

En encourageant l’usage de la voiture individuelle, la mobilité est également « marchandisée » : elle devient un bien qu’on achète plutôt qu’un droit universel. La nécessité de posséder un véhicule pour assurer ses déplacements lie la liberté de mouvement aux capacités financières. Cela se traduit par un accès inégal à la mobilité en fonction du statut socioéconomique, du genre et de l’origine ethnoculturelle.

Le fardeau financier de l’automobile

La voiture représente un lourd fardeau économique pour de nombreux ménages, en particulier ceux à faible revenu. Entre 2010 et 2019, les dépenses de transport ont considérablement augmenté pour devenir le deuxième poste de dépenses des ménages, atteignant environ 19 % des dépenses courantes. La hausse du prix de l’essence, des frais d’assurance et des coûts de réparation rend la possession d’une voiture coûteuse, voire inaccessible pour certaines personnes.

Les familles à faibles revenus sont souvent les plus touchées par cette marchandisation de la mobilité. En 2019, si 90 % des ménages du quintile supérieur possédaient un véhicule, ce chiffre tombait à 53 % pour le quintile inférieur. Non seulement les ménages à faibles revenus possèdent moins de voitures, mais celles-ci sont également plus anciennes et moins performantes, créant une charge économique supplémentaire en raison de réparations plus fréquentes et de coûts d’entretien plus élevés.

Pour ces ménages, l’automobile, loin d’être un atout, peut devenir un obstacle à l’amélioration de leur situation socioéconomique. Posséder une voiture réduit la capacité d’épargne et empêche l’accumulation de patrimoine. Paradoxalement, ne pas en posséder peut être encore plus pénalisant, car cela limite l’accès aux emplois, aux services essentiels, aux écoles et à d’autres opportunités dans les zones périphériques mal desservies par le transport en commun.

Vers une mobilité plus équitable

Un système de transport qui impose des dépenses importantes pour pouvoir y accéder n’est ni inclusif ni équitable. Cette logique de marchandisation de la mobilité impose une barrière économique à un droit fondamental : le droit de se déplacer librement. En outre, les nouvelles solutions de mobilité écologique, comme les voitures électriques, risquent d’accentuer les inégalités, ces véhicules étant actuellement peu accessibles pour les ménages aux revenus modestes.

La transition écologique ne devrait pas se limiter à une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle doit inclure une révision du modèle de transport pour créer une société plus équitable, où la mobilité n’est pas un privilège réservé à ceux qui en ont les moyens, mais un droit accessible à tous. Promouvoir le développement du transport collectif est une voie prometteuse pour atteindre cet objectif, en offrant une alternative à la voiture individuelle tout en contribuant à la décarbonation de la société.

Nicolas Viens, « Le transport collectif, pilier de la transition écologique. Fiche no3 – automobiles et inégalités », IRIS, janvier 2024.

Prédation trumpiste et « domino » canadien

Il est plus que temps de se réveiller et de nationaliser les secteurs stratégiques, notamment les ressources naturelles et la production alimentaire, en particulier les fruits et légumes. 

Trump sait que l’application de tarifs douaniers nuirait à l’économie américaine, mais à court terme seulement. En revanche, pour le Québec et le Canada, les coûts seraient si énormes que nous nous retrouverions complètement à genoux. D’ailleurs, nous sommes déjà considérés comme une colonie en matière de ressources naturelles. Il est impératif de revenir à une certaine forme de socialisme ou de social-démocratie renforcée.

Le Québec, comme le reste du Canada, est déjà sous l’emprise d’une multitude de multinationales américaines. Il est donc urgent d’opérer un virage majeur afin d’augmenter fondamentalement notre résilience. Le concept de biorégion peut offrir quelques pistes de solution à cet égard aux populations locales, régionales et, à la rigueur, nationales. Par ailleurs, à l’échelle du Québec, l’un des défis majeurs consiste à protéger nos secteurs stratégiques, comme l’énergie, avec Hydro-Québec, par exemple. Il y a quelques années, j’avais proposé la création d’une société d’État de production de fruits et légumes (Serre-Québec) sur l’ensemble du territoire pour réduire notre dépendance vis-à-vis les États-Unis. Bref, il faut absolument renforcer notre autonomie dans les secteurs stratégiques tels que l’énergie, l’alimentation et celui des ressources naturelles en développant la deuxième et la troisième transformation.

Soumission

Aujourd’hui, nous sommes totalement soumis aux caprices de Trump, à ses menacent et à cette guerre tarifaire qui vient d’être officiellement déclarée le 4 mars 2025. 

Quelle sera la prochaine exigence? L’annexion de l’Arctique canadien? Si nous maintenons le statu quo, nous resterons piégés indéfiniment dans une boucle temporelle, comme dans Le jour de la marmotte, avec un Trump aux commandes et des dirigeants qui attendent docilement ses directives… Malgré le fait que le Canada décide de répliquer avec des contre-tarifs, qui est une mesure légitime et nécessaire, étant donné notre extrême dépendance au marché étatsunien, nous ne pouvons gagner à ce petit jeu. 

Le Canada, et le Québec de facto, est une colonie de ressources naturelles soumise aux multinationales qui n’a jamais vraiment su voler de ses propres ailes. Nous sommes comparables à une souris affaiblie, vacillant sous le poids d’un éléphant américain agressif et affamé. On le voit déjà et cela risque de s’aggraver avec l’inexorable déplétion des ressources comme le pétrole et les minéraux critiques. Dans le contexte actuel, relire le rapport Meadows peut s’avérer une clé de compréhension importante 😉.  

Prenons l’exemple de l’Alberta et analysons trois concepts: nationalisation, privatisation et fonds souverain. En comparant la gestion des ressources pétrolières albertaines – non conventionnelles et extrêmement polluantes – avec celle de la Norvège, on constate un contraste frappant. Grâce à ses hydrocarbures offshore en mer du Nord, la Norvège a constitué un fonds souverain dépassant les 1500 milliards de dollars. Prévoyante comme une fourmi, elle a nationalisé ses ressources et en a tiré une immense richesse collective.

À l’inverse, l’Alberta a privilégié la privatisation. Résultat? Un maigre bas de laine d’environ 20 milliards de dollars. Avec une vision court-termiste et libertarienne, similaire à celle d’une cigale insouciante, l’Alberta a mal géré ses ressources non renouvelables. Elle n’a pas les moyens de se lancer dans une guerre tarifaire avec les États-Unis, et le Canada, après la privatisation de Petro-Canada, ne peut pas rivaliser non plus.

Programmes de nationalisation

Où sont passés les apôtres du néolibéralisme? Ceux qui, guidés par les intérêts oligarchiques de la haute finance, ont contribué au démantèlement des sociétés d’État?

Curieusement, ces derniers temps, on les voit partout dans les médias, nous prodiguant leurs « grands » conseils stratégiques pour affronter la menace Trump. Pourtant, les gouvernements ont aujourd’hui une opportunité en or de lancer de vastes programmes de nationalisation dans les secteurs stratégiques, notamment les ressources naturelles.

En lien avec le retour des menaces d’autorisations de pipelines à la va-vite pour atteindre les marchés européens et asiatiques, on peut se demander où est votre volonté d’enrichir véritablement les Canadiens? Où est votre engagement à mettre fin à la spoliation des ressources non renouvelables par le biais de la nationalisation? Cela dit, même nationalisé, ces projets de pipelines ne seraient pas nécessairement plus acceptables. Encore une fois, il ne s’agit que de servir les ambitions mercantiles des grandes multinationales, et non d’assurer l’enrichissement collectif.

Des Québécois porteurs de goudron? Non merci! Nous pouvons et devons refuser le retour de ces projets indésirables comme nous l’avons fait par le passé avec le projet d’Énergie Est et de celui de GNL Québec. À défaut d’être un pays souverain, soyons au moins une province qui se tient debout face à l’inacceptable!

Malgré l’immense défi que représente la réduction de notre dépendance aux hydrocarbures, la nécessité d’y parvenir devrait être l’un des principaux objectifs de notre société. Les pays riches de demain seront ceux qui auront su réduire leur dépendance aux hydrocarbures. L’avenir écologique, économique et social de tous en dépend.

Guerre froide ou chaude tripolaire ?

Finalement, que veulent véritablement Trump et ses loyalistes libertariens ? Il semble que Trump cherche à restaurer de manière significative le hard power impérialiste américain, en s’inspirant de l’ancien président William McKinley (1897-1901) pour y parvenir.

Par ailleurs, il est important de rappeler brièvement le contexte de la montée en puissance de la Chine et de la formation d’un axe sino-russe ces dernières années. Avec l’appui de la ploutocratie techno-industrielle des GAFAM, Trump, épaulé par son bras droit fascisant Elon Musk, cherche à sécuriser le contrôle des dernières grandes ressources naturelles stratégiques et à réaffirmer la puissance militaire des États-Unis dans les zones géostratégiques clés nous entraînant dans un possible chaos global.

Son obsession pour l’annexion du Canada, l’achat du Groenland, la normalisation des relations avec la Russie (dans l’espoir, plus qu’improbable, de briser l’axe sino-russe) et la reprise du contrôle du canal de Panama semble converger vers un isolement stratégique de la Chine. Tout cela ne s’inscrit pas dans une vision globale et cohérente, mais plutôt dans une dynamique court-termiste de « deals » opportunistes et rapides, sans perspective pour un ordre mondial juste.

L’avenir nous le dira.

Stéphane Poirier, enseignant en géographie au Centre matapédien d’études collégiales

La Débrouille adopte un plan d’urgence pour maintenir ses services essentiels

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Depuis quarante ans, La Débrouille oeuvre à la défense des droits des femmes cis et des personnes trans victimes de violence entre partenaires intimes, ainsi que de leurs enfants. L’organisme offre des services d’aide, d’hébergement et d’accompagnement pour soutenir ces personnes dans leur reprise de pouvoir sur leur vie. En plus de ses interventions directes, La Débrouille mène des actions de sensibilisation et de prévention afin de lutter contre la violence conjugale.

Face à une situation financière précaire, La Débrouille, organisme communautaire d’aide aux victimes de violence entre partenaires intimes, a mis en place un plan d’urgence afin d’assurer la continuité de ses services essentiels. Cette décision intervient alors que l’organisme est confronté à des difficultés de liquidités menaçant son bon fonctionnement.

Le plan d’urgence vise principalement à maintenir ouverte la maison d’hébergement et à stabiliser la situation financière par des démarches accrues auprès des bailleurs de fonds, créanciers et partenaires. Toutefois, ces mesures impliquent une réduction temporaire de certains services, incluant des mises à pied et une diminution des heures de travail pour certains employés.

Malgré ces ajustements, La Débrouille assure que son service d’hébergement d’urgence et sa ligne téléphonique demeurent accessibles 24h/24 et 7j/7. Le service d’accompagnement sans hébergement, quant à lui, sera limité aux situations urgentes.

Le conseil d’administration de La Débrouille travaille activement pour limiter la durée de ces mesures et exprime sa gratitude envers ses employé.e.s, partenaires et la communauté pour leur soutien en cette période difficile. Conscient des impacts de cette situation, l’organisme a toutefois décidé de ne pas accorder d’entrevues médiatiques afin de préserver la confidentialité des personnes concernées.

Les services de La Débrouille sont disponibles 24h/24 et 7j/7 via sa ligne d’écoute téléphonique au 418-724-5067.

8 mars : une journée engagée pour les droits des femmes

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le 8 mars 2025, à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, le Comité élargi 8 mars de Rimouski-Neigette convie la population à une journée de mobilisation féministe. Gratuit et ouvert à toutes et tous, cet événement promet d’être un moment fort de solidarité et de résistance face aux oppressions persistantes.

Un programme riche et militant

Dès 11h, le Musée régional de Rimouski accueillera un Marché des initiatives féministes ainsi que divers ateliers de mobilisation. Plus d’une trentaine de kiosques y seront présents : collectifs féministes, artistes, artisan.e.s, librairies engagées et organismes communautaires seront rassemblés pour favoriser les échanges et renforcer les solidarités.

Tout au long de la journée, des ateliers de mobilisation se tiendront afin de préparer les participant.e.s à la manifestation prévue à 18h. Parmi eux, un moment rituel avec Laetitia Toanen des Chemins de Traverse, un atelier de fabrication de lanternes avec le Comité féministe du Cégep de Rimouski, ainsi que des activités artistiques et militantes, telles que des percussions et des chants féministes animés par Germaine et Les Matantes à bouche.

Le point culminant de cette mobilisation aura lieu à 18h avec une grande manifestation partant du Musée régional de Rimouski. Ce moment fort se veut une dénonciation des violences sexistes et une affirmation des revendications féministes dans un contexte de montée de l’extrême droite. Pour Anne Lavoie, intervenante à la mobilisation pour le CALACS de l’Est du BSL : « Nous souhaitons avant tout dénoncer ce climat antiféministe qui nous affecte tant sur le plan intime que collectif. Notre riposte est ferme et sans compromis : nous ne nous tairons pas, nous ne nous soumettrons pas. »

Enfin, la journée se terminera par une soirée dansante à la brasserie Le Bien Le Malt, animée par DJ Hortensia – FabYo. Un moment festif et libérateur pour clore cette journée sous le signe de la résilience et de la puissance collective.

Face à la montée de l’extrême droite, une riposte féministe s’impose

Cette mobilisation s’inscrit dans un contexte mondial où l’extrême droite gagne du terrain, fragilisant les acquis féministes et les droits des minorités. Le droit à l’avortement est remis en question, les violences sexuelles et conjugales sont banalisées, et les communautés 2SLGBTQIA+, immigrantes ou à statut précaire sont de plus en plus visées.

Au Québec, les conséquences de cette vague conservatrice se font ressentir : les mouvements anti-féministes se multiplient, les féminicides persistent et les demandes d’aide pour violences conjugales et agressions sexuelles sont en hausse. Pour Amélie Harrisson, intervenante à La Débrouille et membre du Comité élargi 8 mars, « nous subissons aussi les répercussions de cette montée de l’extrême droite, et il est essentiel de se mobiliser collectivement ».

Joie militante et mobilisation collective

Le Comité élargi 8 mars de Rimouski-Neigette mise sur la « joie militante » pour réunir les forces progressistes. En créant des espaces de rencontres et de solidarité, cette journée vise à affirmer la puissance collective et à résister face aux oppressions systémiques.

Toute la population est invitée à prendre part à cet événement. Pour plus d’informations, il est possible de consulter la page Facebook du Comité élargi 8 mars Rimouski-Neigette.

Amphibie : un balado sur l’écologie queer

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Le balado Amphibie se donne pour mission de traduire, vulgariser et mettre en récit les recherches issues du domaine de l’écologie queer. Il s’agit d’un projet à la croisée des disciplines, combinant des dimensions littéraires, sonores, relationnelles et scientifiques pour rendre accessible un champ d’étude en pleine effervescence.

Une approche transdisciplinaire et artistique

Depuis une vingtaine d’années, l’écologie queer remet en question nos perceptions traditionnelles du sexe et de la nature. Amphibie met en lumière ces recherches en explorant des sources variées : biologie évolutive, génétique, théorie queer, justice environnementale, études décoloniales et écoféminisme. Tout cela est abordé avec une perspective artistique, afin de rendre ces thématiques accessibles et engageantes pour un large public.

