Musée de l’Empress : 25 ans d’histoire

L’année 2025 marque le 25e anniversaire de la construction du Musée Empress of Ireland de Pointe-au-Père.
Des piliers de l’histoire du Musée ont remonté le temps pour raconter les moments marquants du projet, le 12 juin dernier, lors d’un cocktail qui a réuni plusieurs invités au Hangar 14.
Le premier à avoir été invité à prendre la parole a été Donald Tremblay, membre fondateur de l’organisme.
Avec une mémoire phénoménale, ce pionnier du Musée Empress of Ireland a relaté les tout débuts du projet, alors que l’épave gisait dans les profondeurs du fleuve Saint-Laurent depuis plus de 50 ans et que personne ne savait exactement où elle se situait.
Au début des années 1980, alors que l’épave est localisée au large de Sainte-Luce, de braves plongeurs ramènent à la surface plusieurs objets du transatlantique, qui a été le tombeau de 1012 passagers et membres d’équipage en 1914.
Trouver une place aux objets
« Il fallait trouver une place pour ces objets, a raconté M. Tremblay. Dans ma tête, la meilleure place était ici [le Site historique maritime de la Pointe-au-Père] parce que c’est un lieu maritime. C’était la première station de pilotage au Canada. » En 1982, l’organisme, qui est alors connu sous le nom de Musée de la mer, s’associe à Parcs Canada, propriétaire et gestionnaire du lieu. « Avec les pièces qu’on avait, on a monté un petit musée », a-t-il mentionné.
Dans un premier temps, il est modestement installé dans la maison de l’ingénieur. « Le premier été, on a eu beaucoup de visiteurs, se souvient M. Tremblay. Ça nous a encouragés. » Par la suite, le musée déménage dans la maison du gardien de phare pour y demeurer jusqu’en 1988.

« Après, il y a eu la grande bâtisse qu’est maintenant le Musée Empress of Ireland, qui attire 80 000 visiteurs par année, le Hangar 14 et le sous-marin, avec lequel on a eu bien de la misère au début », a-t-il relaté. Donald Tremblay s’est dit extrêmement fier d’avoir été un témoin privilégié de l’évolution du projet.
« Et je sais que ce n’est pas fini ! L’équipe a encore beaucoup d’idées. »
Paul Gagné a été l’un des premiers à croire financièrement au projet. À la fin des années 1990, ce gestionnaire de Développement économique Canada a accompagné l’équipe dans le financement du Musée. « Il y avait une bonne équipe, qui avait des liens avec Parcs Canada, a-t-il justifié. Le phare et le Musée Empress of Ireland, tout ça se tenait. Il y avait beaucoup d’originalité dans le projet. On a pensé que la clientèle touristique serait intéressée. Puis, le plan d’affaires était adéquat. »
À la barre pendant 32 ans
Celui qui a été présenté comme le chef d’équipe a été invité à monter sur scène. L’ancien directeur général du Musée, Serge Guay, a d’abord fait le récit des premières propositions de Donald Tremblay.
« Il est arrivé avec une maquette. Il voulait faire un simulateur de naufrage. Son idée était d’embarquer 14 personnes dans une espèce de conteneur, une copie d’une cabine de passager de l’Empress. Tout ça se mettait à basculer pendant 14 minutes. On est parti avec cette idée-là et c’est comme ça qu’on a développé le premier projet. »

