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“Être autiste”: implicite, connotation et identité [en]

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Je réfléchissais à cette question hier soir après avoir lu une partie des échanges qui “font rage” dans un coin de LinkedIn autour de “l’identité autistique“.
Il m’a semblé qu’un élément régulièrement mis de côté par les personnes argumentant « pour » la formulation « être autiste », en faisait des parallèles avec « être barbu » ou « être gaucher » c’est (encore une fois) la question de l’implicite. Au point que je me suis demandé s’il y a quelque chose du côté des caractéristiques de l’autisme à mettre en lien avec ça — la difficulté de tenir compte de l’implicite.

Qu’on le veuille ou non, tout énoncé comporte une part d’implicite. Les mots qu’on utilise ont des connotations. Comme le disait un de mes profs de linguistique, c’est comme des petits wagons qui sont accrochés au mot-locomotive et qui viennent avec quand on l’utilise. Certains mots ont plus de wagons que d’autres.

« Autisme/autiste » et « gaucher » ou « femme » sont tous des mots qu’on peut utiliser pour qualifier une personne. Mais ils n’ont pas les mêmes connotations, pas les mêmes types de « wagons ».

Le problème, à mon avis, avec « autisme comme identité » c’est que c’est une posture qui ne tient pas compte de ces wagons et par conséquent du décalage très grand entre l’intention de sens pour la personne qui dit « je suis autiste » et les associations qu’évoque ce terme chez l’écrasante majorité des personnes qui vont lire/entendre cette phrase.

On n’est pas libre d’utiliser les mots de la façon qu’on veut sans tenir compte de la signification perçue par l’autre — si ce que l’on souhaite c’est être compris.

« Autisme », c’est un mot extrêmement stigmatisant à la base. C’est un mot que tout le monde connaît et dont tout le monde pense connaître la signification. Et c’est une signification qui ne correspond pas du tout à ce que veulent exprimer beaucoup de personnes qui l’utilisent. Je comprends bien la démarche qui est de vouloir « déstigmatiser » un terme en se l’appropriant: on a un exemple avec « queer » par exemple, mais notons que le sens « stigmatisant » du mot était bien moins solidement ancré dans l’inconscient lexical qu’il ne l’est pour le mot « autiste », et qu’il y a une certaine naïveté linguistique et sociologique à penser qu’on peut reprendre ainsi le contrôle sur un mot.

Je pense, en fait, que le problème est moins dans le « je suis » que dans le « autiste ». Et que débattre sur le verbe (« être » versus « avoir ») c’est faire fausse route et vouer l’échange à l’échec, parce qu’en effet, dire « je suis xyz » n’en fait pas une question identitaire en soi — le repli identitaire peut très bien être réactif, suite aux réactions négatives à la formulation choisie pour parler de soi.

Dans ma réflexion, je cherchais d’autres mots « parallèles » qui pourraient également démontrer le phénomène que j’observe ici. Si on dit « je suis paraplégique » (un autre exemple aperçu dans les échanges), pourquoi ça ne me fait pas le même effet qu’entendre « je suis autiste »? Idem pour « je suis bipolaire », ou « je suis dyslexique »? Parce que les associations inconscientes (la connotation) sont différentes. Ce n’est pas le verbe qui fait ça. Est-ce qu’on peut donc trouver un terme qui démontre aussi cette problématique d’associations?

Le meilleur que j’ai trouvé — et qui me concerne — c’est « sourd ». Et, intéressant à noter, c’est aussi un terme autour de l’utilisation duquel émerge une problématique identitaire. Et il y a toute une série de débats terminologiques dans le « spectre » de la surdité (qu’on ne retrouve pas côté TDAH — je me demande d’ailleurs ce qu’il en est pour les handicaps de la vue?).