Le balado propose des récits documentaires suivis de discussions et d’analyses menées avec des invité·es issu·es des domaines des arts et des sciences. Il explore aussi bien la diversité sexuelle des animaux que les réflexions trans sur les changements climatiques, offrant ainsi une perspective originale et inclusive sur ces questions.

Une première saison déjà diffusée

La première saison de Amphibie a été diffusée durant l’automne-hiver 2024. Bonne nouvelle pour les auditeurices : une deuxième saison est d’ores et déjà en préparation ! Le projet a reçu une bourse de l’Entente de Partenariat Territorial, financée par le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) et les MRC de la région. Une reconnaissance importante qui permet de poursuivre l’aventure et d’approfondir encore davantage les thèmes abordés.

Qui sont les créateurices de Amphibie ?

Derrière ce projet, on retrouve Mette Ricard et Seth Côté, ami·es et complices, basé·es au Bas-Saint-Laurent. Leurs liens avec Montréal et la Gaspésie nourrissent leur travail, qu’ils ancrent dans les milieux artistiques alternatifs entre Trois-Pistoles et Rimouski. Collaborateurices de longue date, iels partagent un intérêt commun pour l’écologie queer, l’art et la science. Amphibie est une opportunité unique de fusionner ces passions à travers un format balado qui leur tient particulièrement à cœur.

En attendant la sortie de la saison 2, les auditeurices peuvent découvrir ou redécouvrir la première saison, disponible en ligne. Une belle occasion de plonger dans un univers sonore riche, où se croisent science, art et militantisme queer.

Source :

Jung, Yeh Seo and Craig, Ray (2023) « Queer Ecologies: A Final Syllabus/Zine Product of Our Independent Study, » Crossings: Swarthmore Undergraduate Feminist Research Journal: 1 (1), 53-80. https://works.swarthmore.edu/crossings/vol1/iss1/5

Embarque BSL

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Embarque Bas-Saint-Laurent (Embarque BSL) est une plateforme régionale dédiée à la promotion de la mobilité durable dans le Bas-Saint-Laurent. Cette initiative vise à faciliter l’accès à divers modes de transport alternatifs à l’automobile individuelle, tels que le covoiturage, le transport collectif et le transport actif.

Lancée grâce à la collaboration des huit municipalités régionales de comté (MRC) du Bas-Saint-Laurent, du Conseil régional de l’environnement du Bas-Saint-Laurent (CREBSL) et de la Ville de Rimouski, Embarque BSL est coordonnée par le Collectif régional de développement (CRD) du Bas-Saint-Laurent. Le financement de cette initiative provient notamment du Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale (PAGIEPS 2017-2023) et du Fonds régions et ruralité (FRR), volet 4 – Soutien à la vitalisation et à la coopération intermunicipale du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation.

Inspirée du projet Web covoitureur de la MRC de La Matanie, la plateforme répond aux besoins de la population, des organisations, des institutions et des entreprises de la région en facilitant la recherche d’options de transport collectif, actif et écoresponsable. Elle encourage une reconsidération des habitudes de déplacement, en mettant l’accent sur les technologies modernes et les alternatives à l’utilisation individuelle de la voiture, contribuant ainsi à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et à la protection de l’environnement.

Embarque BSL se positionne comme un carrefour d’informations et de promotion de la mobilité durable, offrant une variété de services adaptés aux besoins des usagers. Elle s’inscrit dans la vision régionale de préserver l’environnement et d’améliorer la qualité de vie des communautés locales, en cohérence avec le plan régional de développement 2023-2028 du Bas-Saint-Laurent, qui identifie la mobilité durable comme une priorité.

En somme, Embarque BSL est une réponse concrète aux défis environnementaux liés au transport dans la région, offrant des solutions accessibles et durables pour les déplacements quotidiens des résidents du Bas-Saint-Laurent.

Chronique du gars en mots dits: Joyeux Christmas!

Après deux chroniques consécutives centrées sur notre écartèlement national entre les deux langues officielles de notre beau grand pays censément bilingue, je voulais cesser de vous enquiquiner avec cette question. C’était sans compter sur le temps des fêtes qui, chaque année, réactive la glande de mon indignation linguistique.

Avec la dématérialisation des chansons et l’accès direct que procurent les plateformes de diffusion numérique en continu, plus d’excuses pour ignorer les morceaux de Noël en français dans les commerces et les lieux publics. Il suffit d’avoir l’immense audace de taper quelques lettres dans un moteur de recherche. Essayez « Franco fête » ou « Noël Franco » sur Stingray musique, Spotify, Ohdio ou Apple Music, et le tour est joué.

Facile de même.

Dans ce contexte, comment expliquer qu’on doive souvent se farcir 100 % de chansons en anglais dans plusieurs restaurants, commerces et marchés publics? Plus étonnant encore est le fait que les employés ou les exposants ont la couenne dure, eux qui tolèrent la chose toute la journée sans se plaindre! Je me demande toujours jusqu’à quel point on peut nier sa propre culture avant que les francophones réagissent, s’indignent et passent à l’action…

Jeune adulte, à Québec avec mes amis, nous écumions les bars de chansonniers qui pullulaient dans le Vieux-Québec : le bar Chez son père, Les Yeux bleus, Les Voûtes Napoléon, Le petit Paris ou La petite Grenouille. Nous avions développé une technique redoutable pour forcer les rares chansonniers récalcitrants à obtempérer en basculant au français : nous pratiquions le renforcement positif en nous enthousiasmant et en entonnant à tue-tête les paroles de chaque chanson en français – dont nous connaissions les paroles par cœur –, mais en retombant dans une apathie et un mutisme profonds quand Shakespeare se pointait le bout d’une parole.

Ainsi, nous arrivions à créer de petits îlots de francité momentanée et éphémère dans une ville où tous les autres bars et discothèques diffusaient 100 % de musique en anglais.

*             *             *

En parlant de nos belles voix d’ici, vous souvenez-vous de Robert Charlebois quand il disait « Je ne veux pas chanter en créole » ? Il faisait allusion, bien sûr, à notre créole national, qui était alors le joual, ce parler populaire criblé d’anglicismes, et qui condamne à l’isolement cet idiome local.

Aujourd’hui le danger ne semble plus consister à parler créole, ce mélange de langue indigène et de français, mais bien un pidgin anglais français qu’un jour nos enfants transmettront aux leurs, et qui deviendra un créole de plus. Le mot pidgin vient de la déformation chinoise du terme anglais business, c’est tout dire. Les jeunes générations se sont tellement fait marteler l’importance de l’anglais par leurs parents, et le système d’éducation l’a tellement survalorisé en son sein même qu’on peut dire qu’ils parlent désormais un mélange de leur langue indigène, le français, et de cet anglais simplifié, le globish, qui colonise aujourd’hui la planète. Mais, nuance importante, c’est dans un pidgin même pas déformé qu’ils chantent, consomment, vivent : ils y intègrent les mots anglais tels quels, parfaitement écrits et prononcés, à l’anglaise. Un pidgin de gens instruits donc, qui le font sciemment et consciemment.

Des phrases inconcevables il y a à peine 10 ans émaillent leur parler, comme : « Je suis embarrassed », « Je vais skip ce step », « Ça clash dans le décor ». Une étudiante m’a souhaité joyeuses Fêtes en me textant, moi son prof de français, un « Miss you already » qui venait du cœur. Les adultes aussi sont contaminés et relaient la mode : c’est un technicien qui me promet de me « ship mon colis », une salle d’entraînement qui affiche fièrement la section des dumbbells (exit les haltères et les poids), un entraîneur sportif (un coach !) encourage ses ouailles en lançant à tout vent de cinglants « Good Job » ou « You know you can do it ! » Le francophone qui souhaite protéger sa langue devra se lever tôt et s’armer d’un bon bouclier : sa journée sera torpillée, mitraillée, criblée d’anglicismes même s’il cherche à les fuir. Ce seront ses semblables qui l’agresseront.

Les francophones sont désormais anglicisés par d’autres francophones bilinguisés. Autrefois peut-être, c’était au contact d’anglophones unilingues que le français s’érodait… Désormais ces francophones tellement bilingues basculent sans états d’âme d’une langue à l’autre. Le chanteur Jérôme 50 vient de faire paraître le Dictionnaire du chilleur, qui décrit le parler anglicisé des jeunes Montréalais. Le feuilleter, c’est mesurer la perméabilité du français envers son rival de toujours.

Bref, fréquenter des francophones ne suffit plus à se protéger de l’envahissement de l’anglais : il faudrait vivre dans une bulle de verre, isolé de ses compatriotes. Mais il existe une autre solution : que nous prenions collectivement, pour 2025, la résolution de faire renaître en chacun de nous une certaine fierté linguistique, notre devoir de vigilance. Que chacun interroge ses pratiques quotidiennes : est-ce que je fais la part belle à la culture d’ici, est-ce que je m’efforce pour trouver les termes français quand on me lance un anglicisme inutile à la figure?

On peut rêver.

Investir dans l’automobile, investir dans la précarité

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Investir dans la culture de l’automobile revient à investir dans la précarité. Le pont de l’A20 au Bas-Saint-Laurent, dont la construction s’élève à 29,3 millions de dollars, en est un exemple frappant. Ce montant pourrait pourtant être alloué à la création d’un réseau de transport collectif plus inclusif et efficace, réduisant ainsi le trafic et les inégalités sociales. L’absence d’un tel réseau accentue les disparités, notamment celles liées au genre, dans la mobilité quotidienne.

Le genre, un facteur clé de la mobilité

En effet, la mobilité n’est pas qu’une question de moyens de transport, c’est aussi une question d’équité. Le genre joue un rôle déterminant dans la capacité de se déplacer. Les jeunes parents, particulièrement les mères, voient leur mobilité considérablement réduite dès l’arrivée des enfants. Cet impact se répercute directement sur leur vie professionnelle et personnelle, limitant les déplacements qu’elles peuvent effectuer en une journée.

Malgré leur intégration au marché du travail, les femmes continuent de porter une charge disproportionnée de travail domestique. En moyenne, les hommes canadiens réalisent 37 % moins de tâches domestiques, ce qui contraint les femmes à consacrer plus de temps à des déplacements non rémunérés. Elles effectuent des trajets 20 % plus courts que les hommes, mais avec davantage d’arrêts, pour assumer des responsabilités comme conduire les enfants à l’école ou effectuer des courses. Cette complexité dans leur chaîne de déplacements restreint leurs opportunités professionnelles et amplifie leur précarité.

La mobilité et ses conséquences socioéconomiques

Les inégalités de mobilité entraînent des conséquences profondes, en particulier pour les mères monoparentales, responsables de 75,1 % des familles de ce type. Dépendantes des transports collectifs souvent inadaptés, elles subissent des contraintes qui les forcent à accepter des emplois à temps partiel, plus proches de leur domicile. En 2023, les femmes sont encore dix fois plus nombreuses que les hommes à travailler à temps partiel en raison de leurs responsabilités familiales.

Cette réalité limite leur mobilité professionnelle et constitue un frein majeur à l’égalité des sexes. Les services de transport collectif, souvent conçus sans prendre en compte les besoins spécifiques des femmes, aggravent cette situation. Les horaires et les trajets sont rarement compatibles avec des chaînes de déplacement complexes comprenant plusieurs arrêts.

Une solution : des transports collectifs adaptés

L’amélioration des services de transport en commun représente une voie prometteuse pour réduire les inégalités de genre et soutenir la transition écologique. Adapter ces services aux besoins des femmes et des familles, en augmentant la fréquence des passages, en élargissant les plages horaires et en desservant davantage la périphérie, permettrait de répondre aux contraintes de mobilité domestique.

De plus, la surreprésentation des hommes dans les instances de décision, notamment au ministère des Transports, oriente encore les politiques publiques vers l’électrification des voitures, négligeant le développement des transports collectifs. Une plus grande présence des femmes dans ces lieux de pouvoir pourrait rééquilibrer les priorités, au bénéfice d’une société plus équitable et durable.

Vers une mobilité juste et inclusive

Réinvestir les sommes destinées à des infrastructures favorisant l’automobile, comme le pont de l’A20, dans un réseau de transport collectif ambitieux aurait des impacts multiples : réduction du trafic, amélioration de la qualité de vie et diminution des inégalités. Ce choix stratégique serait non seulement un pas vers l’égalité entre les sexes, mais également un levier pour une transition écologique inclusive et équitable.

Réintégrer les savoirs scientifiques dans la société : un enjeu démocratique

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

La science, souvent perçue comme une entité homogène et indiscutable, repose en réalité sur une multitude de communautés qui décrivent le réel à travers des méthodes collectives. Cette spécificité confère au savoir scientifique une légitimité fondée sur l’évaluation par les pairs et la vérification expérimentale ou logique. Toutefois, ces savoirs, souvent produits en silo, restent circonscrits à des domaines de validité précis, ce qui complexifie leur intégration dans le processus décisionnel politique.

L’assemblée populaire de Rimouski qui a eu lieu le dimanche 23 février est un exercice concret de réintroduction et d’appropriation des savoirs scientifiques par la population. Cet événement vise à s’approprier ces savoirs, les extraire des silos et de les intégrer activement dans leurs réflexions et actions collectives.

La science face à la société et à la politique

Les savoirs scientifiques ne sont ni neutres ni autosuffisants. Ils sont certes indispensables pour décrire des phénomènes, mais ne peuvent être la seule voix dans le débat public. Comme l’affirmait Max Weber, « ce n’est pas au savant de dire le bien et le juste ». Dès lors, la reconnaissance publique des discours scientifiques passe par un travail de légitimation démocratique des institutions scientifiques. Celles-ci doivent s’ouvrir à la société pour débattre des enjeux scientifiques et participer à la résolution des problèmes publics.

L’expérience sociétale constitue un test pour la fonction sociale des savoirs scientifiques. Ceux-ci doivent être évalués, transformés et adaptés en fonction des besoins sociaux. Ainsi, la production scientifique peut s’ancrer dans une culture démocratique et surtout participative capable d’affronter les enjeux sociétaux majeurs, qu’ils soient écologiques, sociétales ou éthiques.

Articuler les savoirs pour mieux comprendre et agir

Réintégrer les savoirs scientifiques dans la société implique de repenser leur production. Il est essentiel de les articuler avec d’autres formes de savoirs – théologiques, politiques, pratiques – qui possèdent leurs propres référentiels. Comprendre et se comprendre pour agir nécessite donc de reconnaître la pluralité des modes d’élaboration des savoirs et de favoriser leur mise en dialogue.

Oser la « friction des savoirs », c’est faire le pari de la démocratie. Ce pari engage chaque communauté à rendre compte de sa perspective et à la rendre accessible aux autres. En retour, la démocratie confère à tous une responsabilité majeure : celle de produire un savoir commun, fruit de la reconnaissance et de l’interaction entre des savoirs individuels et collectifs différenciés.

Vers une co-construction des savoirs

Les processus de co-construction des savoirs peuvent être vus comme une forme d’émancipation des praticiens et praticiennes. Ils permettent d’éviter la marginalisation de certains savoirs et favorisent une approche plus inclusive et participative. Cette dynamique est essentielle pour une société plus démocratique, où les savoirs scientifiques ne sont pas simplement imposés, mais partagés et discutés.

En somme, réintégrer les savoirs scientifiques dans la société suppose de réinterroger leur place et leur mode de diffusion. Seule une démarche démocratique, ouverte et participative, permettra de faire de la science un outil véritablement utile au bien commun.