Guay et son équipage se sont mis à la tâche pour trouver un concept nouveau et exceptionnel. « On savait que l’histoire de l’Empress touchait les gens », a indiqué l’ancien dirigeant de l’organisme. C’est ainsi qu’aux alentours de 1995, une analyse a été commandée. Les consultants leur ont alors proposé une projection en 3D afin de faire revivre le dernier voyage du paquebot transatlantique, en partant de Québec jusqu’à Sainte-Luce, sans faire vivre le naufrage.
« C’est avec ce projet qu’on a réussi à trouver le financement et que le Musée a pu être réalisé avec, comme principales attractions, le spectacle en 3D et la salle d’exposition », a-t-il indiqué. En 2017, l’achalandage étant en croissance, le Musée a été agrandi. Après 32 ans à la barre de l’établissement, Serge Guay a pris sa retraite en décembre 2021.
L’architecte et le principal donateur
L’architecte qui a élaboré les plans du Musée faisait aussi partie des invités d’honneur de l’événement célébrant le 25e anniversaire. Le design, avec la reproduction des cheminées penchées évoquant le navire en train de couler, ne faisait pas l’unanimité.
Quoi qu’il en soit, Richard Goulet est allé de l’avant avec ses plans. À l’époque, le projet avait coûté 700 000 $, à part l’exposition. « Aujourd’hui, ce serait trois fois plus », estime-t-il. L’architecte de Québec a avoué qu’il s’agissait du projet dont il était le plus fier.
Le dernier à avoir pris la parole a été le plongeur Joël Dionne. Avec plus de 50 objets provenant de l’épave et qu’il a remis au Musée, dont une trentaine sont exposés, il est l’un des principaux donateurs.
Avant que l’épave de l’Empress of Ireland ne soit protégée à titre de bien culturel en 1999, celui qui a fait environ 175 plongées sur l’épave a raconté comment il était facile, à l’époque, de remonter des pièces.
Le maître de cérémonie était Albéric Gallant, qui a incarné pendant une dizaine d’années le personnage du capitaine de l’Empress of Ireland, Henry George Kendall.
Artefact dévoilé
Le dévoilement d’un nouvel artefact a été un moment fort de la cérémonie du jeudi 12 juin, qui visait à célébrer le 25e anniversaire du Musée Empress of Ireland. Il s’agit du télégraphe du funeste paquebot, qui avait été remonté à la surface le 17 août 1975 par Ron Stopani, un plongeur de Las Vegas.
Il y a trois ans, la famille Zeller des États-Unis est venue au Musée porter plusieurs objets qui avaient appartenu au paternel. Les membres de la famille avaient aussi apporté plusieurs documents qui décrivaient comment leur père organisait ses plongées.

« Ils avaient plusieurs photos et diapositives de différentes plongées qui avaient été faites au fil des années à Sainte-Luce et à Pointe-au-Père, a raconté la directrice générale de l’institution muséale, Hélène Théberge. Parmi ces documents, il y avait une photo du plongeur Ron Stopani, qui venait de repêcher l’appareil télégraphique. On avait aussi une lettre écrite de la main de M. Zeller, qui disait à M. Stopani, comment c’était un objet important de l’Empress et qu’il devrait être bien conservé. Puis, la famille Zeller nous a dit que M. Stopani était encore vivant. »
L’équipe du Musée en a alors parlé à l’historien David St-Pierre qui a entrepris des recherches. Celles-ci ont duré plusieurs mois. « Un jour, il reçoit un appel de M. Stopani, qui lui dit qu’il souhaiterait laisser l’objet au Musée Empress of Ireland », a précisé Mme Théberge.
Le télégraphe
Il y a donc 50 ans que le télégraphe a été extirpé de l’épave. Après avoir reposé dans les abysses du Saint-Laurent pendant 61 ans, il n’est pas trop détérioré. « Ce qui est exceptionnel, c’est que c’est cet appareil qui a reçu le dernier message avant la perte de courant et qui disait que l’Eureka et le Lady Evelyn étaient en route pour venir secourir les naufragés », a mentionné la muséologue Roxanne Julien-Friolet.
Le précieux objet fera l’objet d’une restauration pour éventuellement l’exposer au Musée. Aujourd’hui âgé de 81 ans, Ron Stopani a promis à l’équipe du Musée qu’il lui ferait parvenir plusieurs autres artefacts de l’Empress qu’il a en sa possession.