Déballons. Je dis que je suis malentendante. Je ne dis pas « je suis sourde ». Pourquoi? Si je dis “je suis sourde”, les gens comprennent quelque chose qui ne correspond pas à ma réalité. Pour beaucoup de monde, “sourd” ça veut dire “n’entend rien” ou au minimum “ne comprend rien”. En fait, strictement parlant, il y a différents degrés de surdité, mais le grand public a une vision beaucoup plus simpliste de tout ça. J’ai une surdité légère à moyenne congénitale (stable). J’ai fonctionné sans appareillage jusqu’à l’âge de 38 ans, fait des études, enseigné, etc. Pour la plupart des gens, je suis dans la catégorie “entend pas bien”. La nana un peu chiante à qui il faut répéter les choses, qui entend pas quand on l’appelle, qui comprend de travers, qui parle fort. Pas “sourde”, au sens où on le comprend. Donc je ne dis pas “je suis sourde” (risquant des réactions de type “hah mais t’es pas sourde, arrête de raconter n’importe quoi” – ça vous dit quelque chose, ça?) mais “je suis malentendante”. Preuve en est que si quelque chose “passe mal” pour moi quand j’entends “je suis autiste”, ce n’est pas le “je suis” qui est en cause mais ce qui vient après.

Le parallèle ne s’arrête pas là. “Sourd”, c’est stigmatisé et stigmatisant, comme terme. La surdité, contrairement à la cécité qui limite principalement le rapport à l’environnement, ça vient directement impacter le rapport à autrui – le lien social. La personne “sourde”, dans l’imaginaire populaire un peu historique, c’est “le sourd-muet”, c’est la personne qui ne parle pas, et aussi dont l’intellect est affecté (vu qu’on ne peut pas communiquer avec). On sait bien que c’est faux – tout comme on sait bien que ce à quoi on fait référence quand on parle d’autisme n’est pas à réduire aux histoires d’il y a des décennies, d’enfants non-verbaux avec déficit intellectuel enfermés dans des institutions et “coupés du monde”. Mais les mots continuent, malgré nous et malgré tout, à charrier ces petits wagons de connotations, d’implicite. On notera, concernant la surdité, l’utilisation du terme Sourd avec une majuscule pour l’identité culturelle.

Bon, ceci devait être un commentaire sur LinkedIn, ça s’est transformé en billet de blog… C’est une réflexion qui vaut ce qu’elle vaut. En résumé, voici où j’en suis:

  • l’utilisation de la formule “je suis autiste” pose d’autres problèmes que celui de la revendication identitaire – il faut en tenir compte également;
  • les débats autour de la revendication identitaire sont légitimes et importants mais s’ils se focalisent sur la formulation (“je suis xyz”), ils risquent de nous faire courir après un hareng rouge au lieu de rester dans le sujet.

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Ruth Paine, Who Gave Lodging to Marina Oswald, Dies at 92

Her knowledge of Lee Harvey Oswald and his wife made her a noteworthy witness during the Warren Commission’s investigation into the assassination of President John F. Kennedy.

© Eric Risberg/Associated Press

Ruth Paine in 2013. She let Lee Harvey Oswald and his wife, Marina, stay at her home in 1963 and, according to the author Thomas Mallon, knew more about the Oswalds’ movements and moods in the months prior to the assassination of President John F. Kennedy than anyone else did.
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This Summer, a Hostile Reception for Many Israelis Abroad

Against the backdrop of the devastating war and hunger crisis in Gaza, Israeli travelers have been harassed and accosted in Europe, sometimes just for speaking Hebrew.

© Costas Metaxakis/Agence France-Presse — Getty Images

Greek riot police officers stood guard as pro-Palestinian demonstrators protested against the arrival of a cruise liner carrying Israeli tourists, in Agios Nikolaos on the island of Crete, in July.
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Following the Sounds of Arabic to Rediscover Paris

A language student’s guide to the French capital highlights the culinary, literary and musical influences that quietly shape everyday life.