Source :

Fontenaille, Raphaëlle., et al. « Démocratie. La place des savoirs ». Revue Projet, 2024/6 n° 403, 2024. p.59-62. CAIRN.INFO, shs.cairn.info/revue-projet-2024-6-page-59?lang=fr.

Les Multitudes, qu’ossa donne ?

Monsieur Trump, eille, c’est-tu pas un bon président, ça !!  J’ai tellement hâte, moé, qu’y nous annexe, pis qu’y ramène l’ordre icitte !  Eille !!! ~ On va-tu pas être en Cadillac, pas à peu près ?!

J’comprends pas qu’on puisse s’opposer à ça ! ~ On a des osties de taouins par icitte qui semblent pas comprendre…  Eille !!…  Mais on l’a-tu vu comment ça paye, de vouloir se faire toffes en face des Maîtres Incontestâbles du Mônde !! ^^ Han, que les employés d’Amazône doèvent le r’gratter, à ç’t’heure-citte, avec leu’ ostie d’idée d’union !! ~ Non mais, c’est-tu épâs, pô à peu prâ ??? ~ Bin voéyons donc !!  Comme si on pouvait résister à l’aigle américain, toé !! ^^ Le p’tit castor canadien, croyez-moé, y’a intérêt à filer drette pis à travailler en t’sour de l’eau pis d’overtime, si y veut pas finir dans son assiette, à l’impérieux et majestueux zaigle américain !

Non mais…  T’sais !  On va-tu êt’ bins, aux Zétats ! ~ Eille, chus même prètt a y’aller, moé, au Groland-End, pour coloniser un peu la place, pour qu’y puissent construire ~ çô, c’est une vision à moé ; eille ! ~ un BEAU Palais Présidentiel pour Monsieur Trump !! . . . pour qu’y soye plus proche de son ami Poutine. ~ Riez pô !! ~ Nos ancêt’ l’ont faitt’ ~ pourquoé po moé ??!!

Eille, j’ai-tu assez hâte !! ~ Amazône va r’venir, la loi et l’ordre vont peser lourd à nouveau sur nous ~ pô comme dans le temps des fiffonettes qui nous ont soi-disant administrés, là, dans les dernières années !! ~ Eille !  L’économie vârte, toé !  L’économie circulâire !! ~ Bin oui, c’est vert pis ça circule tout autour, l’économie !, comme le sapin qu’on va éplucher bin nette pour la Builder Back Better, la Belle America ! ~ Pas cher, pas cher ! ~ D’la prospérité à pleins camions !  Pis du bitume en masse pour . . . ~ tenez vous BIEN : rem-plir CHAQ’ NID DE POULLL’ DU KHÉ-BECK !!!

Mais j’voué des gagnes de pouilleux qui ën veülent pÄs, de cÄ !! ^^ Y dïsent : Noüs, ön vä s’örgÄniser pär noüs-mËmes !  Ön ëst dës MültitÜdes !  Ön vä toütte créer pär lä bÄse en montänt jüsqu’au sommËt. ~ Eille ! ~ Toutatis nos propres pronoms, tant qu’à y’être ?!  Eille, chose !  Ça ç’tait à’ mode l’année passée ~ mais là : c’est Le Great Bon Sens Again !! ~ Eille, j’ai-tu hâte d’les vouér s’péter ‘a face à asseyer de r’faire la pyramide par en-d’sour, quand les States vont étendre leu’ beau drapeau su’ not’ beau territoére ~ qui l’mérite : de dev’nir le plusse merveilleux pays du monde : du pôle Nord jusqu’au ruisseau de Panama : les Zzzétats, enfin Zzzunis !  À grandeur, toué ! ~ . . . J’en voè des Zzzétouelles !! . . .

Bon, j’dis pô qu’on l’mérite TOUSSSS, là, qu’y nous annexe, Monsieur Trump !!  Y’en a qu’y’ont pô été fin-fin, là, dernièrement !  Écoutez-moué bin, là : Huer l’Hymne Américain  : ÇA-SE-FAIT-PÄH. ~ L’Amérique du nouveau boss, là [prend une pose patriotique], al’le mérite, not beau fleuve Saint-Laurent pis qu’not bon sirop coule dans ses veines ! ~ Pour qu’ossé faire qu’on voudrâ s’opposer à Ç ??!! ^^

Des Multitudes ! ~ Eille !! ~ Qu’ossa donne d’êt’ plusieurs pis divers, pis locaux, tous a’ec nos propres couleurs pis nos p’tits noms, pis nos économies enlisées dans l’terrouère . . . ~ quand on peut tous être UNIS, sous la même belle bannière étouélée ~ d’la Grande-Ourse ‘us’qu’à Croé-du-Sud, toé ; chacun a’ec son p’tit numéro pis son p’tit crochet bleu ! ~ Arrêtez-moé-ça, a’ec vot’ panier Bleu comme mes fesses !! ~ C’est par en haut qu’y sont, les Multitudes, les millions pis les centaines de milliards : à pelletées !!  DES TRILLIARDS ! ^^ ~ Pis avec le nouveau Palm Beach qu’y nous installent à Gaza !!  L’argent va-tu pas couler à flot !! ~ Eille, ça va êt’ toutte qu’un trippe ! [Regarde en l’air, rêveur . . .] ~ J’me voué déjà tond’ le gâzon sur Mars pour Monsieur Trump, dans sa résidence secondaire : Mars-à-Lago . . . ~ 

Eille ! ~ LUI c’est un bon Boss !!

Références : 

Le manifeste Multitudes :

Le monologue original : Les unions, qu’ossa donne

Le BAPE lance une audience publique sur le projet de parc éolien de la Madawaska

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

La Commission d’enquête du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) entamera la première partie de son audience publique concernant le projet de parc éolien de la Madawaska le 25 février 2025 à 19 h. Cette séance se tiendra à l’aréna & centre communautaire de Dégelis, salle Charles-Guérette, et sera diffusée en direct sur le site Web et la page Facebook du BAPE.

Un processus d’audience en deux parties

L’audience publique se déroulera en deux temps distincts. La première phase vise à fournir aux participants et à la commission toutes les informations essentielles sur le projet. L’initiateur du projet, Parc éolien de la Madawaska S.E.C., ainsi que plusieurs experts seront présents pour répondre aux questions du public et de la commission.

Toute personne intéressée pourra poser ses questions après inscription au registre. Selon le niveau de participation, des séances supplémentaires pourraient être organisées, y compris en après-midi et en soirée le lendemain.

La seconde partie de l’audience débutera le 25 mars 2025. Elle permettra à toute personne, organisme, groupe ou municipalité souhaitant s’exprimer sur le projet de le faire par le biais d’un mémoire ou d’une présentation verbale.

Accès à la documentation

Les documents relatifs au projet sont accessibles en version électronique sur le site Web du BAPE et dans le Registre des évaluations environnementales. Les citoyens peuvent aussi consulter la documentation à la bibliothèque municipale de Dégelis, située au 384, avenue Principale, ou contacter directement le BAPE pour plus d’informations.

Délais et résultats attendus

La commission d’enquête dispose d’un délai maximal de quatre mois pour mener à bien son mandat. Le rapport final sera remis au ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, M. Benoit Charette, au plus tard le 24 juin 2025. Le ministre aura ensuite 15 jours pour le rendre public.

Le rôle du BAPE

Créé en 1978, le BAPE est un organisme gouvernemental impartial dont la mission est d’informer et de consulter la population sur les projets ayant un impact environnemental. Il conseille également le gouvernement afin d’éclairer ses décisions.

Pour suivre les actualités du BAPE, les citoyens sont invités à s’abonner à l’infolettre L’heure juste et à consulter le Projet Scarabec, une bande dessinée illustrant le déroulement d’une consultation publique.

Une crise en culture

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Les artistes et les organismes culturels du Bas-Saint-Laurent subissent de plein fouet les conséquences d’un manque criant de financement. Ce problème, dénoncé récemment par l’ensemble des conseils régionaux de la culture de la province, a entraîné des répercussions majeures, comme en témoigne la fermeture du Carrousel international du film de Rimouski.

L’importance de la culture dans le développement des sociétés

La culture est une composante essentielle de nos sociétés, à la fois comme mode d’expression et comme moteur d’imagination et de créativité. Elle influence notre façon de percevoir le monde et de le structurer. L’art et la culture, intimement liés, permettent aux personnes de communiquer leurs idées et leurs émotions de manière unique.

L’intégration de la culture au cœur du développement urbain et rural est essentiel. Elle permet de valoriser le patrimoine, de respecter l’histoire et de préserver les pratiques locales. Une approche centrée sur la culture favorise un développement harmonieux et ancré dans l’identité des territoires.

Un levier social et économique majeur

La culture joue un rôle essentiel dans la cohésion sociale et le développement économique. Elle enrichit la qualité de vie et favorise le bien-être des personnes et des collectivités. Les activités culturelles offrent de multiples opportunités de loisirs, d’apprentissage et d’échanges, que ce soit dans les musées, les salles de spectacle, les bibliothèques ou d’autres espaces d’expression artistique.

Chez les jeunes, l’accès à la culture stimule la curiosité intellectuelle et améliore les capacités d’adaptation, ce qui se traduit souvent par de meilleurs résultats scolaires. De plus, le patrimoine culturel constitue une ressource précieuse pour l’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie, offrant une meilleure compréhension de l’histoire et de ses enjeux.

Les bibliothèques publiques, en tant que centres d’information et de formation, jouent un rôle fondamental dans la diffusion de la culture, dans l’éducation, dans la réduction de la fracture numérique et dans la capacité à se trouver une place dans la société. En bref, leur contribution est essentielle pour favoriser l’inclusion et l’accès au savoir.

Un impact positif sur la santé et le bien-être

Les bienfaits de la culture sur la santé mentale et physique sont largement reconnus. La créativité et l’implication dans des activités culturelles permettent de lutter contre l’isolement social, de renforcer l’identité personnelle et de favoriser le dialogue entre différentes cultures.

La revitalisation des traditions autochtones illustre parfaitement cette dynamique : elle contribue à la santé et au bien-être des communautés en leur permettant de se réapproprier leur héritage culturel. Le patrimoine culturel et artistique joue un rôle clé dans la consolidation du lien social.

Un moteur de développement économique et de compétitivité

Au-delà de son impact social, la culture constitue un atout économique majeur. Elle favorise la création de tissages sociaux et de projets artistiques locaux, stimulant ainsi l’économie de proximité. De nouveaux emplois voient le jour pour les artistes et les autres professions culturelles associées, tandis que des espaces sous-utilisés sont réinvestis à des fins culturelles.

Dans une économie fondée sur le savoir et l’innovation, la culture joue un rôle central en générant des idées novatrices et en valorisant des produits et services uniques. Elle permet aussi de renforcer l’attractivité des villes et des régions en créant une identité distincte,

Un appel urgent à l’action

Face aux nombreux bénéfices qu’elle apporte, la culture ne peut plus être reléguée au second plan en matière de financement public. Le manque de soutien financier représente une menace pour la vitalité culturelle et la diversification des expressions artistiques.

Il est crucial que les décideurs reconnaissent l’importance de la culture comme pilier du développement social et économique. Des mesures concrètes doivent être mises en place pour garantir un financement adéquat et assurer la pérennité des initiatives culturelles. L’avenir de nos communautés en dépend.

Une deuxième assemblée populaire pour protéger les milieux naturels de Rimouski

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Fort du succès de la première rencontre en décembre dernier, un second rendez-vous citoyen est organisé pour poursuivre les efforts de protection des milieux naturels. Cette nouvelle assemblée populaire se tiendra le dimanche 23 février à 13 h 30 au Grand Salon (C-186) du Cégep de Rimouski, avec un accueil prévu dès 13 h.

La première assemblée avait rassemblé près de 70 participants, confirmant ainsi l’intérêt et l’engagement des citoyens envers la préservation des espaces naturels. Pour Julien Garon, membre de l’organisation, cet engouement témoigne d’un besoin crucial : « on se sent souvent seul, ébranlé, quand on voit des boisés rasés, menacés ou partiellement détruits autour de nous. Se regrouper est essentiel pour sortir du sentiment d’impuissance et permet de passer à l’action plus facilement. »

Une rencontre tournée vers l’action

Contrairement à la première assemblée, qui avait principalement permis de poser les bases des discussions, cette nouvelle rencontre sera consacrée à la mise en œuvre de stratégies concrètes. Après un bref retour sur les échanges de décembre, les participants seront invités à rejoindre des ateliers en sous-groupes afin de transformer les idées en actions tangibles.

Marie-Pomme Presne-Poissant, qui avait participé à la première assemblée, souligne l’importance de ces rencontres : « c’est souvent quand on rassemble autour d’une table des gens de tout âge et de toute provenance que les meilleures idées émergent. On sous-estime trop souvent la force des liens humains pour développer notre intelligence collective. »

Un engagement citoyen pour une ville résiliente

Les Assemblées Populaires Rimouskoises offrent un espace de réflexion et d’échange pour imaginer et construire une ville plus écologique, résiliente, juste et équitable. Cet événement est ouvert à toutes et tous, sans besoin d’avoir assisté à la première assemblée ou de posséder des connaissances spécifiques sur le sujet.

Pour rester informé, les citoyens peuvent suivre la page Facebook Assemblées Populaires Rimouskoises ou contacter l’organisation par courriel à assembleespopulairesrimouski@gmail.com. Un service de garderie sera également disponible sur place pour faciliter la participation des familles.

Ce deuxième rassemblement promet d’être un moment clé pour la mobilisation citoyenne en faveur de la protection de l’environnement à Rimouski. Une occasion unique de transformer l’indignation en action collective.

Le populisme, vecteur du monde politique de 2025

Les prédictions politiques, même les mieux documentées, ne se réalisent pas toujours. La raison en est que l’improbable peut advenir, et il advient souvent. C’est même une constante dans l’histoire : ce sont les événements improbables qui ont le plus contribué à façonner le monde. Prédire ce que sera 2025 sur le plan politique est un exercice impossible, sauf si on s’en tient aux grandes idées qui balisent les contextes politiques.

En 2015, Raphaël Jacob promettait de manger une page de son livre si Donald Trump était élu président des États-Unis.Spécialiste de la politique étatsunienne, l’analyste n’a pu prédire, même à quelques jours du scrutin, ce qui semblait alors improbable. Aux élections fédérales de 2015, le NPD de Thomas Mulcair commençait la campagne en tête des intentions de vote, mais il s’est retrouvé au lendemain du scrutin loin en troisième place. Le PQ de Pauline Marois était convaincu de remporter les élections québécoises de 2014, les sondages pré-campagne confirmant la tendance ; c’est le PLQ qui les a gagnées.

Si l’improbable advient souvent, les idées, elles, sont plutôt stables. Un système d’idées qui se traduit en action est une idéologie. Le populisme n’est pas une idéologie aux contours bien dessinés, mais plutôt une stratégie anti-establishment marquée par la colère et misant sur les émotions plutôt que sur la raison, en contexte d’incertitude. Le populisme est assurément le vecteur du monde politique de 2025.

Le monde de Donald Trump

La démocratie n’est pas irréversible, la dictature non plus.L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis est une menace à la démocratie, mais elle renforce surtout l’incertitude dans le monde, considérant que l’émotion plutôt que la raison guide les décisions de ce mégalomane et de son équipe associée à la mouvance libertarienne, complotiste et climatosceptique. Ces idéologies balisent le monde trumpiste.

De manière improbable, la Syrie a mis fin en quelques jours, en décembre 2024, au régime sanguinaire de la dynastie Assad qui exerçait un pouvoir absolu depuis cinquante ans. La transition risque d’être violente puisque plusieurs groupes rebelles se disputent le pouvoir. Tout à côté, Benyamin Netanyahou poursuit sa guerre génocidaire contre le peuple palestinien sous le couvert d’un conflit avec le Hamas, mais ce sont des civils qui se retrouvent sous les bombes israéliennes, 44 000 morts et 105 000 blessés dans la seule bande de Gaza depuis octobre 2023. Les États-Unis sont le plus grand fournisseur d’engins de mort à Israël avec 92 % des importations d’armes israéliennes entre 2017 et 2021. Benyamin Netanyahu fait l’objet d’un mandat d’arrêt pour crimes contre l’humanité délivré par la Cour pénale internationale, rejoignant en cela Vladimir Poutine qui poursuit son opération militaire en Ukraine. Contre toute attente, le pays de Volodymyr Zelensky résiste depuis février 2022, mais il est à bout de souffle. Le soutien européen s’effrite, alors que le premier ministre hongrois d’extrême droite Viktor Orbán assume la présidence du Conseil européen et qu’il a des affinités avec le régime de Vladimir Poutine. Un cessez-le-feu, promis par Donald Trump dans les premières heures de son mandat, suscite des inquiétudes en Ukraine puisque d’importantes concessions territoriales à la Russie en sont à la clé.

En Europe, la question migratoire est l’enjeu principal de la plupart des élections nationales. C’est un terreau fertile pour la droite identitaire qui adhère à la théorie du Grand remplacement selon laquelle un peuple de souche serait graduellement remplacé par une population extérieure. Cette idéologie, érigée en théorie, ne résiste pas à l’épreuve des faits puisqu’un peuple n’a jamais une identité figée, elle est en constante redéfinition. Le sociologue centenaire Edgar Morin soutient que leGrand remplacement est plutôt celui des idées humanistes et émancipatrices par les idées suprémacistes et xénophobes.

Le Rassemblement national, d’extrême droite, est devenu en 2024 le premier parti de France ; ses chances de conquérir l’Élysée en 2027 sont réelles, sans doute avec Jordan Bardella comme candidat à la présidence, archétype du politicien réactionnaire et populiste. En Italie, le parti de Giorgia Meloni est au pouvoir depuis 2022, oscillant entre néofascisme et populisme. Elon Musk, nommé par Donald Trump à la tête du ministère de l’efficacité gouvernementale, admire Giorgia Meloni, comme il admire aussi le président argentin Javier Milei, ultralibéral et populiste au pouvoir depuis 2023. Ailleurs en Europe, l’extrême droite se positionne de mieux en mieux sur l’échiquier et devient ainsi une option politique légitime.

Le Canada de Pierre Poilievre

Les prochaines élections fédérales sont prévues au plus tard le 20 octobre 2025, mais elles seront tenues sans doute ce printemps avec un nouveau chef du côté du PLC. L’improbable n’est pas impossible, mais il semble qu’une lutte se dessine entre le PLC, dont le chef actuel Justin Trudeau est qualifié « d’insupportable abruti » par Elon Musk en décembre 2024 (Elon Musk a aussi la citoyenneté canadienne, sa mère étant née au Canada), et Pierre Poilievre du PCC, favori du milliardaire en raison de leurs affinités libertariennes et de la guerre commune qu’ils livrent contre le wokisme dont Justin Trudeau est l’incarnation. À ce moment-ci, net avantage Poilievre, selon les sondages. Et il n’est pas impossible que le Bloc Québécois forme l’opposition officielle.

Qualifié par les stratèges libéraux de « Trump du Nord », Pierre Poilievre n’a tout de même pas la trempe de Trump, mais il se révèle efficace sur le plan de la communication (il a exercé la fonction d’expert-conseil en communications). Adopté enfant par une famille fransaskoise, il maîtrise suffisamment bien le français pour rallier les francophones autant que les anglophones. C’est le candidat chouchou de la radio-poubelle de Québec qui mène au quotidien une croisade réactionnaire inspirée par le modèle de l’Amérique trumpiste. Plutôt nuancé sur le plan social (il est pro-choix et il soutient le mariage entre conjoints de même sexe), il est néanmoins proche de la droite libertarienne qui, sur le plan des valeurs, accorde la priorité absolue à la liberté individuelle au détriment des droits collectifs.

En 2020, Pierre Poilievre a hébergé sur son site parlementaire une pétition visant à dénoncer la Grande réinitialisation, qui s’avère en fait une théorie du complot selon laquelle une élite mondiale, dont Justin Trudeau ferait partie, se livrerait à un plan socialiste et écologiste de contrôle des populations grâce aux mesures déployées lors de la crise sanitaire et l’installation des infrastructures de cinquième génération (5G) des normes de téléphonie. Il a appuyé le convoi de la liberté en 2022, ce carnaval réunissant à Ottawa des milliers de complotistes, d’antivax, d’antisystème et de suprémacistes blancs venus réclamer la démission de Justin Trudeau. Il est pro-pétrole, il s’oppose aux mesures climatiques déjà en vigueur, il promet d’abolir la tarification sur la pollution des entreprises, les normes sur les carburants propres et les plafonds sur les émissions des secteurs du pétrole et du gaz. Il prône une réduction drastique des services publics et promet de mettre la hache dans le financement public de CBC/Radio-Canada, selon lui instruments des wokes et de propagande du Parti libéral. Ce sont là des mots, mais aussi des engagements inscrits au programme du PCC. Or, malgré une fausse impression largement répandue, les gouvernements occidentaux respectent leurs promesses électorales dans une très grande proportion, sauf celles liées aux cibles environnementales et climatiques. Un gouvernement majoritaire du PCC mettrait en œuvre ses engagements.

Le Québec de François Legault

Le demi-pays du Québec est sous la gouverne de la CAQ, en mode fin de régime, ce qui suggère que les tendances observées sont susceptibles de s’accentuer en 2025. Le soutien au parti est en chute libre, passant de 41 % en octobre 2022 à 24 % en décembre 2024. Le premier ministre ne s’identifie pas à la droite, mais sur le plan économique, la CAQ campe résolument à droite. François Legault reconnaît comme valeur phare la vertu entrepreneuriale. Lui-même entrepreneur et self-made-man, il se présente comme un premier ministre économique. Cependant, son bilan à ce chapitre est peu reluisant : ayant hérité d’une situation budgétaire avantageuse (en 2018, le Québec enregistre un excédent budgétaire permettant de rembourser 10 milliards de dette), il se retrouve à l’aube de 2025 à improviser des mesures d’austérité. Comme il le dit à la blague, il aurait besoin d’une boussole (pour s’orienter) et d’une batterie (pour se dynamiser), mais ajoutons à cela qu’il lui faudrait aussi développer une sensibilité aux besoins de la population, et pas seulement aux intérêts de ses amis de la Chambre de commerce.

Sur le plan social, le système de santé connaît des ratés importants et le système d’éducation est en pleine déconstruction. Niant l’existence du racisme systémique, la CAQ y participe par ailleurs activement en associant à la présence de personnes immigrées les problèmes d’accès au logement, aux services de santé, aux classes de maternelle 4 ans… « 100 % du problème du logement vient de l’augmentation du nombre d’immigrants temporaires », clame François Legault en juin 2024. On se souvient aussi de la déclaration du ministre de l’Immigration Jean Boulet indiquant que « 80 % des immigrants s’en vont à Montréal, ne travaillent pas, ne parlent pas français ou n’adhèrent pas aux valeurs de la société québécoise ». Des chiffres qui ne reposent sur aucune étude, des propos qui ne sont fondés sur aucun fait, sinon des faits alternatifs, selon le vocabulaire trumpiste consacré. La stratégie du bouc émissaire est utilisée à profusion par le gouvernement de la CAQ, lui permettant de se déresponsabiliser. Quand un problème se pose, l’Autre en est responsable.

Les élections du 5 octobre 2026 sont encore loin, mais des tendances se dessinent. Le PQ de Paul St-Pierre Plamondon se retrouve en situation avantageuse, mais demeurer en tête pendant presque deux ans tiendrait de l’exploit. D’autant qu’il est assez facile de mettre le chef du PQ devant certaines contradictions, des propos tenus par lui il y a quelques années et qui contredisent ceux tenus maintenant. Les pelures de banane jonchent aussi le parquet de l’Assemblée nationale. Le PQ doit également s’affranchir d’une aile radicale, les nationalistes identitaires purs et durs. Chez QS, la tension s’articule plutôt entre l’option d’un parti de gouvernement et celle d’un parti centré sur les valeurs fondatrices. Gabriel Nadeau-Dubois incarne la première option et il se comporte comme un politicien de carrière. On peut ou non apprécier Catherine Dorion, mais son ouvrage Les têtes brulées met le doigt sur les causes des tensions : pourquoi militer pour un parti si ses valeurs cardinales sont inféodées à des stratégies électorales visant à élargir l’électorat pour accéder au pouvoir, rejoignant ainsi l’extrême-centre, c’est-à-dire l’extrême-rien, l’extrême in-signifiance. Il ne faut pas non plus enterrer le PLQ, d’autant qu’un chef comme Pablo Rodriguez pourrait rallumer la flamme libérale, mise en veilleuse depuis 2018. Les idées promues par Éric Duhaime du PCQ sont dans l’air du temps : conservatisme et populisme mâtinés de complotisme et d’une bonne dose de la philosophie du regretté Elvis Gratton : « Ils l’ont l’affaire les Amaricains. » Entendons par là les vrais « Amaricains », ceux et celles du monde de Donald Trump.

POUR UNE POLITIQUE CULTURELLE

                                    « La culture est ce qui différencie un être humain d’une cafetière »

Tristan Tzara

L’automne dernier, le Front commun pour les arts a réussi à fédérer l’ensemble des milieux artistiques et culturels, comme le Mouvement pour les arts et les lettres (MAL) l’avait fait au tournant du siècle, pour réclamer un meilleur soutien à un secteur culturel en proie à de très graves difficultés financières. Il demande une augmentation du budget du CALQ de 40 millions et sa pérennisation, afin que les organismes culturels puissent se projeter à long terme ainsi que l’indexation des subventions au coût de la vie, eu égard à l’inflation galopante. Depuis, un concert de nouvelles catastrophiques se fait entendre sur la place publique : réduction des programmations, mises à pied de personnel, risque de fermetures et faillites. Rien pour améliorer les conditions déjà extrêmement précaires des artistes et des travailleurs et travailleuses du secteur. Rien pour redresser les finances des organismes dont 57% traînent des déficits accumulés structurels. Comment s’en étonner quand on constate que les budgets du CALQ affectés aux subventions aux organismes et aux bourses aux artistes sont passés de 224 millions à 170 millions entre 2020 et 2025. En cinq ans, ces budgets ont été amputés de 54 millions! Le milieu culturel et les artistes ont raison d’être en colère.

Lors de la dernière évaluation nationale des organismes soutenus à la mission par le CALQ, très peu ont reçu des augmentations, elles-mêmes bien en-deçà de leurs besoins, et les subventions de la très grande majorité ont été maintenues au niveau de l’évaluation nationale de 2017-2018, ce qui équivaut à des coupures, compte tenu de l’inflation. Quelques organismes ont vu leur subvention réduite et d’autres ont perdu leur reconnaissance pour être soutenus à la mission et doivent maintenant déposer leur demande d’aide pour des projets, ce qui met en danger leur pérennité. Les enveloppes réservées pour soutenir les projets de création et les bourses aux artistes ne répondent plus qu’à environ 17% des demandes, alors qu’il y a 25 ans, le taux de réponses positives étaient plutôt de l’ordre de 30%. 

La situation des artistes et des organismes culturels en régions ne fait pas exception. Des organismes réduisent leur nombre d’activités ou de créations; des lieux culturels limitent leurs heures d’ouverture au public et réduisent les heures de travail de leur personnel; des organismes jettent la serviette et ferment leur porte. Quand un organisme ferme en régions, c’est plus lourd de conséquence que dans un grand centre urbain car souvent, il est le seul actif dans sa discipline sur le terrain.

Oui, le milieu culturel et les artistes sont en colère. Oui, ils sont justifiés de porter ces revendications devant l’État québécois. Pas étonnant que de plus en plus d’entre eux quittent la profession. De plus, la situation de notre culture est particulièrement fragile à l’ère des GAFAM. Pour ne pas mettre en danger davantage notre identité nationale, il est urgent de positionner politiquement notre culture et de la soutenir adéquatement. Il est temps de définir quel rôle l’État québécois doit jouer pour que nos artistes puissent créer décemment, pour que le peuple québécois puisse avoir un réel accès aux œuvres créées et à la culture.

Malgré toutes les politiques culturelles que le Québec s’est données, malgré certaines avancées que notre société a connues sur la question, aucun des gouvernements qui se sont succédé n’a pris véritablement au sérieux la question culturelle, n’a soutenu ses ministres responsables et ne lui a accordé les moyens réclamés. Pour s’en convaincre, il faut lire l’étude de Fernand Harvey, Histoire des politiques culturelles au Québec. 1855-1976.

Réclamer un soutien substantiel, ce n’est que justice, mais cela ne suffira pas si l’on s’en tient à cette seule revendication. Profitons du moment pour actualiser ce qui nous tient lieu de politique culturelle et revoir nos façons de faire. La tempête que nous traversons était parfaitement prévisible. Dès l’annonce du dernier budget de la CAC, il était évident que le château de cartes allait s’écrouler. En théâtre, après 7 ans sans évaluation, l’argent neuf représentait moins que les subventions pour les 2 matchs des Kings de Los Angeles au Centre Vide-et-otron. Au vu et au su de la situation déjà fragile et brinquebalante des organismes, les naufrages qui se succèdent ne sont que l’éloquente démonstration de la cécité et de l’indifférence étatique.

Nous estimons que le milieu culturel doit impérativement tenir une réflexion approfondie, qui doit aller bien au-delà de la hauteur du financement. Peu importe la forme que doit prendre cette réflexion : Sommet, États-généraux, tables sectorielles, on ne peut faire l’économie de tout mettre à plat et de revoir de fond en comble un modèle à bout de souffle.

Voyez notre pm et ses ministres s’époumonner à répéter que les budgets de la Santé et de l’Éducation ont été augmenté de 50% depuis 6 ans. Et c’est vrai. En voyons-nous les résultats probants? Tout s’écroule de partout. Le système bureaucratique, entre néo-libéralisme et technocratie étatique soviétique soft, n’est plus réformable. Le ventre mou de la lente bête continuera à prospérer. Le même sort guette la Culture si nous n’avons pas l’audace, la volonté et le courage de revoir nos façons de faire. Si nous nous en tenons à réclamer toujours plus de crédits, sans revoir le modèle, nous aboutirons au même résultat.