Inside the Andalusian garden at the Grand Mosque of Paris.
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From 53% to 68%: Ukrainian becomes dominant language as war reshapes identity

Gradus Research Ukrainian language

When Putin launched his full-scale invasion in February 2022, 46% of Ukrainians spoke Russian at home while 53% used Ukrainian. By August 2025, those numbers had flipped dramatically: 68% now speak Ukrainian daily, compared to just 30% using Russian, according to new survey data from Gradus Research.

The cultural revolution Putin didn’t plan

The speed of this shift, documented in the new Gradus Research survey, reveals how quickly societies can remake themselves under existential pressure. Putin justified his invasion partly as protecting Russian speakers from supposed persecution. Instead, his war has accelerated the voluntary abandonment of the Russian language across Ukraine faster than any government policy ever could.

Three years of bombardment have accomplished what decades of independence couldn’t: the near-elimination of Russian as Ukraine’s second major language. Every missile strike, every destroyed home or hospital, and every forced evacuation has severed another cultural thread linking Ukrainian families to Moscow.

The war intended to keep Ukraine in Russia’s orbit has instead pushed it linguistically toward Europe at unprecedented speed.

What optimism looks like under fire

Despite constant military pressure, Ukrainian confidence in their personal future has slightly increased, rising from 61% last year to 64% this year. The change is modest, but its meaning is significant—it suggests a society that hasn’t broken under the weight of prolonged conflict.

23% say they don’t believe in a better future, while 12% remain uncertain. But the trend points away from despair, even as the war grinds through its fourth year.

Unity forged by a common enemy

The survey also reveals how external threats reshape internal bonds. When asked what unites them most, 67% of Ukrainians point to their “common enemy”—a stark reminder that national solidarity now depends heavily on opposition to Russian aggression.

Only 38% cite national identity as the strongest unifying factor, down from 42% in 2023.

This suggests Ukrainian unity is more situational than organic, held together primarily by the external threat rather than shared cultural foundations.

Yet this wartime solidarity has proven durable. Three years of conflict have tested Ukrainian society’s cohesion without breaking it, even as internal divisions over leadership decisions (50%), political views (47%), and social inequality (47%) persist beneath the surface.

Preparing for the peace to come

Ukrainian expectations for post-war reconstruction reveal a society already thinking beyond survival mode. When asked about opportunities after victory, 45% prioritize continued defense strengthening—though this represents a decline from 52% in previous years, suggesting growing confidence in Ukraine’s military capabilities.

Other leading hopes include:

  • Modernizing infrastructure (40%)
  • Gaining global economic support (39%)
  • Fostering business and entrepreneurship (36%)

But the list of challenges tells a more complex story, as people prioritize the following:

  • Economic recovery (57%)
  • Rebuilding cities and infrastructure (54%)
  • Veteran reintegration (51%)
  • Security in occupied territories (51%)
  • Healthcare system reconstruction (42%)

The society Putin is actually facing

The Gradus survey, conducted among 1,000 Ukrainians aged 18-60 in cities with over 50,000 residents, captures a nation in the middle of profound transformation.

The Russia that launched this war to bring Ukraine back into its sphere of influence faces a country that has moved further away culturally and emotionally than before the invasion began.

The 2025 Independence Day survey documents how Ukraine has used wartime pressures to accelerate the national consolidation Moscow sought to prevent. The dramatic shift in daily language use represents one of modern European history’s most rapid cultural transformations.

Moscow’s stated goal of protecting Russian speakers has instead coincided with the steepest decline in Russian language use since Ukraine’s independence.

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Faced With Trump’s English Mandate, Mexico’s Truckers Report to Class

Companies, fearing penalties that could put them out of business, race to make sure their drivers have enough English to communicate with U.S. officials.

© Meridith Kohut for The New York Times

Mexican truck drivers who work transporting cargo to the United States attending a six-week crash course in English this month in Nuevo Laredo, Mexico.
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