Le MCC et ses dépendances étant de plus petits mammouths, il est possible, si nos organismes de représentation consentent à s’élever au-dessus de leur corporatisme, d’aboutir enfin à une véritable politique culturelle, cette promesse non-tenue de la Révolution tranquille. Certes, l’État québécois a joué un rôle non négligeable dans le développement culturel tous azimuts. De grandes avancées ont été réalisées, mais quid d’objectifs mesurables dans le temps? Tout se fait à la pièce, en accompagnant au mieux des initiatives locales. C’est éminemment louable, mais bien insuffisant. Beaucoup de voilure, pas de gouvernail.

Ou bien alors, l’État veut des musées partout, au mépris de l’écologie patiemment construite des milieux. Politique politicienne. Une politique culturelle devrait fixer des objectifs de développement et déterminer, avec les intéressés, où l’on veut arriver pour les 20 prochaines années. Avec comme point focal la démocratisation. Et pour les artistes, ça presse, il faut impérativement un filet de protection sociale à l’avenant.

Notre milieu doit, entre autres, se pencher sur la fréquentation culturelle des moins de 40 ans, l’offre sans cesse exponentielle, la durée de vie des œuvres et leur circulation partout sur le territoire, le nombre d’écoles d’art, les arrières-pays oubliés, l’ouverture des lieux culturels au public et à la relève en toutes saisons, incluant celle des Fêtes, le développement et la consolidation de pôles culturels régionaux structurants. En lien avec l’Éducation, assurer tout partout, un savoir minimum artistique garanti. Et quelques autres chantiers encore, dont entendre les aspirations et les propositions des jeunes générations.

À la fin de l’exercice, le budget de la Culture devra certainement être augmenté au-delà des 40 millions revendiqués, mais les artistes, les organismes, munis de cahiers de charge, y verraient plus clair et pourrait se projeter plus loin que la prochaine semaine. Les citoyens en seraient aussi les bénéficiaires. La démocratisation culturelle se ferait concrète. Un contrat social lierait les uns et les autres pour au moins une génération.

Notre avenir comme collectivité de langue française en Amérique du Nord en dépend pour une grande part. En marge de l’Empire, dans les sombres temps que nous nous apprêtons à traverser, la petite bougie de la Culture, même vacillante, nous sera précieuse et absolument essentielle!

Eudore Belzile (Rimouski) et Jean-Guy Côté (Rouyn-Noranda), prix Sentinelle carrière CQT 2021 et 2022

Taxe de douane : une opportunité pour nos régions?

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

La guerre commerciale initiée par l’administration de Donald Trump pousse la population du Bas-Saint-Laurent à se détourner des produits américains pour se recentrer vers une production locale et canadienne, et cela même si les tarifs douaniers ont été repoussés au mois prochain. Cette situation constitue une occasion pour renforcer la solidarité envers les entreprises locales et pour valoriser les productions régionales. La région a des produits et des savoirs faire uniques, c’est la raison pour laquelle des entreprises étasuniennes se tournaient vers les articles fabriqués, par exemple, à Gaspé. Nos régions devraient alors se tourner vers tous ces savoirs et pratiques afin de les cultiver.

La culture et l’artisanat revaloriser

La culture et les savoir-faire traditionnels représentent des vecteurs essentiels de développement à la fois culturel, social et économique. L’artisanat, en particulier, joue un rôle central dans le dynamisme des territoires en contribuant à leur rayonnement. Ce secteur constitue un atout majeur, car il améliore la qualité de vie de la population en favorisant la transmission des compétences. Il renforce également la cohésion sociale et l’emploi local.

L’artisanat engendre des retombées économiques positives, notamment en matière d’emploi, de création de petites entreprises, de commerce et de tourisme. Son développement permet à la population locale d’accroître son niveau de vie sans compromettre les ressources naturelles renouvelables. Ces actifs culturels et immatériels favorisent, à long terme, un essor économique et culturel, tout en dynamisant les quartiers et en stimulant les activités touristiques.

L’amélioration de l’emploi et la multiplication des activités rémunératrices issues des métiers artisanaux – tels que la sculpture sur bois, le tissage ou la poterie – permettent de préserver et de transmettre un patrimoine précieux. De plus, l’économie circulaire et le développement durable sont au cœur des pratiques artisanales, ce qui en fait un modèle à suivre pour structurer l’économie de demain.

Dans cette dynamique, les savoir-faire artisanaux jouent un rôle crucial dans la mise en place de projets de développement local, la revitalisation des espaces urbains et la promotion touristique. Au-delà de leur impact économique, ces métiers participent également à l’affirmation d’une identité territoriale et au renforcement du lien social. Ainsi, il devient essentiel d’intégrer les ressources et compétences locales dans les stratégies d’aménagement et de développement des régions.

Cominelli, F. (2015). Repenser le développement durable : quel rôle pour les savoir-faire et les métiers d’art ? Material Culture Review, 82-83, 71–83.

Chronique du gars en mots dits: Lobotomie

Je me revois encore à l’été 2009, au moment de prendre la décision radicale de quitter Québec pour me réfugier avec ma famille dans le Bas-Saint-Laurent.

C’était une de ces soirées où le soleil déclinant rougeoyait superbement sur l’horizon. Excité, je lance à ma maisonnée : « Je pars jogger pour contempler le coucher de soleil. » Or, une heure après, à bout de souffle, je rentrais bredouille : dans ce quartier de Sainte-Foy surdensifié, près de la rue Myrand, impossible désormais de voir le soleil se coucher de nulle part. Les immeubles de plus en plus hauts avaient à jamais verrouillé les derniers points de vue des environs. En vérité, ces percées visuelles étaient toutes désormais vendues aux plus nantis, capables de se payer des logements ou des condos de plus en plus dispendieux.

Quelques jours plus tard, résignés, nous mettions notre maison en vente.

Aujourd’hui, à peine une petite quinzaine d’années plus tard, ce scénario se répète d’un bout à l’autre du Kamouraska, ma région d’adoption. De La Pocatière à Rivière-du-Loup, les dernières vues sont vendues au plus offrant; les cabourons, égrenés en chapelet le long du littoral, sont dynamités et nivelés, leur couvert végétal coupé et décapé pour y lotir des maisons sans cesse plus imposantes1, violentant des paysages qui n’avaient jamais eu jusque-là à souffrir de telles balafres.

C’est sans précédent.

La photographe et vidéaste québécoise Isabelle Hayeur a plus que quiconque éloquemment illustré et défini le phénomène contre lequel seule une véritable lobotomie saurait prémunir les plus sensibles comme moi : la solastalgia.

Ce terme emprunté au philosophe de l’environnement australien Glenn Albrecht sert à décrire la détresse causée par la disparition lente mais chronique des paramètres familiers liés à l’environnement de l’individu. Ce néologisme vient de la fusion de nostalgie et du mot anglais solace, qui renvoie au sentiment de réconfort et de soulagement. Il résume ce qui arrive quand quelqu’un voit son environnement immédiat si profondément et si rapidement transformé par les prédateurs de territoire qu’il en devient déboussolé, en perte de repères, dépassé par une brutale réalité sur laquelle il n’a absolument aucune emprise. Absolument aucune.

Ajoutez à la tristesse et au dépit de ces témoins d’une telle dépossession leur extrême lucidité à l’égard du fait que, la plupart du temps, ces destructions sont pourtant bénies par nos élus, tous paliers confondus.

Hayeur a grandi dans une petite ville de la banlieue de Montréal, au cœur d’un territoire périurbain alors en développement et qui se transformait rapidement. Hypersensible, elle en éprouvait une impression de perte de repères qui accompagne souvent la vie en banlieue. D’où une pratique artistique teintée de ses sentiments troubles d’aliénation, de déracinement et de désenchantement.

Le deuil des paysages magnétiques

Ce phénomène, présent dans toutes les régions du Québec, pénètre maintenant au cœur des parties les plus reculées de notre magnifique Bas-Saint-Laurent. L’accélération de l’emprise de l’humain sur la nature est tout simplement ahurissante. On n’a même plus le temps de s’adapter à la disparition des boisés et des vues qu’on appréciait naguère encore.

L’espace manquant de plus en plus pour réaliser les rêves infinis, des néoruraux venant de villes aux horizons obstrués ou inexistants finissent par occuper des endroits pourtant souvent zonés non constructibles. Chacun se taille dans le tuf à la fois sa place au soleil et sa vue sur le fleuve. C’est la privatisation des beautés du Kamouraska. Sous nos yeux. Mais sans notre consentement éclairé.

Si vous voulez voir ce à quoi ressemblera le littoral du Kamouraska dans quelques décennies, allez vous promener à Rivière-du-Loup. Là, chaque semaine amène son lot de coupes à blanc et d’immeubles qui poussent comme des champignons, ce dont j’ai largement parlé dans ma série « Protégez les beautés du Kamouraska2 ».

On pourrait croire que tout se passe comme si on se foutait de nos paysages. Mais en réalité, c’est faux : ce « on » exclut l’immense majorité de la population du Bas-Saint-Laurent, qui les a rivés au cœur. Mais ce sont nos élites, celles des conseils municipaux des villes et des MRC, et nos élus à Québec comme à Ottawa qui préfèrent brader cet héritage pour quelques poignées de lentilles, parce qu’ils sont animés par la vision à court terme de leur réélection tous les quatre ans. La démocratie a ceci de pervers qu’elle crée de courtes vues; pas surprenant alors que couper des vues devienne son lot quotidien.

Peut-être devrions-nous nous cotiser pour leur payer des jumelles.

En attendant, pour cesser de souffrir devant les affres des pelles et des scies mécaniques, j’irai me faire lobotomiser.

1. Kevin Beaulé, « Une maison mise en vente à plus de 2,2 millions de dollars ne passe pas inaperçue à Saint-Denis-de la Bouteillerie », Ciel FM, 24 mars 2024, https://www.ciel103.com/nouvelle/6835-une-maison-mise-en-vente-a-plus-de-2-2-millions-de-dollars-ne-passe-pas-inapercue-a-saint-denis-de-la-bouteillerie

2. Jean-François Vallée, Dossier « Protéger les beautés du Kamouraska », VIIe partie : Saint-André-de-Kamouraska : tenir tête aux prédateurs de paysages, Le Mouton Noir, 2022, https://www.moutonnoir.com/2022/11/dossier-proteger-les-beautes-du-kamouraska-viie-partie-saint-andre-de-kamouraska-tenir-tete-aux-predateurs-de-paysages/

Lobotomie

Je me revois encore à l’été 2009, au moment de prendre la décision radicale de quitter Québec pour me réfugier avec ma famille dans le Bas-Saint-Laurent.

C’était une de ces soirées où le soleil déclinant rougeoyait superbement sur l’horizon. Excité, je lance à ma maisonnée : « Je pars jogger pour contempler le coucher de soleil. » Or, une heure après, à bout de souffle, je rentrais bredouille : dans ce quartier de Sainte-Foy surdensifié, près de la rue Myrand, impossible désormais de voir le soleil se coucher de nulle part. Les immeubles de plus en plus hauts avaient à jamais verrouillé les derniers points de vue des environs. En vérité, ces percées visuelles étaient toutes désormais vendues aux plus nantis, capables de se payer des logements ou des condos de plus en plus dispendieux.

Quelques jours plus tard, résignés, nous mettions notre maison en vente.

Aujourd’hui, à peine une petite quinzaine d’années plus tard, ce scénario se répète d’un bout à l’autre du Kamouraska, ma région d’adoption. De La Pocatière à Rivière-du-Loup, les dernières vues sont vendues au plus offrant; les cabourons, égrenés en chapelet le long du littoral, sont dynamités et nivelés, leur couvert végétal coupé et décapé pour y lotir des maisons sans cesse plus imposantes1, violentant des paysages qui n’avaient jamais eu jusque-là à souffrir de telles balafres.

C’est sans précédent.

La photographe et vidéaste québécoise Isabelle Hayeur a plus que quiconque éloquemment illustré et défini le phénomène contre lequel seule une véritable lobotomie saurait prémunir les plus sensibles comme moi : la solastalgia.

Ce terme emprunté au philosophe de l’environnement australien Glenn Albrecht sert à décrire la détresse causée par la disparition lente mais chronique des paramètres familiers liés à l’environnement de l’individu. Ce néologisme vient de la fusion de nostalgie et du mot anglais solace, qui renvoie au sentiment de réconfort et de soulagement. Il résume ce qui arrive quand quelqu’un voit son environnement immédiat si profondément et si rapidement transformé par les prédateurs de territoire qu’il en devient déboussolé, en perte de repères, dépassé par une brutale réalité sur laquelle il n’a absolument aucune emprise. Absolument aucune.

Ajoutez à la tristesse et au dépit de ces témoins d’une telle dépossession leur extrême lucidité à l’égard du fait que, la plupart du temps, ces destructions sont pourtant bénies par nos élus, tous paliers confondus.

Hayeur a grandi dans une petite ville de la banlieue de Montréal, au cœur d’un territoire périurbain alors en développement et qui se transformait rapidement. Hypersensible, elle en éprouvait une impression de perte de repères qui accompagne souvent la vie en banlieue. D’où une pratique artistique teintée de ses sentiments troubles d’aliénation, de déracinement et de désenchantement.

Le deuil des paysages magnétiques

Ce phénomène, présent dans toutes les régions du Québec, pénètre maintenant au cœur des parties les plus reculées de notre magnifique Bas-Saint-Laurent. L’accélération de l’emprise de l’humain sur la nature est tout simplement ahurissante. On n’a même plus le temps de s’adapter à la disparition des boisés et des vues qu’on appréciait naguère encore.

L’espace manquant de plus en plus pour réaliser les rêves infinis, des néoruraux venant de villes aux horizons obstrués ou inexistants finissent par occuper des endroits pourtant souvent zonés non constructibles. Chacun se taille dans le tuf à la fois sa place au soleil et sa vue sur le fleuve. C’est la privatisation des beautés du Kamouraska. Sous nos yeux. Mais sans notre consentement éclairé.

Si vous voulez voir ce à quoi ressemblera le littoral du Kamouraska dans quelques décennies, allez vous promener à Rivière-du-Loup. Là, chaque semaine amène son lot de coupes à blanc et d’immeubles qui poussent comme des champignons, ce dont j’ai largement parlé dans ma série « Protégez les beautés du Kamouraska2 ».

On pourrait croire que tout se passe comme si on se foutait de nos paysages. Mais en réalité, c’est faux : ce « on » exclut l’immense majorité de la population du Bas-Saint-Laurent, qui les a rivés au cœur. Mais ce sont nos élites, celles des conseils municipaux des villes et des MRC, et nos élus à Québec comme à Ottawa qui préfèrent brader cet héritage pour quelques poignées de lentilles, parce qu’ils sont animés par la vision à court terme de leur réélection tous les quatre ans. La démocratie a ceci de pervers qu’elle crée de courtes vues; pas surprenant alors que couper des vues devienne son lot quotidien.

Peut-être devrions-nous nous cotiser pour leur payer des jumelles.

En attendant, pour cesser de souffrir devant les affres des pelles et des scies mécaniques, j’irai me faire lobotomiser.

1. Kevin Beaulé, « Une maison mise en vente à plus de 2,2 millions de dollars ne passe pas inaperçue à Saint-Denis-de la Bouteillerie », Ciel FM, 24 mars 2024, https://www.ciel103.com/nouvelle/6835-une-maison-mise-en-vente-a-plus-de-2-2-millions-de-dollars-ne-passe-pas-inapercue-a-saint-denis-de-la-bouteillerie

2. Jean-François Vallée, Dossier « Protéger les beautés du Kamouraska », VIIe partie : Saint-André-de-Kamouraska : tenir tête aux prédateurs de paysages, Le Mouton Noir, 2022, https://www.moutonnoir.com/2022/11/dossier-proteger-les-beautes-du-kamouraska-viie-partie-saint-andre-de-kamouraska-tenir-tete-aux-predateurs-de-paysages/

L’Outillerie à Rimouski lance un appel à la solidarité

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Depuis son ouverture à l’été 2023, l’Outillerie Rimouski s’est imposée comme un acteur incontournable du partage et de la mise en commun des ressources à Rimouski. Cette bibliothèque d’objets permet aux citoyens d’accéder à une grande variété d’outils, allant du matériel de rénovation aux articles de cuisine, favorisant ainsi la réduction de la surconsommation. Cependant, pour assurer sa pérennité, l’organisme lance un appel à la communauté.

Un besoin crucial de soutien financier

Malgré un fort engouement et une participation active des citoyens, l’Outillerie Rimouski peine à couvrir ses coûts de fonctionnement. L’organisme à but non lucratif, géré entièrement par des bénévoles, a besoin de plusieurs dizaines de milliers de dollars par an pour continuer d’exister.

« Un projet innovateur comme le nôtre ne peut pas devenir rentable en quelques mois, explique Aurélie Chagnon-Lafortune, membre du conseil d’administration. Pour assurer sa pérennité, nous avons besoin de l’implication de bénévoles, mais aussi d’une injection de fonds jusqu’à ce que les abonnements et les ateliers génèrent suffisamment de revenus. »

Une campagne de financement pour mobiliser la communauté

Face à cette situation, l’Outillerie Rimouski lance la campagne « Je soutiens notre Outillerie », offrant plusieurs moyens d’appuyer la mission de l’organisme. Les citoyens peuvent contribuer de diverses façons :

  • Devenir bénévole pour aider à la gestion et aux activités de la bibliothèque d’objets.
  • Donner un atelier pour partager leurs connaissances et savoir-faire.
  • S’abonner pour bénéficier des services de prêt d’objets.
  • Faire un don, ponctuel ou mensuel, via le site officiel outillerierimouski.ca/contribuer.

Un lieu de partage et d’apprentissage

Au-delà du simple prêt d’objets, l’Outillerie Rimouski se veut être un véritable lieu de rencontre et de transmission des savoir-faire manuels. En organisant des ateliers et en mettant à disposition du matériel pour divers projets, elle contribue à renforcer le tissu social et à promouvoir un mode de consommation plus responsable.

Aujourd’hui, plus que jamais, la survie de cette initiative repose sur la solidarité de la communauté. En s’engageant aux côtés de l’Outillerie, chaque citoyen peut jouer un rôle essentiel dans la construction d’un modèle plus durable et collaboratif.

Pour en savoir plus et contribuer : outillerierimouski.ca/contribuer.

Attention à la montée du « fascisme tranquille »

Peu d’entre nous osent en parler ouvertement, mais le fascisme est déjà parmi nous… même au Québec. Je ne parle pas ici d’un régime autoritaire ou totalitaire, au même titre que Mathieu Bock-Côté qui considère que l’« empire du politiquement correct » serait aujourd’hui transformé en « totalitarisme sans goulag ». Le gouvernement Legault incarne davantage un nationalisme conservateur misant sur un populisme de droite pour brandir la menace imminente des hordes d’immigrants, des islamistes et des wokes.

Non, le « fascisme tranquille » dont il est question se loge davantage dans le « climat culturel », les mœurs, les mentalités et les attitudes d’une partie de la population. Comme l’ont bien remarqué Gilles Deleuze, Félix Guattari et Michel Foucault, il peut exister un « désir fasciste » croupi dans l’atmosphère de l’époque sans qu’un parti d’extrême droite soit directement au pouvoir. « Le fascisme qui est en nous, qui hante nos esprits et nos conduites quotidiennes, le fascisme qui nous fait aimer le pouvoir, désirer cette chose même qui nous domine et nous exploite1. »

Or, le mot « fascisme » n’est-il pas inapproprié ou exagéré, celui-ci étant souvent utilisé comme une insulte ou une étiquette pour discréditer l’autre? Bien que ce terme soit souvent utilisé à tort et à travers, il serait réducteur de l’associer à une simple accusation visant à faire taire son interlocuteur. Si on éradique le « mot en f » du vocabulaire, comment pourra-t-on comprendre l’histoire du XXe siècle, et les mouvements qui reproduisent cette logique aujourd’hui?

Prenons quelques exemples. Donald Trump vient de remporter l’élection présidentielle avec un programme et un discours beaucoup plus radicaux et autoritaires qu’au moment de son premier mandat. Trump ne se réclame pas lui-même du fascisme, tout comme Marine Le Pen et Éric Zemmour répudient le terme « extrême droite » en France. Outre Kamala Harris qui a accusé Trump d’être « fasciste » durant la campagne, nous devons aller voir du côté du grand politologue et historien du fascisme, Robert O. Paxton, qui a longtemps hésité à utiliser cette étiquette pour désigner Trump.

Durant son premier mandat, Paxton utilisait l’expression « populiste de droite » pour caractériser Trump, mais il s’est ravisé après l’insurrection ratée du Capitole en janvier 2021. « Son encouragement ouvert à la violence civique pour renverser une élection franchit une ligne rouge. L’étiquette [fasciste] semble désormais non seulement acceptable, mais nécessaire2. » Dans son livre Anatomy of Fascism (2024), Paxton souligne que ce phénomène politique est un processus qui n’apparaît pas subitement, mais se développe progressivement en cinq phases : 1) émergence ; 2) enracinement ; 3) prise du pouvoir ; 4) exercice du pouvoir ; 5) radicalisation ou entropie3. Si les régimes de Hitler ou de Mussolini ont atteint le stade 5 dans les années 1930, les États-Unis viennent de basculer au troisième stade. Il faudra attendre les premières mesures de la nouvelle administration Trump pour voir si les États-Unis quitteront le terrain de la démocratie libérale vers un nouveau régime hybride ou carrément autoritaire.

Qu’en est-il de la situation politique au Québec? Nous sommes probablement rendus à la phase 2, soit l’enracinement des idées autoritaires, populistes, anti-démocratiques et réactionnaires au sein de plus larges secteurs de la population. Cela peut sembler contre-intuitif à première vue, car les organisations classées à l’« extrême droite » de l’échiquier politique semblent relativement marginales au Québec. Cela dit, il faut préciser la signification du terme d’extrême droite. Selon le politologue Cas Mudde, cette famille politique inclut deux sous-catégories4. D’un côté, la droite extrémiste (extreme right) rejette carrément les règles de la démocratie parlementaire. En ce sens, les groupes d’obédience néofasciste ou néonazie sont très minoritaires au Québec.

Cela dit, l’autre catégorie est la droite radicale populiste (populist radical right) qui accepte le jeu électoral, mais conteste les institutions et les valeurs de la démocratie libérale comme les droits des minorités, l’égalité sociale et la séparation des pouvoirs. Dans cette catégorie, on peut situer des figures comme Viktor Orbán (Hongrie), Jordan Bardella (France), Georgia Meloni (Italie), ou encore Donald Trump. C’est ici qu’on peut tracer plusieurs parallèles avec la situation politique au Québec, car notre espace public est traversé par des polémiques, discours, récits et solutions qui circulent largement entre les États-Unis, la France et notre coin de pays.

La guerre au wokisme, la lutte contre la « submersion migratoire », la résurgence des discours anti-féministes et des « mâles alpha », la volonté de rétablir une identité nationale perdue et des valeurs traditionnelles, les paniques morales autour des drag queens, des toilettes mixtes et des personnes trans, tout cela alimente les mouvements populistes de droite radicale. Des leaders d’opinion influents comme Mathieu Bock-Côté importent et exportent des polémiques des deux côtés de l’Atlantique, en faisant l’éloge d’Éric Zemmour comme un « admirable dissident »5.

Autrement dit, nous assistons aujourd’hui à un brouillage des frontières entre la droite conservatrice classique et l’extrême droite. La radicalisation du nationalisme identitaire au Québec, que ce soit par des politiciens ou des chroniqueurs qui soutiennent, minimisent ou banalisent le discours de Trump, est un symptôme que le « populisme conservateur » est sur le point ou est déjà en train de muter vers un nouveau stade de son développement.

Or, il faut tenir compte du fait que la vie politique québécoise est moins marquée par les « extrêmes » que d’autres pays. Même notre « Révolution tranquille » fut une métamorphose profonde de la société sur le plan politique et culturel sans qu’il y ait eu de rupture brusque ou violente. Il en va de même aussi pour la période actuelle marquée par le retour du « duplessisme national-conservateur » qui reprend les mêmes thématiques que Trump ou le Rassemblement national en France, mais sous une forme plus adoucie, tranquille ou « modérée ».

Enfin, l’enracinement du fascisme tranquille se situe surtout sur le terrain de l’espace public numérique, influencé par les dynamiques liées à la propagande en ligne, la désinformation, la fragmentation, les chambres d’écho et les boucles de rétroaction algorithmiques. Si la gauche et les mouvements sociaux progressistes ont longtemps su utiliser les médias sociaux à leur avantage, c’est maintenant les groupes d’extrême droite et les dirigeants autoritaires qui ont pris leur revanche depuis une dizaine d’années. Pour que le fascisme prenne le pouvoir par les urnes, il faut d’abord qu’il ait conquis les cœurs et les esprits via la bataille des idées ou la guerre pour « l’hégémonie culturelle », comme l’avait bien compris Antonio Gramsci un siècle plus tôt, lorsqu’il fut mis en prison par les fascistes en 1926.

Avant que le fascisme n’apparaisse au grand jour dans toute sa fougue destructrice, il faut donc étudier les rouages de la « personnalité autoritaire » et examiner les manières dont les discours de l’extrême droite circulent au sein des médias traditionnels ou de l’espace public numérique. Le fascisme n’arrive pas soudainement au pouvoir comme le lapin d’un chapeau de magicien. Il faut bien qu’il passe par une série d’étapes intermédiaires, de couches successives de radicalisation.

[1] Michel Foucault, « Préface », 1977, dans Dits et écrits, tome II, Gallimard, 2001, texte 189, p. 134.

2. Robert O. Paxton, “I’ve Hesitated to Call Donald Trump a Fascist. Until Now”, Newsweek, 11 janvier 2021. (notre traduction)

3. Robert O. Paxton, Anatomy of Fascism, Alfred A. Knopf, 2004.

4. Cas Muddee, Populist radical right parties in Europe, Cambridge University Press, 2007; Cas Mudde, The Far Right Today,Polity Press, 2019.

5. Mathieu Bock-Côté, Le nouveau régime. Essais sur les enjeux démocratiques actuels, Boréal, 2017, p. 254-288.

Une formation unique au Québec : L’Écologie Intégrée pour une transition socio-écologique inspirante

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

L’Écologie intégrée, une approche novatrice en éducation alternative, fait son entrée au Québec avec une formation véritablement unique. Ce programme, conçu par Jean Bédard et Isabelle Fortier, propose aux participants de redonner du sens à leur parcours de vie tout en stimulant un engagement concret envers la transition socio-écologique.

Un programme pensé pour l’humain et l’écologie

La formation en écologie intégrée a vu le jour sous l’impulsion de deux figures influentes : Jean Bédard, auteur et philosophe de renom, également fondateur de la FUSA Sageterre, la première fiducie utilitaire sociale agricole du Québec ; et Isabelle Fortier, praticienne en écopsychologie et thérapeute corporelle, fondatrice de l’organisme Égo/Éco. Leur vision commune est simple : créer une éducation alternative qui aide les personnes à trouver leur place dans la transition écologique tout en développant des compétences pratiques et une conscience profonde des enjeux environnementaux.

Une offre hybride et flexible

La formation se déroule sur une période de deux ans, en mode hybride, permettant ainsi aux participant.es de concilier cet apprentissage avec d’autres engagements, comme un emploi ou des études. Avec un total de 355 heures de cours, réparties entre des théories et des pratiques variées, cette formation offre une expérience immersive et transformante.

Un contenu multidisciplinaire et inspirant

Ce programme s’articule autour de plusieurs axes complémentaires, intégrant des savoirs issus de diverses disciplines :

  • Philosophie, pour nourrir une réflexion profonde sur notre rapport au monde.
  • Écopsychologie, pour explorer la connexion entre l’humain et la nature.
  • Expression corporelle et artistique, pour permettre une approche sensorielle et créative.
  • Immersion dans la nature, pour reconnecter les participants à leur environnement naturel.

Ces différentes approches sont fusionnées pour offrir un enseignement riche et stimulant, qui va bien au-delà des simples connaissances théoriques. Les participants seront invités à agir, à réfléchir et à expérimenter pour concrétiser une vision d’équilibre écologique.

Des stages d’immersion pour vivre l’expérience sur le terrain

Outre les cours théoriques, la formation prévoit 9 stages d’immersion en présence, qui permettent aux participants de vivre pleinement les concepts appris, en interaction directe avec la nature et des projets concrets. Ces stages sont essentiels pour approfondir la compréhension des enjeux écologiques tout en renforçant les liens avec d’autres individus engagés dans la transition socio-écologique.

Pourquoi cette formation est un véritable tournant

L’Écologie intégrée n’est pas simplement un programme de formation, mais une véritable invitation à repenser notre relation à la nature et à notre rôle dans la transition écologique. Elle incarne une approche alternative à l’éducation traditionnelle, où l’engagement personnel, la créativité, et l’action sont au cœur du processus d’apprentissage.

Cette formation est idéale pour les personnes qui souhaitent prendre part activement à la construction d’un avenir plus respectueux de l’environnement, tout en se reconnectant avec leurs valeurs profondes et leur place dans le monde.

Une première cohorte et une nouvelle rentrée en avril

Alors que la première cohorte de cette formation arrive à son terme, l’ouverture de la prochaine session est déjà annoncée pour avril. Les personnes intéressées ont donc l’opportunité de rejoindre cette aventure humaine et éducative passionnante dès le printemps prochain.

Conclusion : un programme pour l’avenir

L’Écologie intégrée, portée par Jean Bédard et Isabelle Fortier, offre une vision novatrice et inspirante pour les personnes du Québec, un véritable levier pour la transition socio-écologique. En unissant théorie et pratique, éducation et action, cette formation est bien plus qu’un simple apprentissage : elle est une invitation à transformer notre monde et à agir de manière concrète pour un avenir plus harmonieux avec la nature.

Accueil de la petite enfance et précarité : une problématique persistante

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Dans le Bas-Saint-Laurent, dix centres de la petite enfance (CPE) ont entamé une grève de cinq jours au cours de la semaine du 19 janvier. Ce mouvement revendicatif porte principalement sur la nécessité d’un allégement de la charge de travail des éducatrices ainsi qu’une meilleure définition des ratios afin de garantir un équilibre adéquat entre le nombre d’enfants et les professionnels responsables. Par ailleurs, malgré les engagements pris en 2021 par le gouvernement du Québec pour créer 37 000 places subventionnées d’ici mars 2025, le ministère de la Famille assure être en bonne voie pour atteindre cet objectif avant l’échéance prévue.

Les conséquences de la précarité sur la petite enfance

La précarité durant la petite enfance a des répercussions profondes sur le développement cognitif, la réussite scolaire et l’insertion sociale et professionnelle. Les jeunes enfants issus de milieux défavorisés sont particulièrement vulnérables, et l’impact de la pauvreté se révèle plus marqué lorsqu’elle survient dès les premières années de vie. Offrir des solutions d’accueil adaptées ne constitue pas seulement un soutien aux familles dans la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, mais c’est aussi un levier essentiel dans la lutte contre l’exclusion sociale (Bouyala et Roussille, 1982).

Un accès inégal aux services de garde

Une large proportion des enfants de moins de trois ans est gardée soit par leurs parents, soit par des proches à titre gratuit. Cette situation soulève des interrogations sur l’accessibilité des services d’accueil, en particulier pour les familles aux ressources limitées. Le revenu parental joue un rôle déterminant dans le choix et l’accès aux structures de garde, et les inégalités se creusent en fonction des moyens financiers disponibles. Ainsi, les familles les plus modestes voient leurs options restreintes, et le développement des solutions de garde ne semble pas encore répondre à une logique de redistribution équitable.

L’impact de la configuration familiale

L’accès aux services d’accueil ne dépend pas uniquement des ressources financières, mais aussi de la configuration familiale. Les parents de jeunes enfants, et plus particulièrement les mères, se retrouvent souvent contraints de quitter leur emploi faute de solutions de garde accessibles et abordables. De plus, le nombre d’enfants à charge influence directement le recours ou non aux structures d’accueil.

Des horaires de travail contraignants

Les conditions de travail des parents jouent également un rôle dans ces inégalités. Les ouvriers et employés, dont les horaires sont souvent imposés par l’employeur et marqués par des rythmes fluctuants, rencontrent des difficultés accrues pour trouver une garde adaptée. Les horaires atypiques ou imprévisibles rendent complexe le recours aux structures d’accueil classiques, même lorsque celles-ci adaptent leurs plages horaires. La nécessité de combiner plusieurs solutions de garde pour assurer une prise en charge stable et cohérente devient alors une contrainte supplémentaire pour ces familles.

Un isolement social renforcé

Enfin, les enfants issus de milieux précaires évoluent souvent dans un cadre où les liens sociaux sont plus faibles. Leurs parents sont davantage isolés, voient moins souvent leur famille et leurs amis, et participent moins aux activités culturelles et associatives. Face à cette réalité, la faible implication des politiques publiques en faveur de la petite enfance dans les milieux défavorisés suscite des interrogations. L’accueil et l’éducation des jeunes enfants ne relèvent plus uniquement de la sphère privée, mais constituent un enjeu sociétal majeur qui requiert une attention accrue de la part des pouvoirs publics.

Source

Boyer, Danielle. « Modes d’accueil de la petite enfance et précarité ». Empan, 2005/4 no 60, 2005. p.91-100. CAIRN.INFO, shs.cairn.info/revue-empan-2005-4-page-91?lang=fr.

Une tournée de soupes populaires pour réfléchir à l’A20

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Un collectif citoyen dénommé À la soupe ! lance une série d’événements conviviaux où la discussion et la réflexion sur le prolongement de l’autoroute 20 seront au menu. Et quoi de mieux qu’un bol de soupe chaude et gratuite pour rassembler la population autour de ces enjeux ?

Le premier rendez-vous est fixé au dimanche 9 février à la Coop Paradis à Rimouski, dans le cadre de la Semaine rimouskoise de l’environnement. La tournée se poursuivra dans plusieurs municipalités situées le long de la route 132, notamment St-Fabien le 9 mars, Trois-Pistoles le 13 avril, St-Simon le 4 mai et Notre-Dame-des-Neiges à la fin juin.

Un espace de dialogue pour la population

Derrière cette initiative, une volonté claire : offrir un lieu d’échange sur les conséquences sociales, économiques et environnementales du prolongement de l’autoroute 20. Lysane Picker-Paquin, membre du collectif, explique : « nous croyons que les populations locales sont les mieux placées pour expliquer leurs enjeux et trouver des solutions. Avec cette tournée, on souhaite offrir un espace de discussion et permettre aux gens de rêver à mieux, ensemble. »

Au programme de chaque rencontre : des kiosques d’information, des consultations citoyennes et des ateliers de création. L’objectif est d’informer sur le projet d’infrastructure tout en favorisant l’expression des idées et des alternatives pour sécuriser la 132 et améliorer le transport collectif régional.

Une approche artistique et environnementale

En plus des discussions, la tournée mettra en lumière la richesse environnementale de la région. Amélie Bureau, une autre membre du collectif, souligne : « nous voulons mettre de l’avant les alternatives au prolongement de la 20 pour améliorer la sécurité routière dans la région… mais aussi la beauté du territoire que nous souhaitons protéger. » Pour illustrer cet enjeu, des photographies des rivières touchées par le projet seront exposées, et chaque événement inclura une création artistique éphémère inspirée de la nature.

Les familles sont chaleureusement invitées, avec un espace dédié aux enfants prévu sur place. Pour plus d’informations sur la première tablée, rendez-vous sur l’événement Facebook : https://www.facebook.com/events/449779771526618.

Découvrir le zine : Une immersion dans la réalité congolaise avec Ange Made

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le 19 février 2025, aux Bains publics, un événement unique mettra en lumière la situation politique, économique, sociale et sanitaire de la République démocratique du Congo (RDC) à travers un échange poignant avec l’artiste multidisciplinaire Ange Made. De 18 h à 20 h, l’animateur et son invité offriront un dialogue enrichissant, ancré dans le témoignage personnel de l’artiste.

Un témoignage puissant et inspirant

Fils de réfugiés et d’immigrants congolais, Ange Made a traversé de nombreux pays avant de poser ses valises au Canada. Son parcours d’exil l’a mené de la République Centrafricaine au Tchad, en passant par le Niger, la Libye et le Bénin, avant d’être accueillé à Moncton, puis à Toronto, à Québec et enfin à Rimouski. Ce voyage, marqué par l’errance et la résilience, nourrit son art et sa vision du monde.

Cet événement sera l’occasion de découvrir son cheminement artistique, d’explorer les thématiques qui l’inspirent et d’en apprendre davantage sur ses aspirations et projets futurs.

Le zine : un cri d’alarme sur la situation en RDC

Distribué gratuitement lors de la soirée, ce zine propose une immersion au cœur des réalités alarmantes que traverse la RDC. La population est confrontée à des problématiques majeures de santé et de salubrité publique, aggravées par les changements climatiques.

Dans l’Est du pays, la précarité matérielle se conjugue aux ravages d’une guerre persistante, poussant de nombreuses familles à l’exil. Le zine donne écho à ces réalités souvent méconnues, mettant en avant des témoignages et des analyses essentielles pour mieux comprendre les enjeux auxquels fait face la population congolaise.

Un événement à ne pas manquer

Cette soirée sera une opportunité unique d’échanger avec un artiste dont le parcours et les créations résonnent avec les thématiques de migration, de résilience et d’engagement social. Venez découvrir le travail d’Ange Made et repartez avec un zine qui témoigne d’une situation trop souvent ignorée.

Entrée libre – Venez nombreux !

Imaginer un avenir désirable pour la MRC

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

La Collectivité ZéN (Zéro Émission Nette) de Rimouski-Neigette annonce avec enthousiasme l’ouverture de ses ateliers d’exploration du futur. Ces ateliers gratuits visent à rassembler la population et des organisations autour d’une activité ludique et participative, dans le but de concevoir un avenir désirable pour le territoire de la MRC, après la réalisation de la transition socio-écologique. En utilisant une méthode d’animation innovante, le codesign prospectif, ces ateliers permettent aux participants de se plonger dans différents scénarios futurs afin de définir collectivement le modèle le plus souhaitable pour la région. Pour faire simple, c’est imaginer le futur par la science-fiction.

Les ateliers se basent sur des scénarios contrastés, présentés sous forme de récits mettant en scène des personnages, qui servent de point de départ pour des débats constructifs sur les futurs possibles de la MRC.

Ces activités, alliant créativité et rigueur scientifique, permettront aux participants d’explorer divers chemins d’avenir et de discuter des enjeux sociétaux, environnementaux et économiques qui façonneront la transition vers un monde plus durable. La science-fiction semble alors être un outil très puissant pour passer de l’imagination à une concrétisation. Nous allons donc regarder pourquoi cette forme de littérature permet une telle prouesse.

La science-fiction comme outil d’innovation et d’anticipation

La science-fiction, souvent vue comme un genre littéraire marginal, joue un rôle clé dans cette démarche d’exploration du futur. Pendant longtemps, elle a été dépréciée par les milieux intellectuels traditionnels, jugée immature et purement divertissante. Cependant, au fil du temps, elle a gagné en reconnaissance en tant qu’outil puissant pour imaginer des avancées technologiques et sociétales avant-gardistes.

De nombreuses innovations modernes, telles que le sous-marin, l’hélicoptère, Internet ou encore le téléphone portable, ont été imaginées dans des récits de science-fiction bien avant leur concrétisation. Aujourd’hui, cette forme littéraire est utilisée non seulement pour divertir, mais aussi pour réfléchir aux interactions complexes entre technologies émergentes et transformations sociales. De plus en plus de chercheureuses et d’entreprises utilisent la science-fiction comme un moyen de tester des idées dans des contextes imaginaires, avant de les appliquer dans la réalité. Ce genre permet de tisser des liens entre différents domaines et d’anticiper les convergences possibles entre diverses tendances.

Un imaginaire critique et subversif au service de la société

La science-fiction a souvent été perçue comme une représentation de la société idéale ou utopique. Pourtant, de récentes critiques ont montré que ce genre peut aussi être au service du capitalisme et des structures technoscientifiques pour promouvoir et contrôler les recherches et développement. En ce sens, la science-fiction peut être un art à la fois subversif et critique, en quête de sens et de transformation et à la fois être un outil de contrôle et de manipulation. Certaines œuvres mettent en lumière les dangers potentiels de l’innovation et les dérives possibles, incitant à la réflexion sur les choix technologiques et leur impact sur la société.

Les récits dystopiques, par exemple, offrent un éclairage sur les conséquences négatives de certaines avancées et permettent de mieux comprendre les risques associés à l’innovation. Mais ces mêmes récits peuvent construire une peur en l’avenir, une révulsion envers la technologie, ou construire une peur sur des aspects mineurs d’une technologie. Ainsi, la science-fiction devient un outil précieux pour les entreprises et les décideurs, qui peuvent s’en inspirer pour envisager des futurs alternatifs, construire des visions positives qui peuvent être fondées sur des valeurs éthiques et responsables.

Anticiper l’avenir : un travail collectif et humain

La science-fiction, par ses scénarios inventifs, permet de stimuler l’imagination collective et de préparer à se projeter dans des réalités nouvelles. En anticipant les répercussions possibles de leurs choix, la population, les entreprises et les organisations peuvent ajuster leurs stratégies d’innovation et façonner des trajectoires futures alignées sur des objectifs durables.

Les ateliers proposés à Rimouski-Neigette illustrent cette approche en invitant chacun à participer à la construction de l’avenir. Plus qu’une simple projection, il s’agit d’un véritable entraînement mental et créatif pour se préparer aux défis à venir, en s’appuyant sur un imaginaire collectif capable de repousser les frontières de ce qui semble possible.

Conclusion

À travers ces ateliers d’exploration du futur, la Collectivité ZéN de Rimouski-Neigette incite la population à participer activement à la réflexion sur l’avenir de leur territoire. En alliant la rigueur scientifique et la créativité de la science-fiction, ces ateliers offrent une occasion unique de rêver, de débattre et de construire ensemble un avenir plus juste et plus durable. L’imaginaire devient ainsi un levier stratégique pour anticiper les transformations à venir et faire face aux défis de demain.

Quentin Ladetto, « Imaginer pour mieux se préparer », Marché & organisations, 2025/1, n° 52.

Michaud, Thomas. et al. « Science-fiction et management de l’innovation ». Marché et organisations, 2025/1 N° 52, 2025. p.5-24, URL : shs.cairn.info/revue-marche-et-organisations-2025-1-page-5?lang=fr.

Célébration du Mois de l’Histoire des Noir.es 2025

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Chaque année, le Mois de l’Histoire des Noir.es, qui se déroule en février, est l’occasion de rendre hommage aux luttes historiques et aux contributions des communautés noires à l’échelle mondiale. Cette célébration met en lumière leurs combats pour la liberté, l’équité et la justice sociale, tout en soulignant leur impact sur l’histoire, l’économie, la culture et la société.

Au Québec, le Mois de l’Histoire des Noir.es est célébré depuis 2007, en valorisant le rôle des communautés noires dans l’évolution de la société québécoise. Dans ce cadre, la région de Rimouski-Neigette se prépare à vivre une série d’événements dynamiques et enrichissants sous le thème « Tout ce que nous (ap)portons » durant le mois de février 2025.

Une programmation diversifiée et engagée

Le Mois de l’Histoire des Noir.es à Rimouski débutera le 1er février avec une grande soirée d’ouverture aux Bains Publics. De 18 h 30 à 20 h, des discours de dignitaires et des témoignages de la communauté afrodescendante de Rimouski seront accompagnés d’une exposition de peintures et de musique, créant une ambiance festive. À 20 h, l’humoriste Garihanna Jean-Louis, porte-parole officielle de l’événement, animera un one-woman show captivant.

Le 6 février, la Coopérative Paradis accueillera la projection du film L’histoire de Souleymane, un drame poignant sur un jeune Guinéen qui lutte pour obtenir son statut de réfugié politique. À la suite de la projection, un débat sur la situation des migrants sans statut sera animé par un agent de soutien en immigration.

Le 13 février, les Bains Publics se transformeront en un espace de fête et de partage culturel avec une soirée haïtienne. La soirée inclura une initiation à la danse konpa, suivie d’une dégustation de griot, un plat traditionnel haïtien, pour célébrer la richesse de la culture haïtienne.

Le 14 février, le public est invité à un concert de jazz exceptionnel à Spect’Art, où Donald Dogbo, artiste aux influences variées, présentera son album COUBLI. Ce concert promet de réchauffer l’atmosphère musicale de la région.

Le 19 février, les Bains Publics seront le lieu de lancement du Zine Le Sang de la République Démocratique du Congo, un projet de l’artiste Ange Made, qui abordera la situation politique et sanitaire actuelle en RDC à travers un regard poignant.

Le 22 février, au Cégep de Rimouski, une capsule vidéo issue de la série documentaire Elles, animée par la rappeuse engagée Sarahmée, sera projetée, suivie d’une discussion sur les violences sexuelles et le rôle des jeunes militantes dans la lutte pour la protection des enfants et des adolescents.

La programmation se clôturera le 28 février avec une soirée festive à la Coudée du Cégep de Rimouski, où le public pourra déguster des plats africains et profiter d’un concert du groupe Djely Tapa, fusionnant musique mandingue, blues du désert et sonorités électroniques.

Un mois d’échanges et de réflexion

Au-delà de la célébration de la culture afrodescendante, ce Mois de l’Histoire des Noir.es est aussi une occasion de réfléchir collectivement aux défis contemporains des communautés noires, notamment les questions liées au racisme environnemental et à l’injustice sociale. Les activités proposées encouragent les échanges, la découverte et la réflexion sur un avenir commun, inclusif et solidaire.

La programmation de 2025 bénéficie du soutien financier du ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, et toutes les activités sont gratuites, sauf mention contraire. Les billets peuvent être obtenus en ligne ou directement dans les lieux partenaires.

Rejoignez la communauté rimouskoise pour célébrer la diversité, l’histoire et les contributions des communautés noires tout au long du mois de février 2025 !

Informations pratiques :
Pour toute information supplémentaire, contactez l’organisateur à l’adresse suivante : axel@aibsl.org.

Espaces sécurisés et logement social

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Depuis les années 1980, les théories postmodernes ont marqué un tournant dans les luttes sociales. En mettant l’accent sur les libertés individuelles et les revendications identitaires, ces approches ont souvent relégué au second plan les luttes collectives liées à la classe sociale et aux inégalités économiques. Ce glissement a eu des conséquences importantes, notamment l’invisibilisation des femmes et de leurs réalités sociales, mais aussi une tendance à marchandiser ces mêmes réalités. 

Parmi les initiatives influencées par ces courants, la revendication d’espaces sécurisés a pris une place centrale. Si ces espaces visent à protéger les individus vulnérables, ils s’inscrivent parfois dans des politiques urbaines controversées, telles que l’augmentation de la surveillance dans les quartiers populaires ou les processus de gentrification. Ces évolutions contribuent à masquer des problématiques structurelles, comme les inégalités de classe et de race, au profit d’une approche plus institutionnelle de la sécurité. 

La Débrouille

Cette tension entre aspirations sécuritaires et besoins structurels se manifeste également dans le contexte local. En mai 2023, Maïté Blanchette-Vézina, députée de Rimouski, annonçait une subvention de 23 500 $ pour soutenir La Débrouille dans l’élaboration d’une maison de deuxième étape comprenant 16 logements. Ce projet vise à offrir un refuge et un accompagnement à des personnes en situation de transition, répondant ainsi à des besoins urgents de logement social. 

Cependant, malgré trois années de préparation, l’organisme attend toujours un financement suffisant pour concrétiser ce projet. Cette attente souligne les limites d’un système qui peine à répondre aux besoins essentiels tout en privilégiant parfois des initiatives plus institutionnelles ou symboliques. 

L’évolution des luttes identitaires

L’exemple de l’activisme LGBTQIA2+ illustre bien cette transformation. Ce mouvement, qui était historiquement une coalition multiraciale et populaire, s’est peu à peu recentré sur la lutte contre la violence et la recherche de reconnaissance institutionnelle. En mettant la sécurité au cœur de ses priorités, il a parfois délaissé les combats contre les systèmes politiques corrompus et les inégalités économiques croissantes. 

Comme le souligne le chercheur Halberstam, cette quête de sécurité ne doit pas enfermer les luttes dans des cadres restrictifs ou des logiques individualistes en les infiltrant et les influençant. C’est pourquoi ces luttes tendent de maintenir leurs espaces inclusifs ouverts tout en les sécurisant afin qu’ils répondent aux besoins des communautés tout en restant ancrés dans des revendications sociales et économiques collectives. 

Réconcilier luttes identitaires et enjeux collectifs

Comme le montre l’activisme LGBTQIA2, pour répondre efficacement aux défis actuels, il est nécessaire de trouver un équilibre entre les dimensions identitaires et les problématiques sociales et économiques. Les espaces sécurisés, tout comme les projets de logement social, doivent être pensés comme des outils de transformation collective, et non comme des réponses isolées. 

L’objectif final devrait être de combattre les inégalités systémiques tout en favorisant des environnements où chaque individu peut vivre en sécurité et avec dignité. La Débrouille, par son projet, montre qu’il est possible d’allier inclusion, protection et justice sociale, tout en s’éloignant des logiques de marchandisation ou de gentrification. 

APPEL DE TEXTES : Vol. XXX, no 4, mars-avril 2025

Date de tombée : 15 février 2025

700 mots maximum

Alors que la planète brûle, littéralement, l’élection de Trump aux États-Unis n’augure rien de bon. Pour le numéro de mars-avril, parlez-nous des effets qu’aura ici l’arrivée de ce tyran. Par ailleurs, ses premiers décrets entraîneront certainement des répercussions dans la région. (tarifs douaniers, etc). L’arrivée du nouveau président nous offre aussi l’occasion de se pencher sur les idéologies qui pointent à l’horizon. Elon Musk, Zuckerberg et les autres fous du roi possèdent déjà le monde. Comment doit on envisager l’avenir avec l’argent est au pouvoir? Par ailleurs, en cet hiver qui n’en finit plus d’arriver et de repartir, quel est l’impact sur vos vies de ces changements climatiques très réels? D’une part, êtes-vous plus écoanxieux et, d’autre part, des solutions novatrices et créatives porteuses d’espoir naissent-elles dans votre environnement immédiat ?

IMPORTANT : Contactez Le Mouton avant de commencer à écrire pour éviter que deux personnes ne travaillent sur la même thématique.

mouton@moutonnoir.com

Important : Nous ne garantissons pas la publication de tous les textes reçus. Et nous nous réservons le droit d’éditer votre texte.

SECTION CULTURELLE CHAMP LIBRE

Nous vous invitons à nous envoyer vos critiques de cinéma, de livres, de musique, d’arts visuels, d’art de la scène et autres manifestations artistiques ainsi que vos réflexions sur la place de l’art et de la culture en région.

Date de tombée : 15 février 2025

Longueur maximale : 550 mots pour la section Champ libre

Courriel : culture@moutonnoir.com

Des haies brise-vent sur la 132

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

C’est une avancée saluée par la population qui utilise la route 132 dans le Bas-Saint-Laurent : le gouvernement du Québec a annoncé l’implantation de haies brise-vent sur un tronçon de la route 132 à Saint-Fabien. Une mesure qui, bien que tardive, répond enfin à une demande de longue date de la mobilisation Le pont de la 20, ça tient pas debout.

Une demande citoyenne de longue date

Depuis plus de dix ans, la population du Bas-Saint-Laurent et les élu.es locaux réclament des mesures concrètes pour améliorer la sécurité de la route 132, notamment dans le secteur de Saint-Fabien. « Il est grand temps que cette mesure voit le jour, mais nous devons souligner que le gouvernement a longtemps adopté une approche réactive, intervenant seulement après des accidents graves, et non de manière préventive », a souligné Sébastien Rioux, porte-parole de la mobilisation. Les haies brise-vent font partie d’une série de demandes formulées pour améliorer la sécurité routière dans cette zone accidentogène.

Des propositions concrètes pour sécuriser la route 132

La mobilisation, fidèle à son engagement pour une route 132 plus sûre, continue de défendre un ensemble de recommandations qui vise un réaménagement complet de cette voie cruciale entre Notre-Dame-des-Neiges et Rimouski (secteur Le Bic). Parmi les propositions figurent :

  • Amélioration de la signalisation : renforcer la visibilité de la route lors de conditions météorologiques difficiles.
  • Installation de bandes rugueuses : afin de prévenir les accidents en alertant les conducteurs lors d’une déviation involontaire.
  • Amélioration de l’éclairage public : pour éclairer les tronçons les plus accidentogènes et ainsi réduire les risques.
  • Création d’une troisième voie là où l’environnement le permet : inspirée du modèle suédois des routes 2+1, cette mesure permettrait des dépassements sécuritaires et une meilleure fluidité de la circulation.

Un pas dans la bonne direction, mais d’autres actions sont nécessaires

L’implantation de haies brise-vent est donc perçue comme un premier pas dans la bonne direction, mais elle ne saurait constituer une solution isolée. Selon Sébastien Rioux, le gouvernement doit s’assurer de la collaboration avec les propriétaires fonciers afin de permettre l’implantation effective de ces haies et leur croissance, qui prendra un certain temps avant qu’elles ne puissent devenir pleinement efficaces.

« Le gouvernement doit élargir sa vision et prendre des mesures immédiates et globales pour sécuriser l’ensemble des tronçons dangereux de la route 132, afin de prévenir de nouveaux drames. La sécurité des usagers de la route 132 doit être une priorité absolue. Notre groupe le dit depuis maintenant 13 ans », a insisté Rioux.

Conclusion

L’annonce de l’implantation des haies brise-vent sur la route 132 marque indéniablement un progrès, mais la route est encore longue. Le groupe « Le pont de la 20, ça tient pas debout » continue de plaider pour des actions immédiates sur d’autres secteurs dangereux et pour une approche globale de la sécurité routière, loin des solutions réactives. Le gouvernement doit saisir cette occasion pour mettre en œuvre des mesures supplémentaires et offrir à la population du Bas-Saint-Laurent 132 les garanties d’une sécurité avant tout.

Annonce des auteurs et autrices sélectionné.es pour les résidences et les tournées littéraires en Gaspésie

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le 14 janvier 2025, Culture Gaspésie et poème en août ont dévoilé les auteurs et autrices retenu.es dans le cadre de leur appel de dossiers pour les Résidences et Tournées littéraires, un projet qui soutient la création littéraire en Gaspésie. Ce projet vise à offrir trois séjours de création et cinq tournées-rencontres avec le public, en collaboration avec diverses municipalités de la région. Il fait écho à la vitalité culturelle de la Gaspésie, comme en témoigne la qualité des 25 dossiers déposés.

Les auteurs et autrices sélectionné.es pour les résidences littéraires bénéficieront d’un environnement propice à la création dans des lieux uniques des MRC de la région. Quant aux auteurs et autrices choisis pour les tournées littéraires, l’opportunité de rencontrer le public gaspésien, d’échanger sur leurs œuvres et de tisser des liens avec leur territoire d’accueil leur est offerte. Voici les heureux élu.es :

Volet Résidences Littéraires :

  • Séjour Salon58 (MRC de la Haute-Gaspésie) : Christine Porlier (fragment poétique)
    Son projet, amorcé en 2019, explore les liens entre le territoire et les gens qui l’habitent, un travail presque achevé qui bénéficiera grandement de cette résidence pour accélérer sa publication.
  • Séjour Domaine Renard (MRC de Rocher Percé) : Line Richard (roman)
    L’autrice, qui rédige actuellement son troisième livre, trouve dans les paysages naturels de la Gaspésie une source d’inspiration idéale pour l’immersion dans son processus créatif.
  • Séjour [ÈST] Éco-cabines (MRC Avignon) : Marie-Pier Bédard (essai)
    Marie-Pier Bédard se plonge dans un projet d’écriture qu’elle développe depuis plusieurs mois avec l’objectif de donner une nouvelle direction à son récit grâce à l’appui de cette résidence.

Volet Tournées Littéraires :

  • Perrine Leblanc (ouvrage à paraître au printemps 2025)
    Cette tournée arrive à un moment clé de la carrière de Perrine Leblanc, alors que son livre s’apprête à être publié. Elle espère que cette tournée littéraire lui permettra d’ouvrir de nouvelles perspectives créatives.
  • Pascal Alain (Trois livres de la série Curiosités de la Gaspésie)
    Historien et auteur, Pascal Alain souhaite terminer ses recherches sur le patrimoine gaspésien en rencontrant le public tout en échangeant sur ses travaux, ce qui enrichira ses futurs projets d’écriture.
  • Priscilla Guy (autrice de Je garde mes lunettes fumées près de moi, La course de fond, L’amie)
    Priscilla Guy voit cette tournée comme une opportunité de partager des voix collectives et d’ancrer ses projets littéraires dans le contexte gaspésien tout en explorant les thèmes abordés dans ses écrits.
  • Claire Moeder (autrice de Le ventre des roches, Les marcheuses, et d’un nouveau livre à paraître au printemps)
    Claire Moeder souhaite utiliser cette tournée pour dialoguer avec le public autour de la nature, de la résilience et des bouleversements personnels et collectifs qu’elle explore dans ses œuvres.
  • Laurence Lallier-Roussin (extrait du roman Les tiques)
    Cette tournée permettrait à Laurence Lallier-Roussin de rencontrer le public gaspésien tout en explorant des thématiques d’identité queer rurale et d’écologie à travers ses écrits.

Ces résidences et tournées sont rendues possibles grâce aux précieux partenaires de l’initiative : [ÈST] Éco-cabines, Salon58 et Domaine Renard, qui offrent un cadre de création unique aux écrivain·e·s en résidence.

Culture Gaspésie et poème en août continuent ainsi de contribuer activement à la promotion et au développement de la culture littéraire dans la région, en soutenant la rencontre entre les auteurs et les lecteurs.

Veganwashing : L’instrumentalisation politique du véganisme

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

Le livre Veganwashing : l’instrumentalisation politique du véganisme de Jérôme Segal explore un sujet inédit et fascinant : comment le véganisme, un mouvement éthique et écologique, est détourné pour servir des intérêts politiques et commerciaux. Publié en août 2024, cet essai offre une analyse critique et rigoureuse du phénomène du « veganwashing ».

Le concept de Veganwashing

Le terme « veganwashing » s’inspire de son pendant bien connu, le « greenwashing », qui désigne les stratégies utilisées par des entreprises pour se donner une image écologique sans véritable engagement. Dans le contexte du véganisme, le veganwashing se réfère à l’instrumentalisation de ce mouvement à des fins souvent éloignées de ses principes éthiques fondamentaux.

L’origine du terme remonte à Israël en 2013, où le gouvernement Nétanyahou mettait en avant des avancées dans la protection animale tout en menant des opérations militaires controversées contre les Palestiniens. Ce paradoxe a suscité des critiques soulignant la récupération de la cause animale pour redorer l’image de l’État israélien sur la scène internationale.

Exemples de Veganwashing

Dans son ouvrage, Jérôme Segal illustre le veganwashing avec des exemples marquants :

– Tesla et les habitacles en cuir végétal : Tesla, symbole de l’innovation écologique, propose des véhicules aux intérieurs véganes. Cependant, cette initiative est parfois perçue comme une manière de détourner l’attention des critiques portant sur l’impact écologique des batteries ou les conditions de travail dans la chaîne de production.

– Les alliances idéologiques surprenantes : Segal examine comment certains militants antispécistes peuvent s’allier à des mouvements d’extrême droite, partageant une rhétorique sur la pureté et le rejet des cultures traditionnelles basées sur la consommation de produits animaux. Cette instrumentalisation de la cause végane suscite des débats éthiques.

Ces exemples montrent que le véganisme, bien qu’animé par des valeurs nobles, peut être utilisé pour masquer des pratiques ou idéologies discutables.

Pourquoi le véganisme est-il vulnérable ?

L’auteur explore les raisons pour lesquelles le véganisme est particulièrement susceptible d’être récupéré. Il met en lumière les interactions complexes entre le véganisme et le capitalisme. En promouvant une consommation alternative (produits végétaliens, cuir synthétique, etc.), le mouvement végane peut involontairement s’inscrire dans une logique de marché, détournant son objectif initial d’une remise en question du système global.

Le livre questionne également si le véganisme, en s’inscrivant dans des tendances de consommation, ne risque pas d’être dilué, perdant son message politique et éthique au profit d’une approche marketing.

L’appel à la vigilance

En conclusion, Jérôme Segal appelle à une vigilance accrue face aux tentatives de récupération du véganisme. Pour lui, il est essentiel de préserver l’intégrité de ce mouvement, qui ne doit pas être réduit à une simple tendance ou à un outil de propagande.

Le véganisme, insiste l’auteur, doit rester ancré dans ses principes éthiques fondamentaux, à savoir la défense des droits des animaux, la protection de l’environnement et la lutte pour une société plus juste.

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